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Weiss-France Energie & Verdo sur le marché des chaudières à CSR & OMR

Article paru dans le bioénergie International n°66 de juin 2020

La centrale de chauffage urbain de Tromsø au nord de la Norvége est équipé de chaudières Verdo, photo Frédéric Douard

Morten Grøn, responsable export de Verdo Energy et Sylvain Decurninge, directeur technique de Weiss-France Energie à Tromsø, photo Frédéric Douard

Dans le cadre d’une transition écologique globale, le tri et le recyclage poussé des matières premières présentes dans les ordures ménagères aboutit aujourd’hui à la production d’un reliquat de produits non valorisables comme matière première mais encore valorisable comme combustible : les combustibles solides de récupération. Constitués principalement de fibres végétales et de plastiques, ces CSR présentent un PCI élevé, plus important que celui des ordures ménagères et même que celui de la biomasse qui alimente les chaufferies industrielles et collectives.

Les installations de combustion de CSR ressemblent aux unités de valorisation énergétique des ordures ménagères du point de vue de la technologie, des contraintes réglementaires et des niveaux d’émissions autorisés. Des conceptions robustes sont nécessaires pour permettre une exploitation fiable et durable avec ce combustible qui, bien que préparé en amont, présente des contraintes fortes notamment en termes de corrosion, d’encrassement et de durée de vie du matériel. Néanmoins des solutions issues des technologies dédiées à la biomasse peuvent être apportées, permettant de simplifier l’exploitation et d’améliorer l’équilibre économique des projets. Dans les puissances moyennes, le constructeur danois Verdo Energy fait office de pionnier et propose déjà depuis plusieurs années une gamme déclinée en quatre tailles standardisées de 4 – 6,7 – 10 et 15 MW.

La grande histoire des chaudières Weiss

L’histoire des chaudières industrielles à bois Weiss commence après la première guerre mondiale à Dillenburg dans le Land de Hesse. Après quelques décennies d’évolution, la société en arrivera à proposer des chaudières à grille mobile à eau chaude, à vapeur ou à huile thermique dans une gamme de puissances comprise entre 500 kW et 25 MW. Durant près de 60 ans, elle construira et vendra ainsi plus de 1000 chaufferies complètes dans plus de 60 pays, du dessilage du bois à la cheminée. À la fin des années 80, Weiss Kessel-, Anlagen- und Maschinenbau GmbH en difficulté est rachetée par le danois Nordfab A/S, fabricant de systèmes d’aspiration et qui souhaitait se diversifier dans le domaine du chauffage à la biomasse, à cette époque du boom des énergies renouvelables au Danemark.

Chaudière Weiss-France de 4 W qui alimente le réseau de chaleur de Calais depuis 1999, photo F. Douard

En 1990, l’alsacien Bernard Cornelius représente Nordfab en France pour la vente de systèmes d’aspiration et de chaufferies à biomasse. Devant le succès rencontré par la vente de chaufferies, Nordfab A/S demande à Bernard Cornelius de créer une filiale en France. Ce dernier créera ainsi la société Nordfab France, en association avec Yves Rat, intégrant au passage les actifs du fabricant français de chaudières industrielles à bois Rat SA. Installée à Faverges en Haute-Savoie dans les anciens ateliers de Rat SA, et du fait de l’influence grandissante de l’activité chaudières biomasse, Nordfab France se transforme en Nordfab-Weiss puis en Weiss France, abandonnant l’activité ventilation. En 1995, Nordfab A/S est absorbé par le groupe danois de pétrochimie de taille mondiale A.P. Møller. La branche biomasse n’intéressant pas le nouveau propriétaire, celui-ci cède la filiale à Bernard Cornélius et Yves Rat qui devient une société à capitaux français. Après le départ en retraite des créateurs et depuis 2012, Weiss France Energie est une entreprise du groupe Roullier, groupe agro-industriel créé et basé à Saint-Malo en 1959.

Points d’ancrage des supports de grille d’une chaudière Weiss A/S, photo Frédéric Douard

Weiss A/S, successeur de l’activité chaudières de Nordfab A/S au Danemark, a fait faillite en 2017. La même année, une partie de ses salariés relance l’activité de conception et construction de chaufferies au sein de la société Verdo Energy Systems, filiale du groupe danois Verdo, société de services énergétiques aux collectivités et à l’industrie fondée en 1905. Les équipes Verdo affichent plus de 140 références en chaufferies à biomasse de 1 à 20 MW depuis 1986 dont 60 % hors du Danemark, et ce sur des combustibles variés : biomasse, paille, bois déchet et même ordures ménagères dès 2004. Pour être tout à fait complet, en janvier 2020, la structure Weiss A/S, qui a été maintenue avec pour vocation le service et la maintenance pour les chaufferies biomasse existantes, a été rachetée par le fabricant de chaudières bois danois Linka, sous l’appellation Weiss ApS.

