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Artois Méthagri, du gaz vert agricole pour la Communauté Urbaine d’Arras

Article paru dans le Bioénergie International n°75 d’octobre 2021

Guillaume Degraeve, François-Xavier Carnel et Samuel Degeuser d’Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

L’unité de biométhane Artois Méthagri est implantée en pleine campagne aux confins de l’Artois et du Cambrésis dans les Hauts-de-France, entre les communes de Monchy-le-Preux, Boiry-Notre-Dame, Vis-en-Artois et Guémappe. Fruit de la rencontre de deux exploitations agricoles de tailles moyennes, elle a vu le jour dans une région aux terres fertiles, très peuplée et disposant d’un réseau de gaz naturel très dense. Sa production est dirigée vers la communauté d’agglomération d’Arras, un bassin de population de plus de 100 000 habitants, riche en activités économiques.

Montage du projet : diplomatie locale et choix techniques

Le projet de l’unité de méthanisation Artois Méthagri a commencé à germer dans l’esprit de deux jeunes agriculteurs, Samuel Degeuser et Guillaume Degraeve, suite à la mise en service en 2015 de l’unité de méthanisation Métha-Ternois par l’un de leurs amis. Ensuite, une longue série de visites d’installations en service, en France et à l’étranger, une quarantaine au total, a permis aux deux agriculteurs de finaliser le modèle de leur projet qui allait se faire en injection de biométhane. Les deux exploitations sont situées à Boiry-Notre-Dame pour celle de Guillaume en grande culture (lin, betterave sucrière, pomme de terre, céréales légumes), et à Vis-en-Artois pour celle de Samuel en polyculture-élevage porcin naisseur-engraisseur.

Artois Méthagri au petit matin, photo Frédéric Douard

Le montage du projet s’est fait en concertation avec la Préfecture du Pas-de-Calais avec comme consigne de celle-ci d’informer avant d’agir. Une information a donc été réalisée auprès des quatre municipalités riveraines et le permis de construire a été octroyé en octobre 2018, à l’écart des habitations, sur le bord de l’ancienne route nationale 39 reliant Charleville-Mézières au Touquet, précisément entre Arras et Cambrai, un axe hors gel et très bien desservi, aujourd’hui déclassé en route départementale 939. L’installation occupe un terrain de trois hectares avec 110 mètres de façade sur la route.

Après des consultations, les négociations se sont engagées avec quatre constructeurs pour une solution évolutive, incluant l’utilisation de coproduits, et avec broyage obligatoire en entrée de digesteur pour pouvoir incorporer tous types de produits dont les déchets des industries agroalimentaires, nombreuses dans la région.

Les cuves d’Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

Le choix s’est arrêté sur agriKomp sur une série de critères : son système d’agitation à grandes pales ; la simplicité globale des équipements (une pompe pour une action, pas ou peu d’électrovannes pneumatiques, pas de pompes à lobes mais des pompes statoriques onéreuses à l’achat mais moins coûteuses à l’usage, tout en tuyauterie visible) et un seul interlocuteur pour l’ensemble des processus de l’incorporation à l’épuration. La voirie et la cuverie béton ont quant à elles été traitées en lots séparés. La maîtrise d’œuvre globale a été assurée par l’agence Noël du Touquet.

Un investissement de 5,5 M€

Le plan d’affaires au moment de la commande a été établi pour une production de 150 Nm³/h. La commande a quant à elle été réalisée pour un module d’épuration agriPure de 160 Nm³/h avec évolution possible vers les 200 Nm³/h sans nouvelle cuve.

Les intrants solides sont stockés sur 6 200 m² de silos à plat pour les ensilages, avec possibilité de stockage de courte durée sur l’aire de manœuvre de 1 620 m², et dans un hangar de 240 m² pour les intrants secs. Les installations pour les intrants liquides sont constituées d’une fosse à lisier de 200 m³ et de quatre fosses à intrants liquides de 120 m³ avec agitateur à hélices et revêtement de protection.

Le stockage des intrants secs chez Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

Un digesteur et un post-digesteur, d’une capacité unitaire de 2 950 m³ bruts, chacun équipé de trois agitateurs à pales, sont surmontés chacun d’un gazomètre en demi-sphère de 1 980 m³. Le digestat est stocké dans une cuve de 7 700 m³.

Les produits solides sont incorporés dans une trémie à fond mouvant de 124 m³ pouvant alimenter indifféremment les deux digesteurs. L’incorporation a été conçue, selon le cahier des charges des porteurs du projet, avec passage obligatoire des intrants solides dans un broyeur Premix et piège à cailloux.

La trémie d’incorporation à fond mouvant chez Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

L’enveloppe du projet comprend également l’achat d’une chargeuse et d’un ensemble d’épandage au cordon.

Seize mois du début des travaux à l’injection

Les opérateurs et constructeurs d’unités de méthanisation en France sont de plus en plus rodés et mettent en œuvre les projets de plus en plus vite, et même comme ici en pleine pandémie de Covid. Chez Artois Méthagri, seize mois se sont écoulés entre le démarrage des travaux et la première injection de méthane. Le terrassement a débuté le 4 juillet 2019, le coulage des cuves en octobre 2019 et les processus ont été installés à partir de mars 2020.

