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Le granulé de bois et l’agriculture, les deux piliers de la coopérative Grasasa en Dordogne

Article paru dans le Bioénergie International n°38 de août-septembre 2015

La coopérative Grasasa à Sainte Sabine en Dordogne, photo Grasasa

Grasasa est un groupe coopératif agricole d’une centaine d’agriculteurs basé à Sainte-Sabine en Périgord : une entreprise 100% locale. Depuis plus de 40 ans, elle déshydrate et granule des fourrages et du bois en harmonie avec son territoire et en répondant aux principes du développement durable. La luzerne est une culture écologique : produite sans engrais azoté, elle améliore la qualité des sols et de l’eau qui ruisselle. C’est aussi une plante riche en protéines et en oméga 3. Le bois, brûlé pour la sécher est issu des forêts locales. Sa combustion contribue à la valorisation des sous produits ligneux et à l’amélioration de la forêt. Le bois est aussi l’élément de base pour la fabrication de granulés combustibles vendus localement. L’activité de la coopérative contribue clairement à économiser l’énergie fossile et donc à limiter le réchauffement planétaire.

Un peu d’histoire

La coopérative est créée en 1969 par une quinzaine d’agriculteurs de Sainte Sabine pour produire collectivement une unité de déshydratation de fourrages afin de mieux nourrir leurs troupeaux, notamment grâce à l’apport protéique de la luzerne, ceci évitant d’importer du soja.

L’usine Grasasa à Sainte Sabine en Dordogne, photo Grasasa

En 1981, suite aux deux premiers chocs pétroliers, le déshydrateur abandonne le fioul lourd comme source d’énergie pour la sciure de bois. Pour ce faire, un four à biomasse est créé de toute pièce par les adhérents. Dès l’année suivante, convaincus des avantages offerts par l’énergie bois, les adhérents-éleveurs transposent le principe pour leurs besoins domestiques et agricoles : des chaudières à granulés sont mises au point par quelques adhérents et les premiers granulés de bois sont fabriqués à Sainte-Sabine en 1982.

En 2002, sous l’impulsion des adhérents qui trouvent que l’usine est sous-utilisée, Grasasa se modernise et s’ouvre à de nouveaux produits comme les sous-produits agro-industriels. En 2003, une gamme de produits déshydratés certifiés Agriculture Biologique est lancée : elle permet de sécuriser la rotation sur les exploitations bio de la zone et répond à la forte demande en protéines non OGM bio.

Alain Baris devant l’ensacheuse papier, photo Frédéric Douard

Puis en 2005, comme partout en France et en Europe, c’est l’envol du granulé de bois. Plus de 20 ans après les premières fabrications, le granulé de bois occupe depuis 2011 la première place dans l’activité de Grasasa avec les 2/3 du chiffre d’affaire (4 M€) : de 400 tonnes en 2004, la production est montée à 18 000 tonnes en 2014. À côté de cela la coopération produit également 8000 tonnes de granulés de luzerne dont 50% en bio.

En 2009, engagée dans une démarche qualité-sécurité environnement, Grasasa devient le premier producteur du Sud-Ouest de la France à obtenir la certification NF Granulés Biocombustibles Bois Haute Performance, confortant ainsi le développement de cette activité. En 2015, Grasasa obtiendra également la double certification NF et ENPlus A1 .

En 2014, la diversification se poursuit avec l’installation d’un séchoir à bottes permettant de produire du foin de luzerne séché artificiellement, avec un brûleur à granulé bien entendu ! Cet investissement répond aux besoins des éleveurs en fibres de qualité.

Une gestion pérenne, ancrée dans le territoire

Aujourd’hui, la coopérative est propriété d’une centaine d’agriculteurs producteurs de luzerne. Depuis quarante ans, ils ont, par leurs apports de capital social, contribué aux actifs. Pas de risques donc de voir les actionnaires sacrifier l’outil à des fins de profits immédiats. Les bons résultats financiers sont toujours équitablement répartis entre modernisation, sociétaires et salariés…

Par ailleurs, l’une des particularités de la coopérative est qu’elle est petite et très loin des grands foyers coopératifs luzerniers (Champagne, Beauce). Cet isolement, bénéfique en terme de marché, a aussi placé Grasasa loin de la plupart des opérateurs techniques. Ceci l’a obligée à assurer par elle-même la majorité des travaux et interventions de mécanique agricole et autres, sur ses machines de récolte et sur son outil industriel. La coopérative a ainsi mis en place un important atelier de mécanique et une équipe de techniciens compétents qu’elle valorise bien sûr d’abord pour elle-même, mais aussi auprès de ses adhérents et des coopératives locales d’utilisation de matériel agricole, les CUMA, dont une CUMA bois-énergie plaquettes, par la vente de prestations mais aussi par le partage de salariés au sein d’un groupement d’employeurs.