Durant toutes ces années, si les pôles danois et français étaient globalement indépendants, ils ont toujours entretenu des relations commerciales et technologiques qui les ont maintenus en contact étroit. Aujourd’hui encore, c’est à l’occasion du décollage du nouveau marché de la combustion des CSR sur lequel Verdo s’est positionné très tôt, que les deux constructeurs de chaudières, Verdo et Weiss-France Energie, se rapprochent pour proposer une offre pour la combustion de CSR en moyenne puissance pour le marché français. Pour cela en 2019, Weiss-France Energie a signé un accord de partenariat avec Verdo Energy.

L’exemple de la chaufferie de Skattøra à Tromsø

L’un des deux grappins de la chaufferie de Skattøra, photo Frédéric Douard

Tromsø est la plus grande ville européenne au nord du cercle polaire. Située sur l’îlot d’un fjord norvégien à 300 kilomètres au nord du cercle arctique, la ville est un point d’observation célèbre pour ses aurores boréales.

Dotée d’un réseau de chaleur de 65 km, elle a vu en 2016 le raccordement dans le secteur de Skattøra d’une nouvelle chaufferie alimentée en ordures ménagères résiduelles (OMR), c’est-à-dire ayant fait l’objet d’un tri en vue d’une valorisation des matières recyclables. Auparavant, les déchets de Tromsø étaient transportés vers des usines d’incinération suédoises, la plus proche étant située à Kiruna à plus de 400 km, engendrant un transport coûteux, polluant et inutile.

La chaufferie de Skattøra à Tromsø avec à droite les silos à cendres volantes, photo Frédéric Douard

L’un des deux broyeurs lents à l’entrée des trémies d’alimentation des chaudières de Skattøra, photo Frédéric Douard

L’opérateur de la chaufferie de Skattøra est la société privée concessionnaire du réseau de chaleur de Tromsø, Kvitebjørn Varme AS (comprendre La chaleur de l’ours blanc). La construction de la chaufferie et son raccordement au réseau ont duré deux ans et sa mise en service a eu lieu début 2017. L’installation de combustion est constituée de deux chaudières Weiss A/S données pour 10 MW minimum et livrées clé en main pour un montant de 22 M€ (hors bâtiment). Aujourd’hui la société Kvitebjørn Varme est en relation avec Verdo, pour la construction d’une troisième chaudière du même type, mais de 15 MW.

En 2019, la chaufferie de Skattøra a produit plus de 130 GWh de chaleur, une valeur qui devrait atteindre les 150 GWh par an d’ici quelques années avec la troisième chaudière, le but étant d’atteindre une énergie à 100 % d’origine renouvelable sur le réseau. L’installation a ainsi consommé 55 000 tonnes d’OMR en 2019, la redevance de combustion étant ici de 100 € par tonne.

L’une deux deux fosses de stockage des déchets à Skattøra, photo Frédéric Douard

L’équipe d’exploitation est composée de six personnes qui gèrent à la fois les deux chaudières et le réseau de chaleur de 65 km. Le personnel est présent à la chaufferie de 7 à 20 h tous les jours. Le reste du temps, la chaufferie fonctionne en automatique avec un report de supervision sur une autre usine gérée par le même exploitant. Le stockage du combustible est assuré dans deux silos de 3 000 m³ d’où la matière est extraite par deux grappins. Les déchets passent ensuite,si nécessaire, dans deux broyeurs lents juste avant de rejoindre les trémies d’alimentation des chaudières, de chacune 30 m³ et assurant deux heures d’autonomie.

Les chaudières de Skattøra

Les deux chaudières consomment des OMR au PCI moyen de 3,1 kWh/kg. Notons qu’en France, les projets actuels de chaufferies à CSR sont plutôt basés sur du CSR issu de déchets industriels que de CSR issus d’ordures ménagères, d’où un PCI encore plus élevé que celui de Tromsø. Le combustible est, introduit par des poussoirs hydrauliques refroidis à l’eau. Dotées de grilles de 9,75 m de long et 2,8 m de large, chacune génère en pratique aujourd’hui 14 MW au lieu des 10 prévus initialement. Le démarrage des chaudières se fait au bois naturel, avec un allumage au brûleur à fioul. L’eau du réseau part surchauffée à 140 °C et revient à 60 °C.

Les systèmes d’introduction à vérin poussoir des deux chaudières de Skattøra, photo Frédéric Douard

L’échange dans les chaudières se fait dans trois parcours verticaux équipés de ramonage pneumatique. La gestion de l’air primaire se fait en six zones par grille. Cette alimentation d’air est suivie d’un air secondaire injecté sur les côtés de la flamme de grille puis d’un air tertiaire. Le recyclage de fumée est pratiqué en mélange avec les différents airs à hauteur de 25 à 35 % de l’air total qui est de 16 000 m³/h à 10 MW et de 23 000 m³/h à 14 MW.

L’une des deux chaudières Verdo à la chaufferie de Skattøra, photo Frédéric Douard

L’air de combustion est pris dans la zone de stockage des déchets, ce qui permet de récupérer un air tempéré, très utile durant le long hiver arctique, mais aussi de traiter les odeurs de la zone de stockage qui est ainsi mise en dépression. Cet air est ensuite monté à 140 °C dans un échangeur à eau avant introduction dans la chaudière. Ce dernier point évite les condensations acides (comme les SOx) notamment sur la grille, étant donné la nature des produits incinérés.