Pompe d’introduction Wangen dans le digesteur et circuit de chauffage, chez Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

La mise en chauffe de la première cuve s’est faite avec ¾ de lisier et ¼ de maïs, plus 300 m³ de digestat fournis par Agriopale à partir du 17 juillet 2020. Le 20 août, la température était atteinte, la production de gaz commençait au bout de deux semaines et six semaines plus tard une production de 200 Nm³/h était atteinte. La première injection a eu lieu le 15 octobre 2020.

Le poste d’injection d’Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

Les six premiers mois d’exploitation se sont révélés simples et sans soucis majeurs, ce qui ne fut pas le cas avec le poste d’injection coté GRDF, précise Samuel. Puis sont survenus des problèmes d’acidose et de soufre, avec l’ajout de certains intrants agro-alimentaires. Le tout a été résolu par un suivi biologique strict et le niveau de soufre est quant à lui été maîtrisé par les moyens classiques : injection d’oxygène dans les gazomètres, ajout d’oxyde de fer dans la première cuve et filtres à charbon actif avant la purification. Le charbon des filtres est entièrement remplacé tous les trois mois.

La conduite de la méthanisation

C’est François-Xavier Carnel, salarié et responsable du site, ingénieur de formation ICAM Lille, qui suit l’installation au quotidien. Le suivi biologique, d’abord assuré par ServiceUnion, filiale d’agriKomp, jusqu’à fin mai 2021 dans la cadre de la mise en service, a ensuite été confié au laboratoire spécialisé Innolab dont le siège est situé près de Bruges à 120 km du site d’Artois Méthagri. Le laboratoire analyse un échantillon de digestat toutes les deux semaines, ainsi que tout nouveau produit entrant. Toute la maintenance de la partie méthanisation est assurée par François-Xavier.

L’entrée et le pont-bascule chez Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

Dans cette unité en enregistrement ICPE, la ration annuelle s’établit à 18 500 tonnes, et se décline par jour à 35 tonnes de solides et 15 tonnes de liquides. Elle est composée en solides de pulpe de betteraves déclassées, de CIVE d’hiver, de 6,5 % de maïs ensilage, d’oignons et autres légumes périmés, et d’issues de céréales. La ration liquide est constituée de lisier porcin, de jus de cour, de jus et purées d’industries agroalimentaires impropres à la consommation, de mélanges de déchets végétaux, pulpes de betterave et pommes de terre, et d’autres produits d’opportunités.

Les cuves à intrants liquides chez Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

Le digestat est épandu brut sur une surface potentiellement de 2400 ha, répartie entre les deux exploitations et une quinzaine d’exploitations voisines selon des accords CIVE contre digestat. L’épandage est réalisé par Artois Méthagri au cordon avec une rampe enfouisseuse branchée sur une tonne spécialement achetée pour le projet, capable de pomper et de refouler simultanément. Une autre tonne également avec enfouisseur est aussi utilisée pour les épandanges d’été. L’ensemble des transports de digestat est sous-traité à un entrepreneur voisin, l’ETA Cadet.

Le biométhane

Artois Méthagri est l’une des 25 références actuelles de centrales biométhane agriKomp en France. Le constructeur, qui comme d’autres a développé de nombreuses références en cogénération biogaz (plus de 150 en France en moins de quinze ans), est désormais lancé dans la course au biométhane avec son module de purification membranaire agriPure® mis sur le marché en 2015.

Le module de purification et la chaufferie chez Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

Ce système de filtration membranaire permet de purifier le méthane à plus de 99,4 %, sauf que chez Artois Méthagri, nous sommes dans les Hauts de France, une région historiquement alimentée en gaz naturel provenant du gisement de Groningue aux Pays-Bas. Or le PCS (Pouvoir Calorifique Supérieur) de ce gaz, dit gaz B pour bas PCS, est compris entre 9,5 à 10,5 kWh/m³, alors que le PCS du gaz H, pour haut PCS et distribué quant à lui dans le reste de la France, varie de 10,7 à 12,8 kWh/m³. Pour des raisons de fermeture programmée du gisement de Groningue, le gaz H est en cours de remplacement du gaz B dans la région, une modification qui se réalise d’Ouest en Est depuis 2017 et jusqu’en 2029. En attendant la permutation du secteur d’Arras en gaz H, Artois Méthagri produit actuellement un gaz B, à 90,5 % de méthane, au lieu des 97 % en gaz H.

Torchère et silo à ensilage chez Artois Méthagri, photo Frédéric Douard

L’injection a lieu dans le réseau GRDF avec raccordement à la Communauté Urbaine d’Arras à deux kilomètres, ce qui ouvre un débouché sans limite d’injection. La maintenance de l’installation de purification est réalisée par ServiceUnion.

Contacts :

  • Artois Méthagri : Samuel Degeuser – 06 07 45 58 99 et Guillaume Degraeve – 06 72 58 69 23
  • Méthanisation et épuration : 02 54 56 18 57 – info@agrikomp.fr – www.agrikomp.com/fr/
  • Maintenance épuration : ServiceUnion – 
02 45 94 00 16 – service@serviceunion.fr
  • Cuves béton : www.bio-dynamics.be/fr/
  • Suivi biologique : +32 92 62 04 00
 – info@innolabfrance.fr – www.innolab.be/fr

Frédéric Douard en reportage à Monchy-le-Preux


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