Lien de bannissement

La gestion des déchets alimentaires à Hong Kong

Biens alimentaires jetés à Hong Kong, photo timeout.com.hk

Biens alimentaires jetés à Hong Kong, photo timeout.com.hk

www.bulletins-electroniques.com

Avec la mondialisation croissante, la population des pays développés a de plus en plus de choix pour s’alimenter. Ceci conduit inévitablement à une augmentation des déchets alimentaires qui représentent une part importante des déchets ménagers et ainsi un part importante de l’espace dans les sites d’enfouissement. Sont appelés « déchets alimentaires » tous les aliments, ou partie d’aliment, jetés tout au long de la chaîne allant de leur production, à leur transformation et leur transport jusqu’à leur consommation. Alors qu’une partie de ces déchets ne peut être consommée, comme par exemple les parties non comestibles comme les arêtes de poissons, les épluchures de légumes, etc., on retrouve également de nombreux restes de repas et même des denrées alimentaires non entamées qui sont jetées pour cause d’excédent de production ou car leur date limite de consommation est atteinte (bien qu’ils puissent dans certains cas être consommés sous aucun problème).

1. Etat des lieux

Hong Kong est une ville qui prône la consommation, mais hélas également le gaspillage. Les hongkongais jettent plus de 3 330 tonnes de déchets alimentaires par jour ce qui représente 36% des déchets « solides » de Hong Kong selon le « Monitoring of Solid Waste in Hong Kong – Waste Statistics for 2014 » publié par le département de protection de l’environnement de la région autonome (EPD). De ces déchets, 30% soit environ 800 tonnes sont produites par les industries et les commerces (I&C), tels que restaurants, hôtels, marchés humides et les industries agro-alimentaires. Au cours des 10 dernières années, la quantité de déchets alimentaires provenant de ce secteur n’a fait qu’augmenter. Elle est passée de moins de 400 tonnes par jour en 2002 à plus de 800 tonnes par jour en 2012. De même, les déchets alimentaires produits par l’industrie hospitalière ont doublé sur les 5 dernières années. Si le volume total des déchets a diminué de 0,3% entre 2008 et 2011, sur cette même période le volume des déchets alimentaires a lui augmenté de 20%.

En comparaison avec d’autres régions en Asie, le poids des déchets alimentaires par jour et par personne est respectivement 6,3, 1,6, 1,7 et 2,6 fois plus élevé à Hong Kong qu’à Shanghai, Singapour, la Corée du Sud et Taiwan. Par ailleurs, en 2014, à Hong Kong seulement 3% des déchets alimentaires ont été recyclés ou valorisés.

La gestion de ces déchets au niveau de la collecte et donc du traitement pourrait être facilement améliorée par leur tri sélectif alors qu’ils sont actuellement mélangés aux autres déchets ménagers. Mais le gouvernement de Hong Kong fait face à un dilemme pour ce qui est du tri des déchets alimentaires des ménages : en effet, les espaces de vie étant déjà extrêmement exigus, les foyers ne peuvent et ne veulent pas s’encombrer d’une poubelle supplémentaire. Par ailleurs, la collecte sélective de ces déchets spécifiques en zone publique, comme l’est celle du métal, du papier, du verre, poserait de gros problèmes sanitaires.

Si nous regardons au-delà du problème de la gestion des déchets alimentaires, se pose aussi une question morale. L’accès à une alimentation correcte n’est pas un acquis universel mais bien un privilège réservé à seulement une partie de la population. En effet, plus de 800 millions de personnes vivent en sous ou mal nutrition à travers le monde. A Hong Kong, sur une population totale de seulement 7,3 millions d’habitants, il y a encore environ 20.000 enfants âgés de moins de 15 ans qui se trouvent en situation de sous nutrition.

2. Impacts sur l’environnement

Alors que 10% des émissions de gaz à effet de serre des pays développés sont dus à la surproduction alimentaire, on estime, que si des forets recouvraient les terres actuellement utilisées pour cultiver le surplus inutile de nourriture, elles compenseraient 100% des émissions de gaz à effet de serre mondiale provenant de la combustion de combustibles fossiles (essence, gasoil, charbon…).

