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Le stockage géologique du CO₂ : bon calcul économique ou pas ?

Le gouvernement français souhaite faire du captage et stockage du carbone (CSC) un pilier de sa stratégie industrielle, mais une nouvelle analyse suggère que ce plan pourrait s’avérer bien plus coûteux que prévu. Un rapport de l’Institute for Energy Economics and Financial Analysis (IEEFA), paru le 15 juillet 2025, examine les coûts liés au lancement du CSC au Royaume-Uni. Si le gouvernement britannique a déjà prévu plus de 50 milliards de livres sterling de subventions pour soutenir le CSC, le rapport prédit que les coûts d’installation et d’exploitation des projets pourraient atteindre la somme de 408 milliards de livres d’ici 2050, la technologie restant commercialement risquée et technologiquement non éprouvée.

Le CSC n’a pas encore émergé en France, mais à la fin du mois de juin 2025, le gouvernement a signé un accord avec la Norvège pour explorer la possibilité d’exporter du CO₂ de la France vers la Norvège. Or, Andrew Reid, l’auteur du rapport, estime que le soutien au CSC devrait « être revu à la baisse, en particulier lorsqu’il repose sur des subventions, au profit de sources d’énergie bas carbone comme les énergies renouvelables ou le stockage d’énergie ». L’étude de l’IEEFA révèle que les consommateurs britanniques supporteront la majeure partie des coûts liés au CSC, à un moment où les ménages et les entreprises sont confrontés à des prix d’électricité élevés.

Au Royaume-Uni, les pollueurs sont peu incités économiquement à installer des installations de CSC, car les prix du carbone sont trop bas, ce qui signifie que des subventions sont utilisées pour atteindre les objectifs du gouvernement. Plus de 50 milliards de livres sterling de subventions ont déjà été allouées au soutien de projets de CSC, qui ne représentent ensemble que 8 % de l’objectif britannique de CSC pour 2050.

« Compte tenu de l’immaturité technique du CSC et de ses antécédents de dépassements de coûts, ce montant de subvention de 50 milliards de livres sterling n’est probablement que la partie émergée de l’iceberg », a déclaré Andrew Reid, analyste financier spécialisé dans l’énergie à l’IEEFA et auteur du rapport.

Andrew Reid ajoute que le gouvernement britannique n’a pas évalué l’impact financier total du soutien au CCS sur les contribuables. Parallèlement, les pollueurs sont exonérés de toute responsabilité en raison de la mauvaise gestion gouvernementale de la tarification du carbone, ce qui entraînera une baisse continue des recettes du système national d’échange de quotas d’émission.

Selon les prévisions du Comité britannique sur le changement climatique, le CCS sera davantage utilisé pour les captages artificiels – notamment l’énergie issue de la biomasse et le captage direct de l’air – que pour tout autre secteur. Les captages artificiels devraient représenter 45 % de l’objectif britannique en matière de CCS d’ici 2050, bien qu’il s’agisse de la solution la plus coûteuse.

L’investissement total pour l’installation et l’exploitation des infrastructures de CCS au Royaume-Uni pourrait s’élever à 408 milliards de livres sterling d’ici 2050. Une moyenne de 5 milliards de livres sterling sera nécessaire chaque année d’ici 2030. Ce montant passera à 19 milliards de livres sterling par an en moyenne entre 2031 et 2050.

Outre les coûts et les risques commerciaux, la plupart des applications ciblées pour le CCS au Royaume-Uni sont loin d’être technologiquement éprouvées à grande échelle. Le Comité sur le changement climatique reconnaît que « les incertitudes liées aux taux de captage du CSC augmentent régulièrement à partir de 2035, parallèlement au déploiement du CSC, et deviennent une source importante d’incertitude en 2050 ».

Et Reid de conclure  : « Il existe un risque que les projets ne fonctionnent pas comme prévu et n’atteignent pas les volumes de captage promis. C’est ce qu’ont constaté les rares projets pilotes menés à ce jour dans le monde. Le gouvernement devrait tenir compte de cet historique d’échecs afin d’éviter un soutien excessif au CSC au détriment de solutions alternatives pour atteindre la neutralité carbone. »

>> Télécharger et lire le rapport (en anglais of course)

Frédéric Douard

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