Références agronomiques pour les cultures ligno-cellulosiques
L’herbe à éléphants obtient des références agronomiques qui devraient permettre son introduction sur les exploitations. C’est ce qu’a montré le colloque organisé le 29 avril à Reims par les Chambres d’agriculture de Champagne-Ardenne et de Picardie.
Certaines cultures ligno-cellulosiques, dont il est question depuis les années 2000 pour produire de l’énergie et des agro-matériaux, commencent à tenir la route sur le plan agronomique. Parmi les cultures ligno-cellulosiques à fort potentiel de productivité, destinées à produire du combustible, des agro-matériaux et des biocarburants de seconde génération, certaines commencent à avoir des références agronomiques, le miscanthus notamment. Le colloque organisé le 29 avril à Reims par les Chambres d’agriculture de Champagne-Ardenne et de Picardie a confirmé le miscanthus comme étant une culture qui est à même de produire massivement de la biomasse (12 à 15 tonnes de matière sèche à l’hectare) sur les exploitations agricoles.
Un investissement durable
Ce colloque sur les cultures de biomasse-énergie et de biomasse-matériau, qui a consisté en grande partie à rendre publiques les conclusions du programme Lidéa (introduction des cultures ligno-cellulosiques dédiées dans les exploitations agricoles), a mis en évidence l’intérêt du miscanthus, mais à condition d’établir cette plante durablement sur l’exploitation. Les présentateurs du programme Lidéa (programme labellisé par le pôle de compétitivité Industries et agro-ressources IAR) ont indiqué que l’implantation de cette culture coûte 3 000 euros par hectare, à comparer avec 200 euros pour implanter un hectare de blé. Mais une fois cette implantation réalisée, elle devient un véritable investissement, car le miscanthus est fait pour durer 15 à 20 ans, alors que le blé est une plante annuelle. L’un des agronomes présentant les références agronomiques, Guillaume Heyman, de la Chambre régionale d’agriculture de Champagne-Ardenne, a insisté sur le passage délicat de la première année : le désherbage doit être réussi pour éviter les problèmes d’adventices tout au long des 15-20 ans.
Patrick Billard, qui a constitué un groupement d’une cinquantaine de producteurs de miscanthus, Biomasse environnement systèmes SAS, dans le sud de la Seine-et-Marne, est en train de développer cette culture, en liaison avec l’Inra entre autres. Il tente de faire valider des agro-matériaux à base de miscanthus, mais «il est très difficile de franchir les Fourches caudines du CSTB», le Centre scientifique et technique du bâtiment.
Des solutions écartées pour l’instant
D’autres plantes à fort potentiel de production de biomasse ligno-cellulosique sont étudiées par les agronomes et les producteurs, comme le Switchgrass, le sorgho en dérobé et éventuellement les taillis à courte rotation de saules et de peupliers. Les références du sorgho en dérobé ne sont pas pour l’instant favorables au développement de cette plante. En dérobé, le sorgho est semé juste après la moisson du blé en juillet, puis est récolté à peine trois mois après, en octobre, au moment des semis de blé. L’implantation de cette culture n’est pas maîtrisée, parce que le sol est trop sec pour la croissance optimale de la plante. Les taillis à courte rotation commencent eux aussi à bénéficier de références agronomiques, mais de l’avis des spécialistes, ces cultures nécessitent du matériel qui relève de la production forestière, et qui contraint les producteurs à faire appel à des entreprises de travaux forestiers, sources de coûts trop importants.
20% dans l’assolement
Le miscanthus est donc pour l’heure la culture ligno-cellulosique la mieux partie pour s’étendre massivement. Les spécialistes recommandent un taux de 20% maximum de miscanthus dans l’assolement.
La raison est que les productions agricoles doivent rester tournées vers la fourniture alimentaire. La plupart des intervenants d’un débat à la fin du colloque ont mis en garde contre les errements en Allemagne ces dernières années, ce pays ayant trop misé sur la culture du maïs pour le méthaniser, au détriment des approvisionnements pour l’élevage.
Le miscanthus pourrait ainsi couvrir «raisonnablement» 120 000 hectares dans les deux régions Champagne-Ardenne et Picardie.