La diversité ne pourrait-elle pas nous aider à bâtir un système énergétique juste et résilient ?
Editorial du Bioénergie International n°85 de juin 2023
Au 21e siècle, tout le monde est écologiste et utilise le mot magique de biodiversité à tout bout de champ, comme un laissez-passer vers la bonne conscience ou vers le politiquement correct. Seulement, chacun sait-il à quoi ce mot fait-il référence et pourquoi il est si important ? Il signifie la diversité du vivant, avec son nombre incalculable des formes de vie. Les sciences de l’évolution ont montré que c’est la diversité qui est garante de la résilience du vivant, qui lui donne toutes les chances de rebondir en cas d’adversité. La diversité est donc un moteur naturel de résilience. Qui sait regarder le vivant peut le constater tous les jours, c’est une loi de base de la nature. Par extension, on peut aussi constater que la diversité est aussi indispensable à la continuité du vivant qu’à la bonne santé d’une civilisation et même de toutes ses activités. La diversité des ressources, des individus et des pratiques conduit à réduire les risques et à trouver plus facilement des solutions aux problèmes. Cela s’applique également en matière d’énergie : un modèle énergétique sera d’autant plus résilient au changement climatique, aux catastrophes naturelles et à l’inconséquence des humains, qu’il sera divers en technologies et en sites de production. Plus le mix sera varié, plus le nombre de producteurs sera grand, plus la production sera décentralisée et démocratisée, plus le modèle sera juste et solide, il générera moins de déséquilibres, répartira les tensions sur un nombre considérablement plus élevé d’acteurs, ce qui favorisera la paix.
Pourtant, la plupart des gens n’ont pas conscience de cela, trouvent cela très compliqué, et préfèrent la facilité, la simplicité, voire le simplisme, les solutions-miracles comme le tout bois-énergie qui a conduit à la quasi-disparition des forêts européennes à la fin du 18ᵉ siècle tellement on pensait les forêts infinies, comme le tout combustibles fossiles qui a conduit au réchauffement climatique que nous subissons aujourd’hui, ou encore le tout électrique*, un système idéal, rêvé par presque toute la classe politique française, ou tout le monde est interconnecté et interdépendant. Mais ce nouveau système qui serait capable de répondre à tous les besoins énergétiques, n’est-il pas encore une fois un mirage, et une erreur grave de stratégie par manque d’imagination ou de courage ? La politique énergétique qui se joue en ce moment en France, illustre-t-elle une partie de poker au moment d’un quitte ou double. Est-ce là un mode de gouvernance responsable que de jouer l’avenir d’un pays aux cartes ?
Car le tout électrique dont tout le monde se réjouit aujourd’hui, même s’il apporte indéniablement facilités, confort et performances dans la vie de tous les jours, a également un revers : un difficile accès aux ressources minières bien mal réparties sur le globe (terres rares, uranium), un bilan environnemental et social assez catastrophique pour les batteries, basé sur le même système qui a conduit au réchauffement climatique, à savoir une exploitation sans limite. Et de surcroît, le tout électrique, qui tel le jeune coucou tente aujourd’hui de pousser tous les autres en dehors du nid, est un système fragile, à la merci de nombreuses situations pouvant conduire au black-out. Comment en effet un système tout électrique tout seul pourrait-il survivre aux catastrophes naturelles qui seront engendrées par le dérèglement climatique, aux guerres, au terrorisme physique ou cyber, voire à un accident nucléaire ? Comment interviendront les pompiers, les ambulances, la police ou l’armée s’il n’y a plus d’électricité ?
Un adage paysan rappelle de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, c’est pourtant ce que la grande majorité du personnel politique français est en train de faire, et qu’il va formaliser très bientôt dans une nouvelle Programmation Pluriannuelle de l’Énergie, et qui engagera les générations futures. Le marché de l’énergie n’est-il pas assez grand pour tout le monde ? Pourquoi ne pas marier intelligemment les flux énergétiques de la terre, de la mer et du ciel, avec les ressources combustibles renouvelables solides, liquides et gazeuses, faciles à stocker et à embarquer ? La diversité des solutions énergétiques et des producteurs n’est-elle le moyen de réussir la transition vers un modèle énergétique varié, équilibré, juste et donc résilient ? Est-ce si difficile de faire cohabiter plusieurs pensées ?
Frédéric Douard
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C’est un article plein de bon sens.
Il mérite d’être lu par nos politiques de tous bords.
A notre petit niveau nous avons à FIbois 07 26 souvent donné notre avis dans ce sens , malgré notre préférence et notre implication dans le bois énergie .
Parlons nous une autre langue ?,sont ils si déconnectés de la vraie vie ou malheureusement sont ils de tous bords confondus guidés par des intérêts financiers allant à l’encontre de ce bon sens !!!!! .
Gardons espoir et multiplions ce type de témoignage !!!!.