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Impacts sur l’eau du développement des biocarburants à l’horizon 2030

Le développement des biocarburants pose des questions importantes du point de vue de leurs impacts potentiels sur l’environnement. Outre les bilans énergétiques et en termes de gaz à effet de serre, la mesure des impacts sur les milieux aquatiques constitue un enjeu majeur de l’évaluation des filières biocarburants, à l’heure où la directive cadre européenne sur l’eau impose d’atteindre le « bon état écologique » des cours d’eau et des nappes souterraines.

La présente étude réalisée par l’IFP et le Laboratoire Trèfle, avec le soutien financier des agences de l’eau Adour-Garonne et Seine-Normandie, de Total et de Veolia Environnement, vise à mesurer l’influence du développement de certaines cultures destinées à la production de biocarburants sur les ressources en eau, tant en termes de quantité que de qualité. De portée nationale, l’étude s’attache en particulier aux cas de deux grands bassins hydrographiques, Adour-Garonne et Seine Normandie.

L’étude s’appuie sur 4 scénarios, élaborés à l’horizon 2030, qui diffèrent significativement tant par les niveaux de production de biocarburants que les filières technologiques impliquées, ainsi que par le niveau de protection des ressources en eau. Deux d’entre eux envisagent la production de biocarburants de 1re génération et les deux autres concernent la production de biocarburants de 2e génération, le 4e étant un scénario de « production durable » qui contraint les choix de filières et les pratiques pour limiter les pressions potentielles sur l’eau.

Un certain nombre d’indicateurs ont été retenus en vue de mesurer les niveaux de pression en termes de :

  • quantité d’eau prélevée (prélèvements annuels, déficit hydrique d’étiage, drainage, etc.)
  • pollution par les nitrates (concentration en nitrates sous racinaires, fuites d’azote)
  • pollution par les produits phytosanitaires (indice de fréquence de traitement, potentiel de contamination des eaux par type de substances avec l’outils SIRIS-Pesticides)

Les effets induits par la conversion des sols sur les niveaux de pression ont fait l’objet de comparaisons, entre la situation en 2030 proposée par les 4 scénarios et la situation initiale de 2006.

Le choix des terres pour l’implantation de cultures destinées à la production de biocarburants en 2030 a été réalisé à partir d’une évaluation des surfaces considérées comme mobilisables sur chacun des deux bassins d’étude. Ces surfaces mobilisables sont exclusivement agricoles et choisies de manière à minimiser la compétition avec l’alimentaire : surfaces initialement utilisées pour la production de biocarburants en 2006, surfaces non exploitées (friches, jachères, bandes enherbées), surfaces d’export hors Union européenne, terres de cultures en déclin, etc.

Les cultures conventionnelles sur lesquelles s’appuie la production de biocarburants de 1re génération sont le colza, le blé, la betterave et le maïs. Les biocarburants de 2e génération sont issus de cultures lignocellulosiques comme les taillis à courte rotation, le miscanthus ou le switchgrass, de cultures pluriannuelles comme la luzerne, ou de cultures annuelles comme le sorgho ou le triticale.

Quel que soit le scénario, les résultats révèlent que les impacts sur l’eau sont très dépendants des pratiques agricoles et conduisent, dans la plupart des cas, à une augmentation des pressions quantitatives et qualitatives sur les milieux. Mais le scénario « production durable », qui combine l’objectif « énergie » avec celui de la préservation des ressources en eau, et bien que très ambitieux sur l’étendue des surfaces allouées, tend à prouver qu’une gestion tenant compte des ressources en eau (choix d’espèces les plus sobres, choix des sols, diversification des cultures, etc.) peut avoir des impacts positifs sur l’état des milieux aquatiques. Moyennant une réduction des niveaux de production attendus, le déploiement d’un tel scénario peut même conduire à l’amélioration de l’état des ressources en eau de façon sensible à l’échelle des grands bassins étudiés.

Cette étude prospective confirme que l’impact sur l’eau de la production de biocarburants constitue l’un des critères essentiels à prendre en compte dans le choix de développement de filières biomasse plus durables. Outre qu’elle préfigure des préconisations aux décideurs, cette étude montre que l’influence des bioénergies sur la dégradation, ou au contraire sur l’amélioration de l’état des ressources en eau, semble pouvoir être anticipée à l’échelle des grands bassins.

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