Lien de bannissement

Chauffage à distance et efficacité énergétique pour les communes de Suisse

Le séminaire qui s’est déroulé le 30 avril 2009 à Martigny s’est penché sur cette question, qui concerne particulièrement les communes et les cantons.

Chaufferie bois de la Tuilière sur le réseau de Lausanne

Organisé par le Centre de Recherches Energétiques et Municipales (CREM), l’Energy Center de l’EPFL et SuisseEnergie pour les communes, son objectif était de traiter des différentes opportunités et contraintes qui se présentent aux communes pour l’élaboration de systèmes de chauffage à distance (CAD.

C’est une question d’autant plus actuelle, que la Confédération, par l’entremise de l’Office fédéral de l’énergie (OFEN), a prévu des mesures d’encouragement aux projets de chauffage à distance qui valorisent les rejets thermiques ou utilisent des énergies renouvelables. Cette année, un montant de 30 millions de francs suisses est mis à disposition, sous forme d’aides à l’investissement qui peuvent être versées pour l’encouragement de projets de chauffage à distance, dont la construction débute avant la fin 2009. Ces systèmes devront être alimentés à une hauteur d’au moins 80 % soit par des rejets de chaleur, soit par des énergies renouvelables.

La ville de Vevey, Cité de l’énergie, développe depuis 1994 une politique active de promotion des économies d’énergie et des énergies renouvelables, comme l’a montré M. Thomas Würsten, délégué à l’énergie. Afin de déployer cette politique énergétique au niveau territorial, un plan directeur communal des énergies a été mis en place. Le chauffage à distance y tient une grande place, dans la mesure où trois zones à fort potentiel ont été identifiées pour la réalisation de trois réseaux CAD dans la ville de Vevey. Même si les représentants politiques de Vevey sont convaincus que le CAD constitue une bonne option pour l’avenir énergétique de leur ville, encore faut-il trouver les bons partenaires pour financer et réaliser ces projets, prévue d’ici 2014.

Le chauffage à distance a une tradition historique fort ancienne à Lausanne. La capitale vaudoise a mis en service son premier chauffage urbain en 1934. En 1994, la ville fit œuvre de pionnier en Suisse, dans la production combinée de chaleur et d’électricité, en installant une turbine à gaz à cycle combiné à l’usine de Pierre-de-Plan, fournissant tout au long de l’année une puissance productive de 22 à 26 MW d’électricité et d’environ 30 MW de chaleur.

Le chauffage à distance lausannois répond aux exigences actuelles de protection de l’environnement, d’augmentation de l’efficacité énergétique et de valorisation de la chaleur issue de déchets non recyclables. En effet, près de 70% de l’énergie nécessaire pour alimenter le système sont produits à partir de déchets, de bois et de boues d’épuration. Plus de 1’200 immeubles sont raccordés au réseau. Les autorités envisagent maintenant d’étendre le chauffage urbain à la zone sud de la ville.

A la Chaux-de-Fonds, la chaleur à distance fit son apparition en 1926, à une petite échelle, avec le développement du chauffage à distance Numa-Droz. La question prit toute son importance dans la capitale horlogère en 1973 lors de la création du réseau CAD Collège. A la suite de difficultés d’exploitation, le CAD fut remis en cause dans les années 80, avant de prendre un nouveau départ avec la construction d’une usine d’incinération dans les années 1990. Tout comme à Lausanne, le CAD répond aux différentes exigences de protection de l’environnement, d’efficacité énergétique et de promotion des énergies renouvelables, puisqu’il couvre les besoins thermiques du tiers de la ville qui compte plus de 37’000 habitants, en utilisant plus de 70% d’énergie renouvelable. En outre, Viteos SA qui gère la fourniture de gaz et de chauffage à distance de la Chaux-de-Fonds, envisage de suivre la même stratégie pour les sites du Locle et de Neuchâtel.

En Valais, la ville de Martigny a mis en service un chauffage à distance en 1981, à la suite de l’élaboration d’un des premiers plans directeurs énergétiques de Suisse. Il fonctionne au gaz naturel et couvre les besoins thermiques d’un tiers de la ville, qui compte près de 16’000 habitants. Son efficacité est suivie et optimisée de façon continue grâce à un système de monitoring, ce qui a permis d’augmenter le rendement de plus de 20 % depuis sa mise en service. De nombreux projets pour le développement du CAD de Martigny sont actuellement à l’étude ou en cours de réalisation. Ils visent à diversifier l’approvisionnement en énergie, en combinant différentes sources d’énergie renouvelable, solaire, géothermie, bois.

Toujours en Valais, la société Centrale Thermique de Vouvry SA, dont EOS Holding est l’actionnaire majoritaire, projette de réaliser et de mettre en servie d’ici 2012 une nouvelle centrale électrique à cycle combiné (CCGT), alimentée au gaz naturel. En 2008, CTV SA a mandaté le CREM pour réaliser une analyse prospective des potentialités de valorisation en Suisse romande des rejets thermiques issus d’une CCGT en vue d’une compensation des émissions de C02.

Les résultats de cette étude ont montré que la quantité de chaleur à disposition et le manque de clients existants impose de développer les chauffages à distance dans des zones urbaines denses, pour pouvoir valoriser les rejets de chaleur.
Malgré l’existence en Suisse romande d’agglomérations urbaines répondant au critère de la taille, le décalage temporel entre la construction d’une CCGT et celle d’un chauffage à distance conséquent semble éliminer la possibilité à court terme d’exploiter ainsi cette coproduction de chaleur. Enfin, sachant que la quasi-totalité des modes de production d’électricité, géothermie, biomasse, CCGT, centrales nucléaires et autre rejette de la chaleur, des stratégies de développement de chauffage à distance doivent être rapidement mises en places, par une étroite collaboration entre pouvoirs publics, exploitants et investisseurs privés, si l’on veut éviter d’obtenir le même résultat dans vingt ans.

En conclusion, ce séminaire a largement montré que les solutions actuelles et futures de chauffage à distance tiennent et tiendront de plus en plus compte des impératifs actuels de protection de l’environnement par l’augmentation de l’efficacité énergétique, la valorisation des rejets thermiques et l’utilisation des énergies renouvelables. Il a aussi mis en évidence la nécessité que les autorités politiques intègrent les solutions de chaleur à distance dans la planification énergétique de territoires à forte densité de demande thermique.

Contact : Akbar Nour, responsable de la formation et de la communication du CREM

Source : Ecole Polytechnique de Lausanne