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L’énergie du bois produite à la ferme pour chauffer les habitants d’un village

La centrale de chauffage à la ferme de Wittenwil, photo Christoph Rutschmann

Heureux sont ceux parmi les habitants de Wittenwil, dans le canton suisse de Thurgovie, qui raccordent leur propriété au réseau de chaleur de Walter Ammann. En effet, celui-ci leur fournit une énergie sûre à prix stable, produite à partir de plaquettes forestières d’origine garantie «Wittenwil et environs». Mais Walter Ammann a diversifié son offre, notamment en proposant des plaquettes de bois de cerisier destinées à aromatiser les grillades.

A la question de savoir ce qui le motive, Walter Ammann pétille d’énergie et répond avec vivacité :

« Un agriculteur a le choix entre la commercialisation de ses produits sur les sentiers battus et la réalisation de ses propres idées. Je me suis engagé sur la seconde voie, par exemple en décidant en 2008 de mettre en place un réseau de chaleur fonctionnant au bois-énergie pour notre village et en commençant par y raccorder la propriété de nos voisins. Mon idée a bien pris. La même année, j’ai donc effectué un sondage au village pour savoir si les habitants voulaient bien raccorder leurs propriétés à un réseau de chaleur à plaquettes local.»

A l’époque, le mazout était très bon marché, et généralement, les gens ne planifient que sur le court terme en gardant l’œil sur leur porte-monnaie. Quelques rares propriétaires avaient annoncé leur intérêt, ce qui ne suffisait pas pour obtenir une exploitation rentable du réseau de chaleur. L’agriculteur entreprenant a donc mis son projet en attente. En 2010, le château de Wittenwil, une propriété imposante affichant une consommation d’énergie importante, a été vendu à un nouveau propriétaire qui se montrait très intéressé par la fourniture d’une énergie respectueuse du climat. C’est son intérêt qui a motivé Walter Ammann à réaliser une nouvelle enquête auprès des villageois.

«Si on est convaincu d’une bonne idée, on doit faire preuve de courage et d’une certaine ténacité», se souvient Walter Ammann en souriant… et les événements lui ont donné raison.

Que signifie «intéressé»?

En 2010, les parties intéressées au réseau de chaleur étaient beaucoup plus nombreuses. Mais que signifie «intéressé»? Dans les projets de réseau de chaleur, l’implication d’une partie intéressée commence fréquemment par la signature d’une déclaration d’intention. L’ensemble de celles-ci pose ensuite la base des planifications et des calculs de rentabilité initiaux. Comme elles ne sont pas contraignantes, ces déclarations recèlent le risque que les signataires se désistent au dernier moment et refusent de raccorder leur propriété au réseau, par exemple lorsque le mazout ou le gaz sont vendus à très bas prix. Souvent calculé au plus juste, un projet peut en être affecté, car moins d’énergie vendue par mètre courant de réseau de chaleur signifie une plus faible rentabilité.

«Pour éviter de prendre un mauvais départ sur le plan économique, j’étais obligé de trouver une autre solution», raconte Walter Ammann. Il est important d’atteindre d’emblée un niveau d’utilisation suffisant, c’est-à-dire assez de consommateurs pour garantir une exploitation économiquement viable dès la mise en service. L’agriculteur a eu l’idée de proposer à ses prospects une offre de lancement attrayante limitée dans le temps. «J’ai offert aux gens un prix de l’énergie un peu plus avantageux s’ils acceptaient de raccorder leurs bâtiments au réseau de chaleur dans l’espace de deux ans après sa réalisation.» Pour Walter Ammann, cette «première majorité» sont des «clients A» qui profitent d’un prix de l’énergie attractif.

Quant aux consommateurs qui décident de participer après ce délai, il les appelle des «clients B». L’évolution récente, soit la forte hausse du prix du mazout et du gaz, a également rendu l’offre aux «clients B» intéressante. Le réseau de Walter Ammann suscite donc une demande qui augmente continuellement. «Les gens sont conscients du prix», confirme l’agriculteur. Au lieu de répercuter le prix volatil des énergies fossiles polluantes, qui a explosé ces derniers mois, son modèle est couplé à l’index suisse des prix à la consommation, ce qui augmente la sécurité et évite les sauts de prix problématiques.

Des filtres à particules financés par la subvention cantonale

Walter Ammann se montre prudemment positif pour répondre à la question du soutien cantonal qu’il a obtenu pour réaliser son projet. «Les contributions n’ont pas exercé une influence majeure sur la rentabilité et n’ont donc pas significativement réduit le prix de l’énergie livrée», décrit-il la situation. Cependant, les subventions lui ont permis, en 2011, de mettre en place l’un des premiers systèmes de filtrage pour réduire les émissions de fines à l’aide d’un dispositif électrostatique avec laveur humide. «A l’époque, c’était un projet particulièrement innovant», précise Walter Ammann.

L’une des deux chaudières à plaquettes avec son filtre à particules Oekosolve, photo Christoph Rutschmann

La vente de chaleur ne suffit pas pour vivre

Si le réseau de chaleur de Walter Ammann est un pilier important de son activité, il ne suffit certainement pas pour faire vivre sa famille, car la rentabilité est calculée au plus juste. L’agriculteur s’est donc spécialisé dans d’autres prestations de service. Avec son épouse Doris, il se charge du nettoyage des routes et de l’entretien des bordures dans près de dix communes depuis de nombreuses années. Après avoir vendu le contingent laitier de son exploitation à un autre agriculteur, il cultive des céréales et des légumes. En outre, les six hectares de forêt qu’il possède lui apportent une partie du bois-énergie pour le réseau de chaleur. Afin de garantir le réapprovisionnement en bois-énergie en cas de pénuries éventuelles, il cultive des essences à croissance rapide sur environ un demi-hectare de terrain. «Cette réserve est plutôt symbolique», explique Walter Ammann en souriant. «Jusqu’ici, nous avons toujours réussi à récolter suffisamment de bois.»

