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Mensonge d’État : les énergies renouvelables sont fatalement intermittentes !

Editorial du Bioénergie International n°76 de décembre 2021

La production d’énergies à partir de la biomasse, la première des énergies renouvelables, est totalement pilotable, photo Frédéric Douard

En février 2020, je m’insurgeais déjà sur le fait que la plupart des Français se complaisent à croire que les énergies renouvelables seraient toutes intermittentes. Or, cette réalité ne concerne que l’électricité éolienne et solaire qui ne représentent que 15 % des énergies renouvelables et 1,5 % de l’énergie consommée en France. La réalité, c’est surtout que les trois quarts des énergies renouvelables produites en France sont stockables et pilotables : le bois, l’hydraulique de retenues, les biocarburants, le biogaz, la géothermie ou encore les déchets renouvelables non recyclables.

Le problème de l’intermittence ne concerne donc que l’électricité, qui ne représente que le quart de la consommation énergétique des Français, et même moins de 15 % des usages non thermiques. Donc ce problème est circonscrit à une partie modeste des besoins et devrait être facile à gérer tant que les consommations restent raisonnables, c’est-à-dire tant qu’on ne s’emploie pas à en faire frénétiquement usage dans tous les domaines possibles et imaginables.

Une chose est sûre en France, l’Establishment entretient depuis des années cette croyance dans l’intermittence fatale des renouvelables pour vendre l’idée du renouvellement inéluctable du parc nucléaire. Le 12 octobre 2021, Thomas Gassilloud, député LREM du Rhône, déclarait ainsi avec aplomb sur France Inter que le nucléaire était la seule énergie décarbonée pilotable. Quelle manipulation insupportable de l’opinion publique alors que les chiffres mêmes de l’administration française de l’énergie montrent que les énergies renouvelables en France sont stockables et pilotables à 75 % !

Production française d’énergies renouvelables en France en 2019 en % sur un total de 320 TWh, pilotable à 75%, source SDES

Pour éviter les problèmes d’indisponibilité du photovoltaïque et de l’éolien, comme observé cet été 2021 sur certains réseaux électriques européens, il faut prévoir des capacités équivalentes assurées par de l’électricité renouvelable pilotable, avec de l’hydraulique et de la biomasse solide, liquide ou gazeuse. Dans les pays où la production d’électricité à partir de biomasse est importante, il n’y a pas eu ces problèmes.

Les projections à 2030 ou à 2050 de la consommation d’énergie renouvelable en Europe, montrent que la biomasse est et restera la première source d’énergie renouvelable. Pourtant, ces dernières années, le gouvernement français a mis fin à tous les projets de cogénération au bois, n’a pas encouragé le recours aux biocarburants et a commencé à freiner le développement du biogaz. On ne se demande plus pourquoi.

Pousser ainsi à tous crins le vecteur électrique, alors qu’il est si difficile à stocker, est un mauvais calcul. Cela va engendrer des besoins de stockage extrêmement coûteux, peu performants énergétiquement, voire polluants et conflictuels pour ce qui est des matières premières.

Pour les applications chaleur, il est bien plus intéressant économiquement et écologiquement parlant, d’utiliser la biomasse, largement disponible. Pour les applications électriques, il faut porter les efforts sur des équipements pilotables et complémentaires aux intermittents. Il faut produire de l’électricité partout où l’on a besoin de chaleur, avec des centrales de cogénération modulantes à biomasses.

La mobilité au bioGNV ou aux biocarburants est totalement pilotable, photo Frédéric Douard

Mais là où l’électrification à marche forcée est la plus scandaleuse, c’est sur la mobilité. Tout est présenté pour faire croire que la motorisation thermique est morte et que le salut ne se trouve que dans les batteries, et ce malgré tous les problèmes de rendement de charge, de matières premières, de recyclage et d’accroissement des besoins électriques que cela induit. Or la solution de décarbonation ne doit pas être monolithique. À côté de l’électrique, des solutions efficaces de mobilité décarbonée, renouvelable et stockable existent déjà avec les biocarburants et le bioGNV. Qu’attend-on pour les développer ? Les infrastructures de transport et de stockage existent déjà, les motorisations aussi, il ne reste qu’à encourager les filières concernées à produire et à organiser la distribution de détail. Et pour les biocarburants si souvent critiqués, au lieu de les proscrire, il faudrait plutôt exiger qu’ils soient produits avec des moyens décarbonés pour en améliorer le bilan et il faudrait ne les produire qu’avec des matières premières nationales, ce qui éviterait la déforestation mondiale.

Frédéric Douard, rédacteur en chef


1 réponse
  1. RAVIX dit :

    Bonjour,
    bon recadrage par rapport à l’attitude déprimante des Autorités à l’égard des ENR.
    Par contre, j’apporte un bémol en ce qui concerne l’usage de certains combustibles dans le transport, comme le bioGNV (ou bio-méthane) qui génèrent aussi leur pollution induite (https://www.transportenvironment.org/wp-content/uploads/2021/09/202109_TE_LNG_trucks_a_dead_end_bridge_final.pdf), alors que ça ne pose aucun problème dans une chaudière.
    Il faut donc avoir conscience que certains combustibles doivent être appliqués uniquement dans certains cas (on ne remettra plus de la plaquette forestière dans un réservoir auto !)