L’éthanol n’expliquerait pas la crise alimentaire de 2008
Une récente étude de la Banque mondiale conclut que la financiarisation du marché agricole explique davantage la crise alimentaire de 2008 que l’impact des biocarburants.
Le document met la crise des prix des denrées de base, qui a culminé en 2008, en perspective en montrant le rôle déterminant joué par les investisseurs du monde financier.
L’étude identifie aussi une multitude de facteurs qui ont mené aux prix records de 2008 : la faiblesse passée des investissements dans le secteur des produits de base qui sont extraits du sol, un dollar faible, une expansion fiscale, une politique monétaire laxiste dans certains pays et l’activité élevée de certains fonds. Bref, les causes strictement agricoles ne sont pas citées en premier.
En même temps, l’étude admet que le climat n’a pas été favorable à cette époque, que les biocarburants ont accaparé une partie du grain et que des politiques commerciales ont mené aux stocks les plus bas depuis 30 ans. Ces conditions ont ensuite créé la spirale que l’on sait.
Le rôle des biocarburants « n’a pas été aussi grand que ce que l’on croyait au départ », mais la « financiarisation » du marché des produits agricoles est probablement un facteur important dans la poussée des prix de 2008. Les fonds indiciels seraient particulièrement en cause. Les auteurs soulignent que l’ensemble des biocarburants occupe seulement 1,5 % des terres cultivées en grain et oléagineux dans le monde. On ne peut donc pas tout expliquer avec ce phénomène.
Les auteurs admettent néanmoins que le prix de l’énergie crée probablement un prix plancher pour le maïs. La corrélation entre les deux est jugée moins forte que celle qui est observée entre l’énergie et des produits de base non alimentaires. Néanmoins, il existe un lien entre les deux prix (énergie et aliments) et un autre lien entre le prix du maïs et celui des principales autres denrées agricoles. Le rapport n’est pas concluant sur l’effet précis de ce lien.
Avenir incertain
Même si la crise économique de 2008 a fait redescendre le prix des produits de base agricoles, celui-ci est encore élevé comparé à leur niveau en l’an 2000. L’étude de la Banque Mondiale estime que le lien entre le prix de l’énergie et des autres produits de base aura une influence déterminante dans le futur, en particulier dans le secteur agricole.
Le lien expliqué plus haut entre le marché de l’énergie et celui de l’agriculture va continuer de créer une grande volatilité dans ce dernier secteur. Les auteurs de la Banque mondiale estiment donc qu’il faut se questionner sur les mesures à prendre pour minimiser l’impact négatif de cette volatilité et ne pensent pas que les stocks de réserve soient la solution. Il n’explique toutefois pas cette dernière conclusion, sauf en disant que l’histoire n’a pas été tendre envers les mesures collectives prévues pour prévenir la variabilité des prix agricoles. Ils ne proposent pas de solution alternative, mais souhaitent que plus d’études soient menées afin de mieux comprendre les facteurs qui font fluctuer les prix.
Peu d’impact des pays émergents
Contrairement à ce que de nombreux analystes affirment depuis des années, les auteurs (John Baffes et Tassos Haniotis) estiment que la demande accrue des pays émergents ne devrait pas augmenter la pression sur le prix des produits de base alimentaires.