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Le montage financier des installations de biométhanisation en Wallonie

Article paru dans le Bioénergie International n°59 de janvier 2019

Visite de terrain à l’unité de biométhanisation d’Ochain le 22 novembre 2918, photo ValBiom

Le 22 novembre 2017, ValBiom organisait une visite de terrain à l’unité de biométhanisation d’Ochain en Wallonie autour de la thématique du montage financier. L’objectif était d’informer les porteurs de projet, les agriculteurs notamment, sur les points d’attention à ne pas négliger pour que leur dossier financier puisse être recevable.

Se renseigner et bien s’entourer

Un an après l’inauguration de son installation, Grégory Racelle, est revenu sur l’historique du montage financier de son projet et sur les conditions indispensables à réunir pour qu’un projet puisse être financé. Il était accompagné par deux représentants de BNP Paribas Fortis.

D’entrée de jeu, l’une des recommandations émises concerne l’anticipation des démarches auprès des organismes financiers. En effet, dès la conception de son projet, le porteur doit contacter ses futurs bailleurs de fonds pour s’assurer du suivi optimal de son dossier, mais aussi, pour s’assurer de remplir les multiples garanties et conditions exigées par une banque.

L’importance du type de l’installation

Après avoir financé plusieurs projets de ce type, les représentants de BNP Paribas Fortis constatent que le financement dépendra aussi de la taille de l’unité et de la technique utilisée. Ils soulignent que les installations de taille moyenne utilisant des intrants locaux auront plus de chance que les petites ou grosses installations.

L’importance des fonds propres et des subventions

En général, le financement représente entre 50 et 60 % de l’investissement, le reste étant assuré par des subventions, en général entre 10 et 20 % du coût total, et des fonds propres. Pour le projet d’Ochain, le capital de base représentait déjà près du quart du coût total du projet. La subvention régionale UDE, qui encourage les investissements ayant pour objectif la protection de l’environnement ou l’utilisation durable de l’énergie, couvrait aussi environ un quart du coût total. Le solde a donc été apporté par les crédits d’investissement et des prêts subordonnés.

Des garanties vis-à-vis des fournisseurs

Parmi les contraintes, la banque souhaite également des garanties des fournisseurs d’équipements. Elle exige d’eux des solutions techniques et des garanties engageantes. S’ils ne sont pas capables de répondre à ces demandes, elle ne pourra pas suivre, c’est dans l’intérêt de toutes les parties.

Si un contrat concerne un fournisseur dont la situation financière est fragile, ou si, en cas de panne, le technicien ne peut assurer une intervention dans les 24 heures, la banque sera hésitante.

Des garanties annexes

Par garanties annexes, on considère des hypothèques sur le site de l’exploitation, l’implication des principaux actionnaires dans le projet, des contrats avec les agriculteurs pour la fourniture d’intrants, etc. Il faut aussi un contrat clair avec le fournisseur d’électricité, la majeure partie du chiffre d’affaires d’une installation de cogénération venant de l’électricité produite et des certificats verts .

Ces dernières années, BNP Paribas Fortis constate que de plus en plus de porteurs de projet font appel à un nutritionniste professionnel afin d’avoir des connaissances précises sur leurs unités en matière de biochimie, toxicités des nutriments, production de biogaz des produits et sous-produits alimentaires, besoins nutritionnels des digesteurs, etc. Cette démarche influencera positivement le choix d’une banque.

Un crédit de maximum 10-12 ans

Au niveau du financement, BNP s’engage sur des crédits de maximum 10-12 ans pour ce type de projet dit risqué. Elle tient compte d’une part de la législation et des conditions de marché qui changent rapidement en Wallonie et d’autre part du fait que le porteur de projet aura à réaliser d’autres investissements dans le temps. Et l’expert ne va pas négliger les coûts des développements supplémentaires : changement du moteur, infrastructures ou activités annexes.

Pour conclure, les intervenants soulignent que même si de nombreux freins subsistent, la filière biométhanisation intéresse de plus en plus le secteur bancaire.

Portrait de l’unité de biométhanisation d’Ochain

Pour monter ce projet, quatre acteurs se sont associés : deux coopératives (Condroz Énergies Citoyennes et Émissions zéro), un agriculteur local (Grégory Racelle) et une entreprise liégeoise de cogénération (Coretec).

Le site de méthanisation agricole d’Ochain, photo ValBiom

Entre le début de la réflexion en 2011 et la première production d’énergie en juillet 2017, sept années auront été nécessaires. En 2016, le projet vit une étape capitale : Ochain Énergie SPRL (équivalent Sarl) devient une SCRL(société coopérative à responsabilité limitée). Un accord global est trouvé avec les financeurs (BNP – Meusinvest) et le chantier peut débuter !
Aujourd’hui, l’unité de cogénération permet de produire en électricité l’équivalent de la consommation de 1500 foyers (5,25 GWh/an). La mise en place d’un réseau de chaleur permet de chauffer le Château-home voisin.

Quant à la provenance des intrants, il s’agit de déchets agricoles collectés dans un rayon de maximum 10 km et de maïs collectés dans un rayon maximum de 20 km.

Portrait de l’unité de micro-biométhanisation d’Hamois

Pour rendre autonome sa ferme laitière, Michel Warzée a fait le choix de la micro-biométhanisation. Particularité de son installation, elle n’est pas raccordée au réseau électrique. Par conséquent, le moteur de cogénération se régule automatiquement suivant la demande de l’exploitation.

Le site de méthanisation agricole d’Hamois, photo ValBiom

Autre particularité, le propriétaire de la ferme a construit lui-même son installation. Après une première expérience non concluante avec un constructeur, Michel Warzée a en effet décidé qu’il allait se débrouiller seul. Pour limiter les frais d’entretien, l’agriculteur a fait le choix d’utiliser du matériel de première qualité pour les pièces maîtresses (pompes, moteur de cogénération, matériaux de la cuve…). Pour contrebalancer ces investissements, il a optimisé l’installation avec des échangeurs de chaleur et en utilisant une sortie du digestat par effet de vases communicants épargnant l’installation d’une pompe.

L’unité fonctionne et produit du biogaz, 24 h/24, 7 jour/7 depuis début mai 2017. Elle est actuellement dimensionnée pour une puissance de 110 kWé, mais elle est bridée aujourd’hui volontairement à 44 kWé.

Plus d’information :

Lauranne Debatty, ValBiom