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Réduire les émissions du bois-énergie chez les particuliers

Combustion traditionnelle de bûches, "montante", photo Frédéric Douard

Quelles solutions existe-t-il our réduire les émissions de particules du bois-énergie chez les particuliers ?  La priorité est dans le remplacement des appareils anciens, peu efficaces et polluants et le choix de combustibles de qualité.

En dehors de cela et une fois le combustible maîtrisé, deux possibilités existent pour réduire ces émissions polluantes. La première est préventive et consiste à travailler les paramètres d’émissions lors de la combustion pour les optimiser afin de réduire la quantité de particules produites. La seconde est curative et passe par l’installation de systèmes de filtration qui empêchent ces particules de se répandre dans l’atmosphère.

Les paramètres influençant les émissions sont les mêmes que ce soit pour le secteur domestique, collectif ou industriel. Ils ont été identifiés dans de nombreux travaux dont la thèse de Rabot-Querci en 2006 :

  • Les caractéristiques du combustible (taux d’humidité, granulométrie, taux de cendre…).
  • Les caractéristiques techniques des appareils de combustion (plus le rendement est important moins il pollue) : nature du foyer (distribution air, technologie de combustion…) et qualité de fonctionnement (charge de bois, temps de séjour, gestion de l’air…).
  • Les paramètres liés à l’installation.

Pour réduire les émissions, il faut « avoir une oxydation la plus complète possible à l’intérieur de la chambre de combustion, une température suffisante ainsi qu’un bon mélange ». Ainsi l’étude ANTEA de l’ADEME met en évidence que la qualité du combustible (principalement l’humidité), la bonne exploitation des installations et leurs dimensionnements (bien adaptés) sont prépondérants. « Une chaudière surdimensionnée fonctionne à faible charge avec des températures de combustion plus faibles et des émissions polluantes plus élevées.»

Suite à des études, l’Agence Fédérale de l’Environnement en Allemagne a publié en 2007 un guide à l’attention des utilisateurs du chauffage au bois. Les principales recommandations étaient :

  • Choisir un bon combustible (adapté et de bonne qualité),
  • S’assurer que le fonctionnement des appareils de chauffage est optimal,
  • Faire régulièrement l’entretien de son installation,
  • Remplacer les anciens appareils (à faible rendement).

Solution pour le chauffage individuel

Il y a encore quelques années aucune solution de filtration n’était proposée aux particuliers. Face aux alertes aux particules fines et aux pollutions causées par des appareils individuels peu performants, notamment en Suisse, le constructeur helvétique Rüegg, inventeur de la cheminée à foyer fermé dans les années 70, a mis au point le filtre à particules Zumik®on.

Adaptable sur la plupart des appareils de chauffage au bois, du poêle à la chaufferie en passant par la cheminée, Zumik®on fonctionne sur un principe électrostatique : lors de leur passage dans le conduit de fumées, les particules fines sont attirées par la paroi intérieure et s’y fixent en attendant le prochain ramonage.

Zumik®on ne change rien à l’utilisation de la cheminée mais limite l’impact sur l’environnement avec une réduction de 60 % à 90% de particules fines émises. Zumik®on a été mis au point par Rüegg, fabricant suisse de foyers pour cheminées, et l’EMPA, institut suisse de recherche sur les technologies durables. Leurs efforts viennent d’être récompensés par une reconnaissance officielle, suite à l’Ordonnance sur la protection de l’air (OPair) qui institue de nouveaux minima pour les particules fines en Suisse : Zumik®on est à ce jour le seul dispositif homologué par les autorités suisses pour la réduction des PM10 dans la catégorie des systèmes de chauffage au bois domestiques.

Zumik®on est disponible en France, via la filiale Rüegg France de Wissembourg, en Alsace. Pour Henry Spack, directeur Rüegg France, Zumik®on est une chance pour le bois-énergie :  » Les vertus écologiques du bois ne sont plus à démontrer : renouvelable, local, neutre en émission de gaz à effet de serre. Et si l’on se débarrasse du problème des particules fines, cette énergie devient parfaite ». Le filtre à particules est adapté aux foyers à bois et poêles jusqu’à 50 kW : le filtrage de 90 % a été atteint avec un poêle à granulés. Tout professionnel compétent (chauffagiste ou cheministe), peut l’installer.

Zumik®on est constitué de trois composants principaux :

  1. le filtre avec électrode et capteur thermique : cette unité compacte est montée sur le conduit de cheminée, l’électrode étant introduite dans une ouverture au centre du conduit de fumée.
  2. la conduite d’air : elle permet de refroidir les câbles et, dans certaines applications (cheminée et poêles), de maintenir le filtre dans un bon état de propreté.
  3. L’unité de régulation : selon la température de la sonde, met en marche ou stoppe le filtre ; elle fournit à l’électrode la tension optimale.

