France, une politique soi-disant en faveur de l’électricité biomasse
A l’occasion de la parution de son Atlas 2014 des centrales de production d’électricité par la biomasse solide, le magazine Bioénergie International s’interroge dans l’éditorial de son numéro 31 de mai-juin 2014, sur la volonté réelle de la France à vouloir développer ce mode de production.
La Commission de régulation de l’énergie (CRE) publiait le 17 avril 2014 un rapport d’analyse sur les coûts et la rentabilité des filières d’électricité renouvelable en France métropolitaine. Ce rapport rappelle malheureusement le manque d’efficacité, d’aucuns diraient d’ambition réelle, de la politique française en la matière.
En France, l’obligation d’achat est le principal dispositif de soutien à l’électricité renouvelable. Tout producteur peut demander à EDF ou à un distributeur d’énergie, d’acheter tout ou partie de sa production au tarif fixé par l’État. Jusqu’en 2011, ces tarifs d’achat étaient si ridicules (50€/MWhé), que quasiment aucun projet n’a vu le jour. Ils ont été revalorisés en janvier 2011 par l’adjonction de primes, sauf que ces primes ne sont accessibles qu’aux installations de plus de 5MWé. Résultat : à fin 2012, seules 4 installations fonctionnaient sous ce régime pour moins de 30 MWé cumulés.
Et comme ça ne marchait (forcément) pas, à l’approche des engagements européens de 2020, l’État, pour faire bonne figure, a donné à la CRE la possibilité de lancer des appels d’offres, ce qu’elle a fait de 2003 à 2010. Résultat : les quatre appels d’offres successifs n’ont permis de mettre en service à fin 2013, que 24 projets, sur les 81 retenus, pour une puissance cumulée de 280 MWé, des chiffres dérisoires au regard du potentiel de la première énergie renouvelable de France.
Dans son rapport, la CRE reconnait un « développement irrégulier de la filière biomasse ». Ce que ne dit pas la CRE, c’est que le seuil minimum de 5 MWé est un frein majeur à cette politique. Pourtant, en Allemagne, un pays qui sert souvent d’exemple au gouvernement français, une étude du centre allemand de recherche sur la biomasse (DBFZ, Leipzig, Saxe), montrait que les deux tiers du potentiel de cogénération à biomasse solide, se situent dans des puissances inférieures à 5 MWé.
Et l’analyse de la CRE se poursuit très brièvement ainsi : « L’appel d’offres pourrait constituer un mécanisme efficace pour développer des installations avec une rentabilité raisonnable, dès lors qu’il prend en compte leur dimension régionale. Un tarif d’achat régionalisé, comportant des clauses contraignantes en matière notamment de contrôle des plans d’approvisionnement de l’installation, pourrait également constituer une solution appropriée …»
Nous rêvons ! Les contraintes de puissances sont déjà tellement contraignantes, qu’avec l’ajout de contraintes locales, il est absolument certain, à l’image de ce qui se passe pour les dossiers éoliens, qu’il ne se passera plus rien du tout, et au final, on est en droit de se demander, si l’objectif recherché n’est justement pas là !
Pourtant certaines contraintes sont indispensables, telle l’efficacité énergétique, qui est l’un des piliers du développement durable. Pourtant, de nombreux projets CRE n’ont pas brillé de ce point de vue : une obligation d’efficacité bien basse au départ n’a pas favorisé la performance, et la dérogation exceptionnelle, accordée au projet de Gardanne, qui n’est pas une cogénération, ne donnent pas l’image la plus vertueuse possible du bois-énergie ni de cette gouvernance du développement.
Frédéric Douard
>> Lien vers le rapport complet de la CRE
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