Ennesys, cultiver des micro-algues pour produire de l’énergie
Interview de Christine GRIMAULT, Directrice du développement chez Ennesys, publiée dans le Lettre du pôle de compétitivité Trimatec n°17 de Juin 2013
Quelle est l’activité d’Ennesys ?
Notre métier est de cultiver des micro-algues pour produire de l’énergie en dépolluant les eaux usées, grâce à des éco-systèmes que nous installons sur les bâtiments ou industries rejetant des eaux polluées.
Quand la société a t-elle été créée et quel est son effectif ?
Ennesys a été créée en septembre 2010. Après avoir été incubée sur le plateau de Saclay, nous avons installé la société à Nanterre dans un bâtiment mis à disposition par l’EPADESA (Etablissement Public d’Aménagement de La Défense Seine Arche) où nous développons un premier démonstrateur de notre technologie à échelle d’un bâtiment et en conditions climatiques réelles. Nous avons déjà installé en terrasse du bâtiment des photobioréacteurs (bassins de culture) dans lesquels sont réalisées les cultures de micro-algues et avons lancé la fabrication de la façade qui devrait maintenant être posée sous trois mois. C’est aussi dans ce bâtiment que nous avons transféré notre laboratoire scientifique où n ous travaillons à la sélection des souches d’algues.
L’équipe est actuellement composée des trois associés fondateurs, de 3 ingénieurs système, 1 ingénieur biologiste et de stagiaires et s’appuie sur un comité stratégique composé d’experts tels le Docteur Rhadidja Romari ou Philippe Hachin, directeur immobilier d’Areva.
Quels principaux marchés sont adressés par Ennesys ?
Nous visons deux marchés prioritaires : celui du bâtiment à énergie positive et celui du traitement local des eaux polluées.
Dans le premier cas, notre système permet de transformer un bâtiment en une mini-centrale de dépollution et de production d’énergie, avec un bilan carbone neutre. Explication : on utilise les éléments minéraux contenus dans les eaux usées pour nourrir des micro-algues cultivées dans des systèmes étanches tubulaires ou des bassins de culture plats. A maturité, nous récoltons ces micro-algues et les faisons maturer dans des cuves en y associant des déchets organiques pour accroître leur densité. A l’issue de cette double phase de croissance, l’eau et la biomasse algale, qui a une valeur énergétique identique à celle du charbon, sont séparées. En fonction des objectifs énergétiques finaux, nous pouvons extraire de l’huile végétale de la biomasse pour la transformer en électricité ou brûler la biomasse pour produire de l’énergie. En fin de cycle, l’eau qui a été débarrassée de ses polluants (absorbés par les micro-algues) affiche les caractéristiques exigées pour être réutilisée à des fins de nettoyage ou réacheminée dans le circuit des chasse-d’eau.
Notre solution présente donc des atouts certains. Non seulement, dans le cadre des réglementations actuelles et à venir en matière de construction durable (à partir de 2020, tous les bâtiments neufs devront produire plus d’énergie qu’ils n’en consomment), mais surtout au plan économique, car nos systèmes transforment des ressources négatives (eaux polluées et CO2) en ressources positives (énergie et eau propre).
Le second marché porteur pour Ennesys concerne la dépollution des eaux souillées. Nous nous adressons ici à des industries qui rejettent des eaux polluées, par exemple les papetiers ou les industriels de l’agro-alimentaire. Dans ce domaine, la société a déjà reçu de nombreuses sollicitations venant de l’international, notamment de pays comme le Brésil, ou l’Afrique du Sud.
Quels objectifs de développement se donne Ennesys ?
Nous voulons industrialiser les systèmes pour diminuer les coûts d’installation en termes de façades et de circuits hydrauliques.
Au plan commercial, notre objectif est, à court terme, de nous structurer pour répondre à la demande croissante d’études de dimensionnement et d’installation de nos systèmes qui nous provient aussi bien de France que de l’étranger. En effet, le potentiel de notre système intéresse de très nombreux pays : ceux qui disposent d’énergie mais ont un besoin important de recyclage de l’eau comme Israël, l’Algérie, le Brésil … ceux qui ont des ressources en eau mais souhaitent gagner en indépendance énergétique.
Pouvez-vous nous présenter vos projets innovants ?
L’innovation est un axe constant de la stratégie d’Ennesys. Nous posons d’ailleurs 4 nouveaux brevets avant la fin de l’année.
Notre objectif prioritaire est d’optimiser le rendement de production des micro-algues. Cela passe par exemple par la recherche d’espèces adaptées à différents climats ou encore par la mise en place d’un double procédé de culture…
Autre étude menée par Ennesys : la rénovation des bureaux des Tours Mercuriales construites en 1976 à Bagnolet. Nos premiers résultats montrent que le système d’Ennesys permettrait de produire 98% de l’énergie dont le bâtiment a besoin.
Que vous apporte le pôle Trimatec ?
L’activité d’Ennesys se situe dans une filière émergente en France, celle des micro-algues. Trimatec travaille à la structuration de cet écosystème et au nécessaire lobbying pour promouvoir les potentialités liées à la production et à la valorisation des micro-algues. Nous partageons la même vision que Trimatec sur le développement de cette filière de croissance.
En savoir plus : www.ennesys.com et www.pole-trimatec.fr