L’élimination des déchets alimentaires biodégradables par le stockage ou leur enfouissement dans les décharges n’est pas durable et est, de plus, très nuisible à l’environnement. En effet, cette méthode, en plus d’épuiser les espaces des décharges et de créer des nuisances olfactives, implique de nombreux traitements chimiques d’autant plus néfastes pour l’environnement.

Lorsque les décharges se trouvent dans les périphéries des villes, comme c’est le cas pour celles de Hong Kong, la décomposition a d’autant plus d’impact sur l’environnement. En effet, en se décomposant, les déchets libèrent des quantités importantes de méthane et de dioxyde de carbone – deux gaz à effet de serre qui capturent et retiennent les rayonnements terrestres dans l’atmosphère. Cela augmente la température atmosphérique et nuit à la qualité de l’air.

3. Emergence de solutions

Même si de plus en plus de hongkongais prennent conscience qu’en réduisant les déchets alimentaires, ils gagneraient en qualité de vie, le problème de la gestion des déchets alimentaires est devenu un enjeu majeur pour le gouvernement de Hong Kong.

A ce jour, le gouvernement n’ayant pas trouvé de solution, la majeure partie de ces déchets finissent dans les décharges, ce qui ne fait que réduire d’avantage les espaces d’enfouissement et alourdir le poids du fardeau écologique déjà lourd de Hong Kong. L’EPD a estimé que les trois des décharges de la ville devraient atteindre leurs limites de stockage d’ici 2020. Des études plus alarmantes estiment même que le premier de ces 3 sites d’enfouissement sera saturé avant la fin de l’année 2015.

Au cours des dernières années, le gouvernement a initié et soutenu divers programmes et campagnes d’éducation pour promouvoir la réduction des déchets alimentaires. En février 2014, le gouvernement de Hong Kong a publié sa nouvelle politique de gestion des déchets « Policy Framework for the Management of Municipal Solid Waste (2005-2014) » et son plan de réutilisation des ressources « Hong Kong : Blueprint for Sustainable Use of Resources 2013-2022 ». Le principal objectif chiffré est de réduire les déchets alimentaires de 40% d’ici 2022. Pour cela, le gouvernement s’engage à lutter contre le gaspillage alimentaire, et donc de réduire la génération de déchets. Pour se faire, il agira sur 4 axes : la réutilisation et le don alimentaire, la collecte des déchets en tant que recyclables et la transformation des déchets alimentaires en énergie.

Si on s’en réfère aux exemples de Taïwan ou de la Corée du Sud – qui a réussi à réduire ses déchets alimentaires de 90% -, on constate que la mise en place d’une taxe basée sur la quantité de déchets alimentaires a permis une réduction de 30% à 50% de ces déchets. En plus de l’éducation d’outre outil peuvent donc également se révéler efficace pour internaliser les externalités et de ce fait limiter la production de déchets. La taxe lors qu’elle est Pigouvienne (c’est à dire lorsque le dommage marginal est égale à coût marginale de dépollution) permet d’atteindre à la fois une minimisation de la production de déchet mais aussi un optimum social vis-à-vis de la population.

Suite à cette constatation, le conseil pour le développement durable de Hong Kong, en collaboration avec l’EPD, est en train de mettre en place une taxe, estimée applicable pour un montant situé entre 20 HKD et 40 HKD par kilo de déchet alimentaire. Cela sous-entend de repenser le système de récupération des déchets, de prévoir les institutions de gestion de ces nouvelles taxes mais aussi de prévoir les moyens d’éduquer la population à réduire ses déchets alimentaires.

Même s’il semble difficile, pour le marché local, d’absorber/recycler tous les déchets alimentaires générés, plusieurs solutions technologiques pour le recyclage des déchets alimentaires sont en cours de développement.

