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Carburants cellulosiques, optimiser la dégradation du xylane grâce à une bactérie

Structure d'une Caldanaerobius polysaccharolyticus, illustration proteopedia

http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/71759.htm

Le xylane, polymère de xylose, est le principal composant des hémicelluloses qui est un type de polysaccharides complexes que l’on trouve dans les parois des cellules végétales et de certaines algues, en particulier les macrophytes du genre siphonous. Le xylane est presque aussi répandu que la cellulose dans les parois cellulaires végétales. Il est également utilisé comme complément nutritionnel incorporé dans l’alimentation humaine et animale.

Ainsi, le xylane est la seconde source de biomasse la plus abondante sur la planète. Il peut potentiellement être utilisée pour produire des biocarburants dits « avancés » (cette catégorie inclut les biocarburants cellulosiques et le biodiesel). Cependant, une des raisons pour laquelle la production de biocarburants reste coûteuse réside dans le fait que les micro-organismes utilisés pour la fermentation de la biomasse ne peuvent pas réaliser une transformation efficace de l’hémicellulose et du xylane. Utilisant ainsi moins de la moitié du matériel végétal disponible, ils convertissent principalement le glucose contenu dans la cellulose.

Deux études récentes se sont attachées à étudier les processus possibles d’extraction et de dégradation du xylane en vue de métaboliser l’hémicellulose disponible dans les végétaux en biocarburant.

Extraction et transformation du xylane du riz

L’étape d’extraction du xylane des parois végétales représente un frein à l’optimisation de son utilisation. Une nouvelle étude, publiée en août dernier dans le journal Proceedings of the National Academy of Sciences [1], indique que des scientifiques ont passé un cap avec l’identification d’un gène chez le riz, nommé XAX1, et dont la suppression améliore l’extraction du xylane et le libération totale des xyloses, présents dans le xylane.

Ce travail a été mené par l’Institut des Bioénergies (Joint BioEnergy Institute) en Californie, sous tutelle du Département Américain de l’Energie (DOE), en collaboration avec l’équipe du Dr Henrik V. Scheller, chercheur au Laboratoire National Lawrence Berkeley (LBNL) en Californie.

Les chercheurs ont travaillé avec un plant de riz génétiquement modifié, nommé xax1, dans lequel le gène XAX1 a été enlevé. Ce gène est connu pour permettre l’ajout d’un sucre xylose aux substitutions arabinose présentes sur la chaîne du xylane. Cet ajout crée de nouveaux liens entre le xylane et la lignine, et rend, par conséquent, les parois cellulaires végétales plus résistantes et complexes à détériorer pour en extraire les sucres. Lors de la suppression de ce gène, l’étude a montré qu’il y avait moins de liaisons transversales avec la lignine, ce qui améliore l’extraction du xylane et la libération des xyloses, plus accessibles pour être dégradés.

Les résultats ont montré que le xylane était plus facilement extractible et que la dégradation des glucides en sucres simples était augmentée de 60% comparativement à un plant de riz non modifié.

Des enzymes et des protéines qui dégradent le xylane

Isaac Cann et Ron Mackie, microbiologistes à l’Université de l’Illinois à Urbana-Champaign, en partenariat avec le LBNL, et dans le cadre du programme soutenu par l’entreprise BP, ont réalisé des travaux de recherche en collaboration avec l’Institut des Sciences de l’Energie (Energy Biosciences Institute) sur la bactérie Caldanaerobius polysaccharolyticus afin d’optimiser la dégradation des sucres cellulaires issus du xylane. Cette étude, intitulée « Compréhension de la biochimie et de la structure du xylane par l’utilisation d’une bactérie saccharolytique, thermophile Bacterium Caldanaerobius« , a été publiée en octobre dernier dans la revue The Journal of Biological Chemistry [2].

Cette bactérie contient toutes les protéines et les enzymes nécessaires pour dégrader et métaboliser le xylane. Une enzyme hydrolytique spécifique (Xyn10A) permet d’enlever les chaines latérales présentes à la surface du xylane. Par la suite, la protéine XBP1 va transporter cette nouvelle molécule au coeur de la cellule microbienne où d’autres enzymes vont pouvoir atteindre les sucres présents afin de les dégrader en sucres simples qui seront ensuite métabolisés.

Un autre avantage de cette bactérie est qu’elle est thermophile (elle survit à des températures de plus de 100°C) et ses enzymes sont résistantes et actives à des températures de plus de 70°C. Les procédés de fermentation, dont ceux utilisés pour la production de biocarburant, sont généralement réalisés à 37°C, température à laquelle la majorité des bactéries se développent. Les problèmes de contamination du milieu sont donc fréquents. La possibilité de conduire un procédé de fermentation à une température supérieure à 37°C, grâce à l’utilisation de cette souche de bactérie, permettrait donc de réduire ce risque.

Les scientifiques, jusqu’à aujourd’hui, prenaient des éléments de plusieurs gènes différents, les assemblaient puis les intégraient dans un vecteur, afin de créer un micro-organisme capable de dégrader le xylane. Avec cette découverte, il suffirait de prendre le fragment du génome de cette bactérie, qui contient toutes les protéines et enzymes nécessaires, puis de l’intégrer dans un micro-organisme, qui dégrade naturellement la cellulose, afin de dégrader l’hémicellulose ainsi que la cellulose des cellules végétales. La prochaine étape de ce programme est donc de développer des techniques pour transférer ce « cluster » de gènes au sein d’autres micro-organismes.

Notes :

Origine : BE Etats-Unis numéro 313 (18/12/2012) – Ambassade de France aux Etats-Unis / ADIT – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/71759.htm