Equipée de cette nouvelle technologie, une chaudière à granulés a vu ses émissions de particules passer de 19.5 à 2,7mg/m3 ! Consommant à peine 12 W, le fonctionnement est économique. Le coût conseillé est de 1 200 euros HT et l’appareil bénéficie du crédit d’impôt lorsqu’il est vendu avec une installation neuve. « Si ce filtre peut réduire de 73% en moyenne la pollution par les PM10, l’État français ne devrait-il pas étendre les équipements pouvant bénéficier du crédit d’impôt à ce type de filtre ? ».

Solution pour le chauffage collectif et les industriels

Il existe depuis fort longtemps des solutions de traitement des fumées éprouvées pour les chaufferies de forte puissance. Le multicyclone est largement utilisé comme filtre de base et permet de respecter un seuil de 150 mg/Nm3 de particules. Pour descendre plus bas en taux les électrofiltres (EF) et filtres à manche (FAM) permettent d’atteindre des émissions de poussières de inférieures à 10 mg/Nm3.

Les principes de fonctionnement.

Pour les multicyclones, les fumées chargées de poussières subissent un mouvement de rotation en pénétrant dans une batterie de tubes à base conique (cyclones). Ce phénomène crée une force centrifuge qui s’exerce sur les particules qui sont projetées sur les parois et tombent à la base des cyclones dans des cendriers. Ce sont des appareils simples et fiables. Les filtres à manche sont constitués de plusieurs cellules de filtration constituées chacune de rangées de manches filtrants en feutre ou en tissu. Les particules s’accumulent en gâteau sur ces filtres. Ils sont nettoyés automatiquement par air comprimé et les poussières sont stockées dans des trémies sous les filtres. Leur avantage est que le rendement de filtration ne change pas avec la quantité de poussières dans les gaz. Dans le cas des électrofiltres, les fumées circulent entre des plaques métalliques verticales de grandes dimensions. Une différence de potentiel est générée entre ces électrodes réceptives par un générateur électrique. Les particules (chargées par des ions) sont attirées par ces plaques. Un système de nettoyage automatique (par marteaux) fait tomber les poussières accumulées sur les électrodes dans des trémies. Ils présentent l’avantage de garder de bonnes performances pour les particules de petites tailles (rendement de 95% pour les PM1,0).

L’ADEME a commandé une étude sur « l’évaluation technique, environnementale et économique des techniques disponibles de dépoussiérage pour les chaufferies industrielles et collectives de puissance thermique inférieure à 4 MW ». Les conclusions de cette étude sont : « Si la mise en place de l’un ou l’autre des systèmes est techniquement faisable jusqu’à des puissances utiles d’environ 500 kW et permet d’aller bien au-delà des exigences réglementaires quand elles existent, le choix d’y recourir (ou non) résulte nécessairement d’un compromis entre les performances environnementales et les coûts. Cette étude montre d’une part que pour les chaudières de puissance utile comprise entre 1,2 et 3,2 MW, le surcoût d’investissement d’un filtre à manches ou d’un électrofiltre est évalué entre 20 et 30% du coût de référence d’une chaudière bois, pour un bénéfice environnemental réel. A l’inverse, pour les chaudières de puissance utile inférieure à 1,2 MW, ce surcoût peut atteindre jusqu’à 65% du coût de référence de chaudières bois, au regard d’un gain environnemental plus limité. D’autre part, le filtre à manches, moins encombrant que l’électrofiltre, peut atteindre de meilleurs niveaux de performance, ainsi qu’un montant d’investissement moins élevé pour un même niveau d’émission de poussières, mais présente un risque incendie sensiblement élevé contrairement à l’électrofiltre. Pour les chaudières de puissance inférieure à 1,2 MW, l’évaluation environnementale et économique avantage le filtre à manches par rapport à l’électrofiltre. »

Conclusion

Il est largement admis que le bois-énergie contribue à la pollution atmosphérique en particulier avec des technologies anciennes et il est clair qu’il est indispensable de réduire ces émissions  afin de préserver les atouts environnementaux de cette filière.

Un travail de fond doit être entrepris pour permettre à la fois de réduire les émissions sur le long terme mais aussi de pouvoir agir efficacement en cas de dépassements de « seuils d’alerte ». Les experts (des bioénergies et de la qualité de l’air) s’accordent sur le fait qu’il faut développer plusieurs axes d’amélioration simultanément que sont :

  1. le renforcement des connaissances sur les émissions atmosphériques,
  2. le remplacement du parc d’appareils de chauffages au bois individuels anciens à faible rendement,
  3. l’information des particuliers sur l’importance d’une bonne combustion et de la provenance du bois utilisé dans les foyers domestiques pour réduire les émissions,
  4. la sensibilisation des professionnels à l’importance du dimensionnement des installations,
  5. l’amélioration et l’utilisation des systèmes de filtrations des émissions,
  6. l’encadrement le développement de la biomasse énergie avec des outils financiers et réglementaires.

Bioénergie International, avril 2008