L’équipe est actuellement constituée de 28 salariés, dont 1 commercial, 4 agents de maîtrise et 3 ingénieurs spécialisés pour l’encadrement. Dans cette région rurale, les ressources humaines sont le nerf de la guerre et cela fait partie des préoccupations quotidiennes des encadrants. Quinze ans auparavant, les adhérents assuraient eux-mêmes l’encadrement et la gestion, mais après un audit de gestion en 2000, le conseil d’administration a remisé cette organisation au profit d’une gestion professionnelle étoffée et de bon niveau.

Thierry Guérin, président de la coopérative, photo Grasasa

Depuis 2002, l’actuel président, Thierry Guérin a même mis en place un accord d’entreprise avec intéressement des salariés pour fidéliser les compétences et redynamiser l’activité. Et le résultat de ce changement de gestion, c’est depuis 10 ans, une perpétuelle recherche de diversification, de nouveaux marchés et une amélioration de la production.

La production

Le processus de granulation chez Grasasa

Le séchage 

Le séchage des matières à granuler se fait derrière le brûleur à sciure auto-construit dont nous avons déjà parlé dans un sécheur rotatif à trois passages Maguin de 10 000 litres d’évaporation à l’heure.

L’intérieur du séchoir à balles AgriCompact, photo Frédéric Douard

Celui des balles de luzerne, un équipement proposé par AgriCompact Technologies déjà évoqué également se fait dans un bâtiment couvert avec un sol à double fond et à lumières. Alimenté en air chaud par un brûleur à granulés Natural Fire de 500 kW, il permet le séchage de balles de foins pré-fanées en 24 à 36 heures.

Le brûleur à granulés Natural Fire sur le séchoir à balles, photo Frédéric Douard

La granulation

Historiquement les granulés étaient produits à partir de sciure de feuillus en majorité, chêne et châtaignier, comme c’était le cas dans beaucoup d’endroits en France dans les années 80 et 90. Actuellement, la sciure collectée est à 85% résineuse et à 15% feuillue. C’est ainsi plus de 32 kt qui sont actuellement achetées à l’année, dont 4000 tonnes utilisées en combustion.

Livraison de sciure chez Grasasa, photo Frédéric Douard

Depuis 2014, afin d’accompagner la croissance, la coopérative a commencé à acheter, faire déchiqueter, stocker et utiliser du bois rond, notamment du taillis de châtaignier, dépérissant dans la région. Celui-ci est prioritairement consommé comme combustible et le sera comme matière première quand le besoin s’en fera sentir ; à ce moment-là, il faudra une écorceuse à la coopérative.

Stock de bois rond chez Grasasa, photo Frédéric Douard

Le prix de revient du bois rond (60€/t en rond et 75€/t en plaquettes) n’est pas meilleur que celui de la sciure mais cela ouvre une perspective de ressource très abondante et donc de stabilité des prix d’approvisionnement, la principale difficulté étant de financer des stocks parfois avec plus d’un an d’avance, alors que la sciure arrive en flux tendu. Mais la ressource française en bois étant aux deux tiers feuillue, la montée en puissance du marché du granulé fera inévitablement rebasculer les approvisionnements vers le feuillu, ce qui ne pose techniquement aucun souci de qualité pour les granulés.

L’équipe technique autour d’une presse Promill, photo Grasasa

La granulation est assurée, derrière un affineur Promill, par deux presses Promill de 4 tonnes/heure. Une troisième presse Promill d’occasion en cours d’installation doit permettre d’accroître de 50% la capacité de production avec si possible pas plus de charges. Les objectifs de production sont ainsi de 40 kt en 2020 et 60 kt en 2030, la capacité du sécheur actuel le permettant.

Cette augmentation de capacité était devenue indispensable car depuis 10 ans, la production courait derrière la demande, ce qui n’est pas du plus confortable vis à vis du marché. L’objectif est donc de reprendre la main sur l’offre. L’acquisition de la troisième presse donnera également plus de souplesse quant aux changements de production et aux phases de maintenance.

Le stockage

Le marché de l’énergie étant tributaire de la météo, il est imprévisible. Il faut donc toujours avoir trop en stock pour avoir assez en cas de forte demande. Parallèlement, Grasasa souhaitant accroître sa production, cela signifie également du stockage supplémentaire en évolution permanente.

Silo vertical à granulés chez Grasasa, photo Frédéric Douard

La capacité de stockage de granulés en 2014, constituée de deux halls couverts à plat et douze silos-tours en métal, était de 13 000 tonnes, soit 60% de la production. Elle doit désormais croître pour suivre la croissance de la production. La coopérative, qui a investi durant 10 ans plus de 300 k€ par an, a augmenté ce rythme depuis 4 ans à hauteur de 500 k€ par an, puis à hauteur de 650 k€ en 2015, et notamment en capacité de stockage. Un silo-tour supplémentaire de 1000 tonnes a d’ailleurs été construit cet été 2015.

