Biomasse : un développement modéré malgré des perspectives séduisantes
Présentée comme une alternative aux énergies fossiles, la biomasse est une source d’énergie essentielle pour l’atteinte des objectifs environnementaux européens. Où en est le développement de ce formidable réservoir d’énergie ? Malgré les investissements, pourquoi avons-nous le sentiment qu’elle est sous exploitée en France ?
Un atout majeur au développement durable
La biomasse représente l’ensemble des matières organiques végétales ou animales, exploitables à des fins énergétiques :
- biomasse solide : le bois brut (bois énergie) et ses dérivés (déchets de bois, paille, …)
- biomasse liquide : issue des plantes (huile colza, huile de tournesol, …)
- biogaz : issu de la méthanisation, naturelle ou industrielle.
Elle est utilisée comme source d’énergie thermique (chauffage), électrique (cogénération) et pour les biocarburants (éthanol).
C’est la première source d’énergie renouvelable en France, sans risque de pénurie à plus ou moins long terme : environ 18 millions de tonnes équivalent pétrole (1) sont produites par an à partir des énergies renouvelables, dont 2/3 à partir de la biomasse. Son bilan CO2 est considéré quasi-neutre : la quantité de CO2 rejetée par l’utilisation de la biomasse (combustion, …) correspond à la quantité fixée durant la croissance des éléments organiques (arbres, plantes,…).
Un contexte favorable en France mais une utilisation contrastée
La biomasse répond à environ 4% de la demande en énergie des pays développés alors que ce taux grimpe à 40% dans les pays en développement.
Le cas de la France est des plus paradoxaux :
Sa filière bois constitue le second déficit commercial national après le pétrole bien qu’un tiers du territoire soit recouvert de forêt. Quatrième importateur mondial, elle peine à valoriser ses propres ressources en bois et produits dérivés.
Son taux de prélèvement de bois est inférieur à son taux de renouvellement (61 millions de m3 prélevés contre un accroissement biologique de 81 millions de m3 par an).
La France semble incapable d’exploiter ses forêts pour répondre à la demande industrielle.
La forêt française s’accroît de 0,4% par an :
De plus, malgré la crise économique, la situation reste propice au développement des énergies renouvelables :
– de part la mise en place de directives françaises et européennes :
- inclure 20% d’énergie renouvelable d’ici 2020 dans la consommation énergétique des 27 pays-membres de l’UE ;
- augmenter de 50% la production de chaleur d’origine renouvelable ;
- réduire la TVA sur l’abonnement et sur la fourniture de chaleur produite à partir d’énergie renouvelable.
– et plus particulièrement pour la biomasse au travers des interventions gouvernementales qui en résultent :
- lancement d’un second appel d’offre pour le développement de centrales électriques à la biomasse. L’objectif est d’atteindre d’ici 2010 une puissance cumulée de 1000 mégawatts à partir de ce type de centrale ;
- lancement en 2009 d’un troisième appel à projet de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE 3) pour le rachat par l’Etat de l’électricité générée par des installations de cogénération qui pourront fonctionner à la biomasse ;
- création du « fond chaleur », destiné à soutenir la construction des chaufferies collectives utilisant les énergies renouvelables.
Le contexte est favorable au développement des énergies renouvelables. Les ressources biomasse sont présentes dans les pays développés mais son utilisation reste faible, en particulier en France.
La gestion des ressources primaires : un frein au développement
L’utilisation de la biomasse présente des avantages indéniables à tous les points de vue :
– énergétique : le potentiel biomasse dans la communauté européenne serait de 300 Mtep. Elle pourrait répondre aux besoins en énergie de 100 millions de foyers, soit 15% des besoins énergétiques des pays de la communauté européenne ;
– économique et social : baisse des importations de pétrole, création d’emploi ;
– environnemental : réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Cependant le manque de gestion des ressources est un obstacle majeur au bon développement de cette filière, en particulier en ce qui concerne l’exploitation forestière.
Tout d’abord, on constate un manque de visibilité réel sur les conséquences d’une utilisation à grande échelle. Les impacts sur la biodiversité et les sols ne sont pas évalués. Ensuite, alors que de nombreux industriels ou collectivités locales sont prêts à l’utiliser, ils ne peuvent qu’être effrayés par les dégâts de la surexploitation dans certains pays, comme le Brésil. Aucun cadre réglementaire ne permet d’exploiter sans risque les forêts.
L’absence de cadre réglementaire sur l’utilisation des ressources primaires, en particulier le bois énergie, explique la réticence des énergéticiens, fabricants de chaudière à investir dans le secteur de la biomasse. Si son utilisation semble maîtrisée au niveau de la production d’énergie, il est nécessaire de définir clairement les règles d’approvisionnement (mise en place d’organisation dédiée, lois, …). La mise en place de directives pour l’exploitation durable des forêts est une condition indispensable au plein essor de cette filière.
Source : Sia Conseil, septembre 2009