Pour Welfarm, la méthanisation ne doit pas accroître la horsolisation des élevages
Welfarm est une association française indépendante créée en 1994 et dont la mission est de travailler à une meilleure prise en compte du bien-être des animaux d’élevage. Aujourd’hui, conséquence de la guerre en Ukraine, les appels se multiplient partout en Europe pour augmenter la production de biogaz afin de limiter la dépendance au gaz russe. Pour Welfarm, il n’est pas question de s’opposer par principe à cette tendance qui répond à de vraies questions stratégiques et climatiques, mais plutôt d’inviter les acheteurs de biogaz à la vigilance éthique. Pour cela, l’association a écrit aux distributeurs français de gaz pour les mettre en garde contre les risques que ce développement pourrait faire peser sur les pratiques agricoles et sur le bien-être animal. Welfarm redoute en effet qu’en recherchant la performance, certains éleveurs soient tentés d’imposer la claustration à leurs animaux et de réduire leur accès au plein air.
Dans une lettre adressée le 7 avril 2022 à l’ensemble des distributeurs de gaz en France, Welfarm les appelle à prendre en compte le bien-être animal dans les approvisionnements en biogaz. Son inquiétude est partagée par le sénateur Daniel Salmon dans un rapport d’information portant sur « la méthanisation dans le mix énergétique, enjeux et impacts ». L’élu d’Île-et-Villaine estime ainsi que le bien-être animal est « un point de vigilance rarement évoqué » au sujet de la méthanisation. Selon ce rapport, « l’objectif de récupérer un maximum d’effluents d’élevage peut conduire à garder le cheptel en stabulation tout au long de l’année et le nourrir en permanence à l’auge. La vache au pré, fierté française, pourrait alors ne devenir qu’un vague souvenir. »
Ces craintes s’expriment aujourd’hui au vu des annonces qui se sont multipliées ces dernières semaines en faveur d’une augmentation forte et rapide de la production de biogaz, même si tous les modèles de méthanisation ne font pas appel aux effluents d’élevages (Cultures intermédiaires, biodéchets, sous-produits d’industries alimentaires, boues d’épuration …).
Pour Welfarm, l’urgence de la situation, si préoccupante soit-elle, ne doit pas justifier une régression du bien-être de centaines de millions d’animaux d’élevage potentiellement affectés par la production de biogaz. Pour l’association, les animaux d’élevage ne doivent pas être assimilés à de simples fournisseurs d’effluents. À l’inverse, garantir l’accès au plein air avec pâturage pour tous les animaux prend tout son sens dans la crise actuelle. Le pâturage permet en effet de valoriser des surfaces non cultivables et des fourrages non consommables par les humains, il limite le recours aux aliments importés (de près ou de loin), il permet de maintenir de la biodiversité et certains paysages emblématiques comme le bocage, il concoure à la régulation et à la qualité de l’eau, le tout amenant à une plus grande résilience, ce qui est précisément recherché actuellement.
Frédéric Douard