Sac de granulés de bois Grasasa

Citons enfin, en matière de stockage, une particularité locale liée au climat qui peut être très chaud dans la région. Lors de la production d’été, par forte chaleur, 30 jours par an en moyenne, le granulé arrive encore chaud vers les silos, jusqu’à 40°C voire plus, car l’air des refroidisseurs est à cette température. Depuis 8 ans, pour éviter des montées en température dangereuses dans les silos et les risques d’auto-combustion, la coopérative a du mettre en place une tour de refroidissement forcé avec un groupe froid apportant de l’air à 8°C pendant 1h30, un système relativement complexe avec réchauffage intermédiaire des granulés pour éviter le point de rosée.

L’ensachage et la fourniture de vrac 

La coopérative est historiquement ensacheur depuis 25 ans. Équipée de matériel d’ensachage et de palettisation local, fabriqué en Dordogne par Eurotech Packaging, elle est toujours restée fidèle à une sacherie papier et ce ne sont pas ses prérogatives environnementales qui la feront changer d’avis.

Concernant le vrac, l’obsession de Grasasa est de livrer à ses clients du granulé tel que certifié par la NF puis En+, à savoir un produit à moins de 1 % de fines. La coopérative a ainsi mis en place un triple tamisage au départ du vrac afin d’être, tout au moins au chargement, bien en deçà des obligations. Entre le silo de stockage et le camion, le granulé passe ainsi sur un crible vibrant et un crible statique aspirant.

L’atelier de mécanique et d’innovation

Nous en parlions en début d’article, l’atelier est un

élément central de l’entreprise. Grasasa a su y créer et y motiver une équipe pleine de compétences et d’ingéniosité, des qualités indispensables à une petite structure qui ne dispose pas toujours de toutes les capacités d’investissement dont elle pourrait rêver.

Innovation, système d’échantillonnage sous le boisseau de livraison du vrac, photo Frédéric Douard

La maintenance, la construction (cf le four), la réparation, l’adaptation de matériel d’occasion mais aussi l’innovation sont au menu quotidien de l’atelier. Après une première étape consistant à rectifier les galets , depuis 2014 d’autres évolutions techniques menées en interne par l’équipe technique ont montré que la durée de vie de ces galets peut être significativement augmentée ( passage de la durée de vie du galet de 500 h à 2500 heures ) – un brevet a d’ailleurs été déposé en ce sens. D’autres améliorations ont également abouti récemment ( suppression de la graisse dans les galets).

Autres innovations, un système d’échantillonnage sous le boisseau de livraison du vrac ou encore un tamiseur statique aspirant les fines avant la presse et permettant de réduire le taux de fines dans le granulé, il vient d’être adapté en plus grand pour le boisseau de chargement des camions de vrac et permet de tamiser jusque 200 tonnes par jour en 2 x 8h. Citons enfin un accélérateur-broyeur en entrée de presses qui réduit les dernières grosses particules.

Le marché

Située très longtemps géographiquement à l’écart de ses

Camion souffleur pour la distribution en vrac, en 2020, photo Grasasa

concurrents, Grasasa en a tiré une position stratégique sur le marché régional. Les produits en sacs, bois ou luzerne, sont disponibles dans les magasins agricoles de la région. Quant au vrac, il est distribué par une douzaine de distributeurs partenaires équipés de camions souffleurs. Par contre, ce qui est atypique dans le marché de Grasasa, c’est l’inversion des proportions entre sacs et vrac, habituellement majoritairement en sacs, ici les 2/3 des volumes sont vendus en vrac.

Ajoutons que concernant le bois, c’est jusqu’ici clairement les distributeurs qui ont assuré le développement, la coopérative assumant en production le rythme endiablé de ces dernières années. Les nouvelles dispositions devraient rééquilibrer les rôles notamment avec la montée en puissance des chaufferies collectives à granulés, qui avec un temps de retard sur le chauffage domestique, connaissent désormais une croissance soutenue. Notons également que des chaufferies à bois déchiqueté de grandes tailles commencent également à choisir le granulé pour alimenter leur(s) chaudière(s) d’appoint et secours en lieu et place du gaz ou du fioul, comme c’est le cas à la chaufferie du Gour-de-l’Arche à Périgueux.

Le palettiseur de sacs chez Grasasa, photo Frédéric Douard

Nous conclurons en soulignant que le bois-énergie a, outre permis à la déshydratation de travailler toute l’année, mais a surtout depuis 10 ans clairement remis du carburant dans la coopérative en lui redonnant des perspectives et des moyens pour investir, se développer et embaucher.

Contacts :

Frédéric Douard, en reportage à Sainte-Sabine

Voir également cette vidéo récente : 



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