Compostage des déchets

En 2008, dans le cadre du programme « Organic Waste Treatment Facilities », l’EPD a commandé une usine de compostage des déchets biodégradables au centre de recyclage de Kowloon Bay. L’usine a une capacité de traitement d’environ 500 tonnes, produisant environ 50 tonnes de compost, par an, utilisable par les industries agricoles locales.

En complément, en 2011, le gouvernement a lancé un projet qui a permis de financer 56 lotissements dans lesquels les déchets alimentaires sont triés puis ramassés pour être envoyés dans cette usine pilote de compostage de Koolow Bay. Hélas, ce recyclage des déchets alimentaires étant purement basé sur le volontariat, il est loin d’être systématique et les déchets alimentaires envoyés à Kowloon Bay, dont le total ne représente que seulement 0,63 tonnes, proviennent principalement de quelques hôtels et des centres commerciaux. Le montant de l’investissement dans ces 56 logements devait permettre d’en récolter 6 tonnes.

Réutilisation en alimentation animale

Selon les industries agricoles et aquacoles locales, 200 tonnes de fourrage porcin et 20 tonnes de fourrage piscicoles peuvent être consommés quotidiennement à Hong Kong. Cette réutilisation permettrait de recycler 830 tonnes de déchets alimentaires, soit 23% des déchets alimentaires totaux de Hong Kong.

Usines de méthanisation

Le gouvernement prévoit l’installation de plusieurs centres de méthanisation des déchets organiques afin de produire de l’électricité. Les déchets alimentaires seront transformés en méthane qui sera utilisé pour produire de l’électricité. Ces centres, répartis sur le territoire de Hong Kong, pourraient atteindre une capacité totale de recyclage d’environ 1300 à 1500 tonnes de déchets par jour.

La première usine, qui est en construction à Siu Ho Wan, au nord de l’île de Lantau, pourra traiter 200 tonnes de déchets et la seconde, qui sera érigée à Shaling, dans le district du Nord, 300 tonnes. Les travaux de construction devraient être achevés, respectivement, en 2015 et 2017. Ces 500 tonnes de déchets organiques, ne représentent hélas que 14% du total des déchets alimentaires de Hong Kong. Au total, les installations de recyclage ne pourront résorber que 40% des déchets alimentaires de Hong Kong.

Dons de nourriture

Il y a actuellement 25 associations à Hong Kong qui promeuvent ce mode recyclage. Grâce à elles, 5 tonnes de nourriture sont recueillies par jour. Ce qui équivaut à seulement 0,14% du gaspillage alimentaire total de la ville.

Conclusion

Avec ses 3 sites d’enfouissement des déchets à la limite de la saturation, il est temps que Hong Kong prenne au sérieux la problématique de la gestion de ses déchets et en particulier de ses déchets alimentaires, qui représentent plus du tiers des déchets solides générés chaque jour. Dans ce monde de la consommation à outrance, lutter contre le gaspillage alimentaire apparait comme une solution à application immédiate et pour laquelle le gouvernement semble vouloir mettre les moyens nécessaires à l’éducation du public. En outre des solutions technologiques pour le recyclage des déchets alimentaires commencent à émerger. Le gouvernement s’est déjà engagé à financer le développement de la recherche en biotechnologies dans ce domaine spécifique afin de développer un marché des produits issus des déchets alimentaires recyclés.

Dans tous les cas, l’efficacité des mesures prises dépendra de la volonté du public à jouer le jeu du tri des déchets. Là encore, l’efficacité des campagnes éducatives sera déterminante.

Origine : BE Hong Kong numéro 10 (12/05/2015) – ADIT – http://www.bulletins-electroniques.com

1 réponse
  1. GNANGA Hénock dit :

    BONSOIR,
    Je propose que le gouvernement promeuve la construction des biodigesteurs de type familiaux à la place des fosses septiques dans les ménages et Hôtel. La stratégie a marché chez moi et dans les ménages qui l’ont adopté au Bénin. Et ce sont ces ménages qui valorise les déchets biodégradables de leurs voisins.