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Des critères de durabilité irréalistes vont-ils réduire à néant tous les atouts de la biomasse-énergie ?

Editorial du Bioénergie International n°50 de juillet-août 2017

La commercialisation des sous-produits forestiers permet de financer la sylviculture menant à la production de bois d’oeuvre de qualité, photo Frédéric Douard

La commercialisation des sous-produits forestiers permet de financer la sylviculture menant à la production de bois d’oeuvre de qualité, photo Frédéric Douard

Un rapport européen paru le 8 juin 2017 menace la réalisation des objectifs climatiques et énergétiques de l’Union Européenne et la viabilité toute entière du secteur forestier en Europe. Il s’agit du projet de rapport au Parlement européen présenté par le député européen Bas Eickhout sur les critères de durabilité de la biomasse forestière. Les propriétaires et les gestionnaires de forêts en Europe sont profondément préoccupés et réagissent. Fransylva, la Fédération nationale des syndicats des forestiers privés de France, s’en fait ici le porte-parole et attire l’attention sur trois dangers.

La parole à Fransylva, Fédération nationale des syndicats des forestiers privés de France

Danger n°1 : ignorer les critères de durabilité nationaux et européens

Le rapport d’Eickhout ignore la réalité et met en danger tout le secteur forestier. Il propose une liste arbitrairement établie de types de biomasses forestières qui seraient considérées comme durables, faisant fi de toutes les législations nationales et européennes existantes sur la gestion durable des forêts.

« Essayons de comprendre le raisonnement de M. Eickhout : la biomasse issue de forêts gérées durablement, destinée à l’énergie ne serait pas suffisamment durable. Il faudrait légiférer davantage pour limiter certains types de biomasse à l’usage énergétique… On marche sur la tête ! » s’indigne Antoine d’Amécourt, président de Fransylva.

Danger n°2 : rompre le cercle vertueux de la complémentarité des usages en forêt

La mise en œuvre du principe de l’utilisation en cascade voulue par la directive est irréaliste sur le terrain. Ces suggestions montrent un manque fondamental de compréhension du cycle de production forestière caractérise par une utilisation interdépendante et intégrée de toutes les parties de l’arbre pour de nombreuses utilisations finales. En matière de foresterie, c’est le marché qui garantit que le bois de haute qualité est utilisé pour la production de produits à forte valeur ajoutée par les industries du bois, tandis que les résidus, les sous-produits et les produits de faible qualité fournissent la production de bioénergie.

Les forestiers ont besoin de débouchés complémentaires comme la biomasse pour conduire une sylviculture durable au profit de bois à destination de haute valeur ajoutée. Cette biomasse est fournie, entre autres, par des millions de propriétaires forestiers principalement à petite échelle qui ont besoin d’un revenu diversifié de leurs forêts.

« Si M. Eickhout avait pris le temps de discuter avec les personnes concernées et ceux qui mettent en place une gestion durable des forêts tous les jours, il aurait pu arriver à une proposition plus crédible » ajoute Antoine d’Amécourt.

Danger n°3 : freiner les ambitions européennes de décarbonation de son économie

Les propositions envisagées dans le rapport de M. Eickhout mettraient en danger toute offre de biomasse durable de l’UE pour le secteur de la bioénergie, qui représente aujourd’hui 95 % de la biomasse provenant des forêts de l’UE. Lorsque les États-Unis quittent l’accord de Paris il est plus important que jamais que l’UE reste un leader sur le climat et défende une politique judicieuse fondée sur les faits. Le rapport de M. Eickhout est un exemple clair d’ambition qui a mal tourné et n’a aucun lien avec la réalité du terrain. Nous ne devrions pas restreindre les utilisations de la biomasse forestière, mais nous devrions soutenir un développement économiquement viable d’une bioéconomie durable. La bioénergie joue un rôle important ici, tant pour atteindre les objectifs climatiques que pour soutenir un secteur forestier durable.

Contact : www.fransylva.fr