Des plaquettes et pellets d’arbres fruitiers parfumés à l’ail ou au romarin pour les grillades, photo Christoph Rutschmann

Son innovation la plus récente est une réponse à la tendance actuelle des grillades haut de gamme. Pour conférer aux grillades leur saveur typique et délicieuse même sur un barbecue à gaz, on peut les affiner en utilisant la fumée de plaquettes ou de granulés de bois de pommier, de poirier ou de cerisier, en y ajoutant le parfum d’ail ou de romarin si on le souhaite. Cette fumée est très facile à produire: il suffit de mettre quelques morceaux d’essences de bois mentionnées dans une boîte métallique spécialement trouée que l’on dépose dans le barbecue fermé. La fumée qui s’en dégage confère un parfum délicieux aux grillades. Les ventes de ces plaquettes ou pellets à fumer affichent une évolution positive, mais l’activité est toute récente et Walter Ammann est encore à la recherche de distributeurs partenaires.

Tout compte fait, l’entrepreneur se déclare satisfait. «Je ne m’ennuie jamais. J’ai du mal à m’imaginer un métier plus varié et plus intéressant.»

Trois questions posées à Walter Ammann
Vous êtes propriétaire forestier. Selon vous, l’assortiment de bois-énergie est-il important pour la gestion des forêts ?

Walter Ammann, un fort engagement en faveur du bois-énergie, photo Christoph Rutschmann

Je possède près de six hectares de forêt. Le bois-énergie joue un rôle essentiel pour l’exploitation d’une surface de cette taille. Pour mon bois, j’opère uniquement la distinction entre les «cervelats» et les «filets». Je ne livre que les plus beaux troncs à la scierie pour fabriquer des planches. Il y a longtemps que les assortiments de qualité moyenne ne se rentabilisent plus. Sans le bois-énergie, la gestion forestière ne vaudrait plus la peine.

Vous exploitez un réseau de chaleur. Comment avez-vous réussi à convaincre les propriétaires immobiliers de s’y raccorder ?

Il faut attendre le moment propice pour saisir sa chance. Pour nous, c’était certainement le jour où le nouveau propriétaire du château a déclaré s’intéresser à la chaleur issue du bois. En même temps, notre modèle qui distingue entre les clients A et B joue un rôle important. Les clients A ont raccordé leurs immeubles à notre réseau de chaleur dans l’espace de deux ans et profitent d’un meilleur prix de l’énergie. Les consommateurs qui se sont raccordés plus tard paient l’énergie un peu plus cher mais sont également très importants pour la rentabilité totale du réseau.

Un bon nombre d’entreprises agricoles dispose de conditions cadres similaires. Quels conseils pouvez-vous leur prodiguer pour la réalisation d’un tel projet ?

Dans les villages, tout le monde se connaît. Pour réussir, on doit être convaincu de l’utilité de son projet et bien connaître le sujet. De plus, il faut être honnête, présenter les informations et spécifications du projet de manière ouverte et crédible et – facteur non négligeable – montrer l’exemple. C’est ce que nous avons fait en 2008 avec nos voisins immédiats.

Le silo de combustible, photo Christoph Rutschmann

Spécifications techniques de la centrale de Wittenwil
Propriétaire et opérateur Oekotech AG, Walter et Doris Ammann
Fabricant des chaudières et années d’installation Sommerauer, 2011 et 2014
Puissance calorifique nominale 250 kW pour chacune des deux chaudières
Plage de fonctionnement De 70 à 245 kW pour chaque chaudière
Consommation annuelle de combustible 1000 à 1200 m3 de plaquettes
Production d’énergie annuelle 850 à 1000 MWh
Combustible Plaquettes issues de la forêt et de l’entretien et du paysage
Provenances du combustible Wittenwil et communes environnantes ; propre forêt et celles d’autres propriétaires forestiers privés
Humidité du combustible 25% en moyenne
Silos à combustible Silo 1 de 30 m3 et silo 2 de 45 m3 nets, capacité de trois jours à plein régime
Substitution d’énergies fossiles 100 à 130 m3 d’équivalent mazout/an
Réduction de CO2 220 à 1250 tonnes/an
Accumulateur pour réduire les pics de consommation 8000 l, extension à 12 000 l prévue
Traitement des gaz Deux séparateurs électrostatiques Oekosolve
Chaudière à mazout Appoint : consommation de 200 à 300 l/an
Part de gaz/mazout à la production d’énergie Inférieure à 1%
Potentiel Entre 10 et 15 bâtiments supplémentaires

Auteur : Christoph Rutschmann – info@holzenergie.ch

1 réponse
  1. RETOUR D’EXPERIENCE : Merci pour ce reportage correspondant à mes études et réflexions personnelles. Pour comparer avec nos coûts Français COMME PROPRIETAIRE FORESTIER connaissez vous votre coût de production d’une tonne de B.E PLAQUETTES rendu silo en AUTO CONSOMMATION ?
    A fin Octobre 2021 j’étais à 70,56 € TTC LA TONNE pour un combustible Douglas séché en billons de Fin Mars à Fin Octobre avec mise en silo de 100 m3 à 25 % d’humidité ; Grâce à une sous toiture Danpalon naturellement ventilé ce 9 Mars les 20 m3 restant en fond de silo sont à environ 16% donc a plus de 4000 kWh par tonne. (Silo contenant 1 an de consommation d’une LINDNER SOMMERAUER DE 65 KW)
    Contrôlé hier 09 03 2022 à environ 16%
    grindesel.forumactif.fr (Forum personnel)

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