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Jean François Bontoux, l’homme qui reconnut sa noblesse au bois-énergie

Jean François Bontoux lors du salon BOIS ENERGIE 2000 à Lons-le-Saunier, photo ITEBE

Editorial du Bioénergie International n°66 de juin 2020

Jean François BONTOUX, personnalité de la filière bois française, président de l’Institut Technique Européen du Bois-énergie de 1999 à 2003, est décédé le 27 février 2020 à l’âge de 86 ans, juste avant le déclenchement de la crise du coronavirus en France.

Né dans une famille de scieurs et producteurs de parquet du département de la Marne, diplômé de l’Ecole des Hautes Etudes Commerciales, il a été successivement contrôleur de gestion à la Banque d’Indochine, directeur général de l’entreprise familiale, puis durant près de vingt années directeur de Vitry-Habitat, un organisme privé de logement social situé à Vitry-le-François, au sein duquel par ses actes il a promu le matériau en lequel il croyait intimement : le bois.

Au sein de Vitry-Habitat, il a tout d’abord mis en place le premier réseau de chaleur urbain au bois de France en 1984, pour faire baisser les charges locatives liées aux énergies fossiles. Puis, il a fait de Vitry Habitat le premier organisme HLM à faire construire par centaines des habitations sociales tout en bois, des maisons groupées, des équipements publics et même en 1998 le premier immeuble bois R+4 construit depuis fort longtemps en France. Ces deux actions, il les a menées pour une somme de raisons que nous comprenons aujourd’hui très bien – un matériau naturel, local, renouvelable, stockeur de carbone et aussi économique – mais qui à l’époque pouvaient sembler fortement saugrenues à ses contemporains  !

C’est au titre de ces avantages universels du bois que très tôt il considèrera, à contre-courant de l’esprit de son époque, que la valorisation énergétique du bois pouvait aussi, comme les autres usages du bois, représenter un atout, une richesse et un avenir pour une région, un pays et pour toute la planète. On retiendra bien sûr que ce ne sont pas les mêmes qualités de bois qui sont requises pour les usages matière ou énergie, néanmoins il est important de considérer de manière égale toutes les qualités co-existantes et indissociables du bois, afin que l’ensemble de la filière fonctionne bien. Car cela semble aujourd’hui évident, après cinq décennies d’éducation, que la valorisation du bois-énergie est une composante indispensable de la production de bois d’oeuvre ; cependant jusqu’à la fin du vingtième siècle, la bien pensance forestière voulait que ne s’abaissât pas à évoquer les usages énergétiques du bois comme des choses sérieuses, mais plutôt comme relevant de la plus grande vilénie et devant être cachés et même combattus, tant seuls les usages matière pouvaient être nobles. C’est à mes yeux à cette évolution mentale forte que la contribution de Jean François Bontoux me semble la plus significative : il a contribué, non pas à rendre, mais à construire sa noblesse au bois utilisé pour la production d’énergie, cette énergie longtemps considérée comme triviale car surabondante, et qui démontre aujourd’hui toute sa nécessité pour le large bien-être de l’humanité. Je voudrais aussi rapporter, en parallèle de cette reconnaissance, un propos que Jean François Bontoux a aimé tenir, bien avant tout le monde et à de nombreuse occasions : « il est bien plus intelligent de se chauffer avec du bois, qui sans cela serait perdu, que de brûler stupidement du pétrole alors que cette ressource est limitée et même irremplaçable pour bien d’autres applications ».

Mais Jean François Bontoux, c’était bien plus que le bois-énergie, membre émérite de l’Académie de l’Agriculture, président de l’association Française des Eaux et Forêts, président de Francîlbois et j’en passe beaucoup… tout sa vie il a endossé les engagements et les responsabilités pour le bien commun.

Jean François Bontoux saluant Yves Cochet, alors ministre de l’environnement, après l’inauguration du salon BOIS ENERGIE 2001 à Mulhouse, photo ITEBE

Enfin, je dirais que Jean-François Bontoux était un homme agréable, ouvert, pragmatique, engagé, posé, uniquement constructif et très professionnel. Il repose aujourd’hui à Saint-Amand-sur-Fion, son village d’origine dans la Marne, un village bâti de maisons centenaires à colombages de chêne… le paradis.

Frédéric Douard, ex-directeur de l’Institut Technique Européen du Bois-énergie

Pour en savoir plus sur Jean François Bontoux et le bois-énergie :