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Les écosystèmes africains absorberaient plus de carbone qu’ils n’en émettent

Mesures de biomasse en forêt naturelle - Ghana © M. Henry

Ce constat est l’un des principaux résultats du projet européen CarboAfrica. Pendant plus de 3 ans, et avec la participation du Cirad, CarboAfrica s’est intéressé au cycle du CO2 du continent. Les connaissances accumulées offriront de précieuses clés aux pays africains pour participer aux négociations internationales sur le climat.

À l’heure de la finance carbone et des négociations internationales sur le climat, les pays d’Afrique ont bien du mal à faire entendre leur voix. Car le bilan CO2 du continent est longtemps resté la grande inconnue du changement climatique global. Pour y remédier le projet européen CarboAfrica, démarré fin 2006, a contribué à décrypter le cycle du carbone à l’œuvre dans différents écosystèmes africains. Il vient de se terminer après 3 ans et demi de travail impliquant 11 pays subsahariens et 15 organisations européennes et africaines, dont le Cirad. Le tout pour un budget de 2,8 millions d’euros.

Tour à flux en forêt d'eucalyptus - Congo © Cirad, Y. Nouvellon

L’Afrique, un puits de carbone

« Au départ, on ne savait même pas si les écosystèmes africains étaient des puits de carbone ou des sources, notamment à cause des feux réguliers qui parcourent le continent, » résume Laurent Saint-André, spécialiste des écosystèmes forestiers au Cirad. D’ores et déjà, les premiers résultats indiquent que les écosystèmes du continent stockeraient plus de CO2 qu’ils n’en rejettent. Une bonne nouvelle. Pourtant, l’Afrique est, et sera à coup sûr, la zone la plus touchée par le réchauffement climatique pour des raisons écologiques mais surtout socio-économiques. Il était donc urgent de s’intéresser au cycle du carbone émis par le continent noir. CarboAfrica a mis en place le premier réseau de mesure des émissions carbone sur le continent. Des dispositifs appelés « tours à flux » calculent la quantité de gaz échangée entre un écosystème et l’atmosphère. Grâce à ces tours et à des expérimentations connexes, il est désormais possible de suivre en continu le devenir du CO2 dans une savane, une forêt plantée ou naturelle.

Favoriser les mécanismes de développement propre

Le Cirad a coordonné le sixième groupe de travail du projet. L’objectif de celui-ci était d’évaluer le potentiel de séquestration de carbone via des mécanismes de développement propre (MDP) ainsi que les possibilités de réduction des émissions dues au déboisement et à la déforestation (REDD). Pour ces deux outils de la finance carbone, les chercheurs ont élaboré des procédures standards pour la quantification des stocks et des flux de carbone dans les écosystèmes forestiers. Ces procédures vont donner lieu à une vingtaine de publications qui compléteront les référentiels de l’UNFCCC (United Nations Framework Convention on Climate Change). Un progrès considérable car « les MDP sont plutôt rares en Afrique à cause du manque de connaissances sur le bilan carbone des milieux » explique Laurent Saint-André. Le scientifique et ses collègues ont, entre autres, travaillé sur une plantation d’eucalyptus près de Pointe Noire au Congo. Selon leurs estimations, cet écosystème cultivé stocke en moyenne 38 tonnes de carbone à l’hectare de plus que le milieu initial, en l’occurrence, la savane côtière. Ce massif est aussi une source d’énergie durable pour les habitants de Pointe-Noire, il contribue ainsi à limiter la déforestation des forêts naturelles alentours. Bref, dans ce contexte précis, l’extension de la plantation d’eucalyptus pourrait remplir les conditions pour être financée par un MDP.

Capteurs de CO2 et H2O au sommet d'une tour à flux en forêt d'eucalyptus - Congo © Cirad, Y. Nouvellon

Transmettre les connaissances

Les responsables de CarboAfrica espèrent prolonger de quelques mois le projet afin de consolider et de valoriser les résultats en vue d’une utilisation par la communauté internationale. « Cette étape est indispensable pour que le fruit de notre travail serve aux décideurs et aux personnels techniques dans le but initier des projets tels que les MDP ou les programmes REDD », souligne pour finir Laurent de Saint André.

Six groupes de travail pour un même but

Le groupe 1 a centralisé les mesures des 18 tours à flux et homogénéisé les données récoltées.
Le groupe 2 a coordonné des expérimentations ciblées pour mieux comprendre les processus liés aux échanges de gaz à effet de serre (GES) dans différents écosystèmes.
Le groupe 3 a modélisé les flux de carbone à l’échelle régionale et continentale.
Le groupe 4 s’est focalisé sur les feux de savane pour quantifier les émissions de GES dues à ces pratiques traditionnelles.
Le groupe 5 s’est consacré à la diffusion des connaissances accumulées tout au long du projet grâce à des conférences internationales et des formations.
Le groupe 6, coordonné par le Cirad, avait pour but d’évaluer le potentiel de séquestration de carbone via des MDP ainsi que les possibilités de réduction des émissions dues à la déforestation (REDD).

Source : CIRAD 9 juin 2010

Pour en savoir plus sur le projet CARBOAFRICA