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Le bois-énergie, outil de gestion territoriale du Parc Naturel Régional des Grands Causses

Article paru dans le Bioénergie International n°78 d’avril 2022

Les Grands Causses se reboisent naturellement, notamment de pins, photo Frédéric Douard

Le territoire du Parc Naturel Régional des Grands Causses, comme la plupart des territoires ruraux, possède de nombreuses ressources énergétiques renouvelables : soleil, eau, biomasse et vent. À ce jour, les installations en service représentent déjà l’équivalent de 60 % de la consommation totale d’énergie du territoire. Pour parvenir à un mix énergétique 100 % renouvelable dès 2023, le Parc renforce la production d’énergie renouvelable en parallèle de mesures d’économie d’énergie. Au sein même de cette politique, le bois-énergie joue un rôle central en permettant à la fois de s’approcher de la neutralité carbone du territoire, de maîtriser le coût de l’approvisionnement énergétique, de créer des emplois ruraux et de gérer un espace agropastoral exceptionnel.

Le bois-énergie maintient le paysage

Les paysages ouverts des grands causses français, ces hauts plateaux calcaires présents notamment dans les départements de l’Aveyron, de la Lozère ou du Lot, sont la signature d’un pastoralisme ovin ancestral. Mais depuis les années 1950, ces paysages agricoles emblématiques, qui pouvaient paraître immuables, se reboisent spontanément de par l’évolution des pratiques pastorales et une utilisation moindre du bois comme mode de chauffage.

Paysage typique des Grands Causses, photo Frédéric Douard

Depuis quelques années, avec la prise de conscience d’une fermeture progressive des milieux caussenards, et le classement des Causses et Cévennes au patrimoine mondial de l’Unesco en tant qu’exemple exceptionnel d’agropastoralisme méditerranéen, il est apparu urgent pour ses habitants de contenir cette progression de l’arbre, qui se fait au détriment du pastoralisme, et ceci tout en améliorant les boisements existants pour mieux les valoriser. Le boisement des parcours utilisés par les troupeaux serait en effet non seulement la fin d’une ressource essentielle en fourrage d’une qualité exceptionnelle pour les éleveurs caussenards, mais aussi la quasi-disparition d’une flore non moins exceptionnelle liée à ces milieux ouverts de type steppiques, dont de très nombreuses espèces d’orchidées sauvages. Ajoutons à cela la hausse des prix des énergies fossiles et la nécessaire lutte contre le changement climatique, et les motifs ne manquent pas pour lancer un programme ambitieux de bois-énergie sur ces territoires.

Faites ce que je fais

Livraison de bois déchiqueté à la maison du Parc à Millau, photo PNR Grands Causses

Le Parc Naturel Régional des Grands Causses, couvert à plus de 30 % de forêts, s’est emparé du sujet du bois-énergie dans le cadre de sa politique énergie engagée en 2009 et de sa charte forestière mise en place en 2005, en favorisant l’utilisation du bois déchiqueté des causses par l’installation de systèmes de chauffage au bois automatiques, modernes et respectueux de la qualité de l’air. Le Parc ne travaille bien entendu pas seul sur le sujet et il est membre de l’association Aveyron Bois Énergie depuis 2012, il a rejoint le réseau des Territoires à Énergie POSitive en 2017 et il a signé plusieurs Contrats de Territoire avec l’ADEME pour le financement des petits projets en grappes.

Suite à cela, de nombreuses chaufferies automatiques de petites puissances ont été installées sur le territoire du Parc, notamment dans les exploitations agricoles situées directement sur les causses et concernées par la question du maintien des parcours.

Pour crédibiliser son discours de promotion des nouveaux usages de l’énergie bois, le Parc a mis en service en 2017 une chaudière Hargassner ECO-HK de 100 kW pour le chauffage de la maison du Parc située dans la ville de Millau. Le bâtiment fait 1 400 m² sur cinq niveaux et consomme entre 80 et 100 MWh de plaquettes forestières par an. Comme la maison du Parc se trouve en pleine ville, sans possibilité particulière d’accès pour déverser le bois, c’est le système de livraison par soufflage qui a été retenu et qui est opéré par la coopérative Sylvabois depuis sa plateforme couverte de Pont-de-Salars. L’installation de la chaudière a été réalisée par les Ets Billy de Saint-Affrique, qui réalisent également le suivi de la chaudière et son entretien annuel.

Porter les projets collectifs

Sachant que les besoins des seuls résidents des causses ne suffisent pas à consommer assez de bois pour réduire l’avancée de la forêt, le Parc a milité pour des chaufferies plus importantes situées dans les vallées. Seulement, essayer de monter des projets de réseaux de chaleur au bois en milieu rural, ou dans de petites villes, se heurte souvent au mur des investissements et à la faible densité des besoins qui rend la rentabilité difficile.

Chantier de déchiquetage pastoral sur la commune de Millau, photo Emmanuelle Galtier

Afin de développer et de pérenniser la filière bois-énergie locale, et de contribuer à la transition énergétique, des discussions ont commencé à voir le jour dès 2009 avec les partenaires de la filière bois, et en 2016, le Parc a créé la Société d’Économie Mixte Causses Energia qui regroupe huit collectivités, dix entreprises notamment de bois-énergie, des organismes bancaires et des bailleurs sociaux. Cette structure publique et privée est chargée de porter le développement, le financement et l’exploitation de chaufferies bois et réseaux de chaleur permettant aux utilisateurs de bénéficier d’un service de vente de chaleur sans devoir supporter directement l’investissement. Pour la mise en œuvre des projets de réseaux de chaleur, la SEM travaille avec Dalkia, et sur les projets plus modestes avec des exploitants locaux comme la MET Energie.

La chaufferie bois de Saint-Affrique, photo Frédéric Douard

C’est sur ce principe que Causses Energia a porté et mis en service fin 2019 le réseau de chaleur au bois de Saint-Affrique, petite ville de 8500 habitants située au sud du département de l’Aveyron. Suite à cette première réalisation, fin 2021, la SEM a mis en service une deuxième chaufferie collective à bois à l’EPHAD Denis Affre à Saint-Rome-de-Tarn. Un troisième projet sera mis en service fin 2022 pour le chauffage d’un autre EHPAD et de bâtiments communaux à Saint-Laurent-d’Olt. Et pour la suite, la SEM travaille sur un projet de réseau de chaleur avec la commune et Société des caves de Roquefort-sur-Soulzon pour des besoins annuels de 3 GWh.

Alexandre Chevillon à côté de la chaudière de la Maison du Parc à Millau, photo Frédéric Douard

Contacts :

  • Le Parc : Alexandre Chevillon, responsable énergie – 05 65 61 43 16 – 06 70 44 47 46 alexandre.chevillon@parc-grands-causses.fr – 
www.parc-grands-causses.fr
  • Causses Energia : Rémy Blazin
 – 06 77 10 90 83 – causses.energia@gmail.com
  • Exploitation des chaufferies Causses Energia : www.metenergie.fr et hwww.dalkia.fr

Pour la chaufferie de la Maison du Parc :

Frédéric Douard, en reportage à Millau