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Les énergies issues des déchets sont volontairement sous-utilisées en France

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La combustion propre des déchets non-recyclables à Saint-Ouen-sur-Seine permet la production de chaleur et d’électricité pour l’agglomération parisienne, photo Frédéric Douard

Les énergies renouvelables et de récupération provenant de la valorisation énergétique des déchets non recyclables sont des énergies locales et bas-carbone. Elles sont un véritable levier pour accélérer la transition énergétique et doivent être considérées au même titre que les autres énergies renouvelables, tel est le message que veulent faire passer la Fédération Nationale des Activités de la Dépollution et de l’Environnement (FNADE) et la Fédération des Services Energie Environnement (FEDENE). Pourtant, le gouvernement français, qui depuis 2017 fait une chasse en règle à toutes les alternatives de production électrique pilotables comme la cogénération, pour notamment bâtir le contexte le plus favorable possible à son plan de relance du nucléaire, limite les possibilités de diversification de la production électrique à partir des déchets.

La loi Accélération de la production des énergies renouvelables du 10 mars 2023, après examen par le Conseil Constitutionnel, a malheureusement exclu la disposition (article 79) prévoyant la possibilité de produire simultanément de l’électricité et de la chaleur (cogénération) à partir des combustibles solides de récupération (CSR) issus de déchets non recyclables. C’est pourquoi la FNADE et la FEDENE restent mobilisées pour porter à nouveau des mesures en faveur des énergies renouvelables et de récupération, dont les CSR, à l’occasion de l’examen prochain du projet de loi industrie verte, et du projet de loi de programmation énergie-climat, à l’issue duquel sera adoptée la future PPE (Programmation Pluriannuelle de l’Energie).

En effet, tandis que la Commission européenne conditionne les aides d’Etat aux projets de valorisation énergétique de déchets sous forme de cogénération, l’actuelle programmation pluriannuelle de l’énergie française limite les aides publiques uniquement à la production de chaleur à partir de CSR. Or, pour sécuriser les projets et leur adéquation aux besoins énergétiques sur leur durée de vie, il est nécessaire de corriger cela pour accélérer la production simultanée d’électricité et de chaleur vertueuses à partir des déchets non recyclables.

Dans un contexte de tension énergétique et de volonté d’accroître la souveraineté nationale, l’énergie issue des déchets des territoires a toute sa place dans le mix énergétique français. C’est une des solutions de substitution aux énergies fossiles, notamment le gaz et le charbon. La FNADE et la FEDENE rappellent que l’industrie française reste fortement dépendante des énergies fossiles importées qui représentent sa principale source de production de chaleur (61%).

L’énergie issue des déchets, renouvelable et de récupération, est bas-carbone. A horizon 2028, ce sont plus de 30 TWh d’énergie thermique et de gaz qui pourraient être produits à partir de déchets non recyclables, soit l’équivalent de six réacteurs nucléaires, plus du double de ce qui était produit en 2020. Au-delà de sa contribution à la décarbonation de l’industrie, cette énergie constitue donc un atout pour le développement économique des territoires et l’implantation de nouvelles activités industrielles ainsi que pour le maintien d’industries fortement consommatrices de chaleur sur le territoire national et leurs emplois associés.

Frédéric Douard

1 réponse
  1. PAJOT Gilbert dit :

    Le 29mars 2006, Henri Prévot, ingénieur général des Mines, remettait un rapport au Ministre de l’industrie de l’époque, à propos des réseaux de chaleur. Il suggérait, notamment, d' »oublier d’autres critères comme l’efficacité énergétique ». Il souhaitait « mettre fin à la production d’électricité à partir des usines d’incinération, d’arrêter la cogénération d’électricité et de chaleur… ».
    Jean-Marc Jancovici, intervenant fréquemment dans les médias, donnant de nombreux cours (ParisTech Mines) et conférences, dans divers lieux universitaires et grandes écoles, ne prononce jamais le mot cogénération. S’agit-il d’oublis de sa part ?
    Ne nous étonnons donc pas de constater que la disposition (article 79), prévoyant la possibilité de produire, simultanément, de l’électricité et de la chaleur (cogénération), soit exclue !
    L’efficacité énergétique du nucléaire doit se situer autour de 0,33, alors que nous atteignons 0,80 pour une cogénération.
    Merci pour la qualité de votre article. Gilbert Pajot