Le six entrées d’air primaire de l’une des chaudières de Skattøra, photo Frédéric Douard

Les échangeurs des chaudières Verdo en pression sont constitués de murs d’eau jusque 18 bar et de tube d’eau au-delà. Deux arrêts de maintenance d’une semaine chacun sont réalisés chaque année. Un nettoyage de l’installation est prévu lors de ces arrêts, ainsi qu’une inspection détaillée de la chaudière (grilles et réfractaire notamment) permettant de planifier les opérations de l’arrêt suivant. La disponibilité moyenne des deux chaudières a été de 8000 heures en 2018 et de 8100 heures en 2019.

Coupe de principe de l’une des chaudières Weiss de Tromsø, image Verdo – Cliquer sur l’image pour l’agrandir.

Le taux de cendres observé à Skattøra est de 22 % (pour des OMR), avec un taux de carbone résiduel de maximum 3 %. Le taux de cendres de grilles, récupérées en voie humide est de 75 %. Le niveau d’eau dans les cendriers de grille est géré par un capteur de pression, car les autres systèmes sont perturbés par la production de mousse provenant de la nature de la cendre. La cendre volante est stockée dans deux silos aériens.

Les cendres humides de la chaufferie OMR de Tromsø avant déferraillage, photo Frédéric Douard

Ajoutons concernant le taux de cendres, que les nouvelles grilles développées par Verdo ne supportent que 0,2 % d’aluminium dans le combustible, ce qui concernant des OMR ou des CSR n’est pas gênant puisque ce matériau est désormais aisément trié en amont. Cette limite est due à une optimisation réalisée pour maîtriser au mieux l’excès d’air et améliorer encore le rendement de combustion : les barreaux sont ainsi ajustés sur des profils latéraux sur lesquels ils coulissent et sont resserrés entre eux par des tringles.

Les dispositifs de traitement des gaz

En matière d’émissions, comme dans toutes les installations de combustion de déchets en Europe, les chaudières doivent respecter un temps de séjour minimum de deux secondes au-dessus de 850 °C. En cas de baisse en deçà de ce niveau de température, deux brûleurs à fioul par chaudière, placés à mi-hauteur du premier parcours, entrent instantanément en action. Pour des installations où le besoin de maintien en température serait important ou fréquent, du fait par exemple d’un combustible au PCI variable, Verdo propose en option une double introduction par vérin poussoir : une bas-PCI et une haut-PCI, la seconde pouvant par exemple être alimentée en bois B, en poudre de bois ou en granulés, pour éviter de brûler du fioul ou du gaz.

Le système de ramonage pneumatique en haut de l’économiseur de la chaufferie de Skattøra, photo Frédéric Douard

Le traitement des émissions de particules est réalisé en deux étapes. Les gaz passent d’abord dans une tour de refroidissement par évaporation permettant de conditionner les fumées en humidité et température afin d’obtenir les conditions optimales pour maximiser l’efficacité de l’injection de réactifs. De la chaux et du charbon actif sont ensuite injectés en amont du filtre à manches. Le traitement des fumées est un traitement sec sans aucun effluent aqueux.

Le laveur semi-humide à gauche et les deux filtres à manches de l’une des chaudières de Skattøra, photo Frédéric Douard

Dans les chaudières Verdo, le traçage des filtres à manche et de la tour de refroidissement est réalisé à l’eau, ce qui évite une consommation importante d’électricité. Les filtres à manches sont décendrés à plat par une vis planétaire et non par gravité dans un cône pour éviter toute obturation.

Ecran de contrôle-commande de la chaudière n°1 de la chaufferie de Skattøra, capture d’écran Kvitebjørn Varme – Cliquer sur l’image pour l’agrandir.

A gauche les deux cuves de charbon actif, au centre les deux cuves de chaux et à droite la cuve d’amoniaque à Skattøra, photo Frédéric Douard

La maîtrise des oxydes d’azote se fait avec une SNCR à l’eau ammoniaquée à 20 % et dans une ambiance de flamme à 1 050 °C. A Tromsø, les VLE sont en mg/Nm³ à 11 % d’O2 de 200 pour les NOx, de 10 pour les poussières et de 50 pour le CO et les SOx.

Les chaufferies Verdo, désormais disponibles en France via Weiss-France Energie, sont donc utilisables en installations de combustion de déchets non dangereux préparés sous forme de combustibles solides de récupération sous la rubrique ICPE 2971, mais aussi en installations de combustion de déchets non dangereux triés mais non préparés (OMR) sous la rubrique ICPE 2771.

Contacts :

  • Weiss-France Energie : Sylvain Decurninge, directeur technique / +33 479 890 707 
- s.decurninge@weiss-france.fr – www.weiss-france.fr
  • Verdo : Morten Grøn, responsable export
 / +45 4040 5489 – gron@verdo.com – www.verdo.com
  • Réseau de chaleur de Tromsø : www.kvitebjornvarme.no

Frédéric Douard, en reportage à Tromsø


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