Le retour de la valorisation énergétique des déchets au Royaume-Uni
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Le 2 octobre 2012, le gouvernement britannique a donné son feu vert à la construction d’une centrale électrique à Lostock dans le Cheshire, qui permettra de produire de l’énergie à partir de déchets. Projet soutenu par les compagnies Tata Chemicals et E.ON, cette centrale sera la deuxième dans son genre à voir le jour dans la région, quelques années seulement après la construction de la centrale de Runcorn (développée par Viridor, en partenariat avec INEOS ChlorVinyls et le Greater Manchester Waste Disposal Authority, Autorité de traitement des déchets de Manchester), qui devrait entrer en fonctionnement début 2013.
Cette centrale, dont la construction coûtera 250 M£ et d’une capacité de 60 MWé, devrait pouvoir fournir de l’électricité à 80.000 habitations locales. L’accord du gouvernement fait suite à une enquête publique d’un an effectuée par le Department for Energy and Climate Change (DECC,Ministère de l’énergie et du changement climatique), afin de répondre aux inquiétudes reposant sur l’impact potentiel sur la santé, le paysage, mais également les implications sur la sûreté du trafic routier dans cette zone ainsi que l’environnement local. Tata Chemicals a annoncé que la construction devrait débuter en 2013, pour une mise en fonctionnement prévue vers la fin 2016.
Un représentant du DECC a énoncé dans une déclaration que « cette centrale permet de transformer des déchets en quelque chose de précieux – suffisamment d’énergie pour approvisionner 80.000 maisons – tout en créant des emplois pour la communauté locale ». Il a également souligné l’importance de développer le mix énergétique britannique afin d’atteindre les objectifs européens de réductions de gaz à effet de serre dans les années à venir, et de fournir à chaque ménage et entreprise de l’énergie à bas coût.
En 2010, un rapport de la Confederation of British Industry (CBI, confédération des industries britanniques) a fortement incité les acteurs britanniques à développer davantage les procédés de production d’énergie à partir de déchets. En effet, plus de 300 décharges devraient fermer d’ici 2015, et un investissement proche de 10 Md£ serait nécessaire pour construire près de 200 nouvelles stations de traitement des déchets d’ici 2020 afin de respecter les objectifs européens. Par ailleurs, ce rapport souligne que la production d’énergie à partir de déchets est un procédé propre, compatible avec de hauts niveaux de recyclage, et économiquement viable à grande échelle.
Le CBI a énoncé qu’en 2010, la production d’énergie à partir de déchets comptait pour 1,5% de la production globale d’électricité britannique, approximativement autant que l’énergie éolienne. Cependant, en 2005, une étude de l’Institution of Civil Engineers (Institution des ingénieurs civils), « Quantification of the Potential Energy from Residuals (EfR) » (Quantification de l’énergie potentielle des déchets) a estimé que ce type de procédés pourrait représenter jusqu’à 20% de l’électricité produite au Royaume-Uni, sans pour autant entraver les objectifs de recyclage du pays. D’après le rapport du CBI, une gouvernance efficace et des investissements appropriés pourraient ainsi permettre d’économiser jusqu’à 36 millions de tonnes de CO2 issues de l’utilisation d’énergies fossiles, tout en améliorant l’indépendance du Royaume-Uni vis-à-vis de l’importation de ces carburants.
Un des arguments souvent évoqué contre la production d’énergie à partir de déchets est que cette utilisation est moins efficace que le recyclage ou la réutilisation. Cependant ces trois procédés ne sont pas nécessairement exclusifs, comme le montre l’exemple de l’Allemagne, qui exhibe un taux de recyclage avoisinant les 66%, avec un enfouissement des déchets d’à peine 1% et une production d’énergie utilisant 32% des déchets. Ainsi, une des principales barrières à la transformation de déchets en énergie reste le coût du procédé, qui reste plus élevé que la mise en décharge.
Cette différence tend néanmoins à diminuer avec l’augmentation des prix de la mise en décharge, notamment avec un relèvement annoncé par le gouvernement jusqu’à 80 £/tonne de déchets en 2020 (48 £/tonne en 2011). Le coût de production devrait également être absorbé par la présence croissante d’investisseurs privés, comme le montre l’exemple des 250 M£ investis en commun par Tata Chemicals et E.ON dans le projet de centrale à Lostock. Par ailleurs, le financement de projets de ce type peut avoir des avantages non négligeables. Ainsi, pour Tata Chemicals Europe, le directeur général Martin Ashcroft a énoncé que cette centrale permettrait à sa compagnie d’atteindre un tiers de ses objectifs en termes de réductions d’émissions, mais aussi d’atténuer leur dépendance vis-à-vis des prix fluctuants des énergies fossiles.
Dans un contexte toujours plus exigeant en matière d’énergies, et avec la fermeture programmée de nombreuses centrales à charbon sur le territoire britannique, il devient de plus en plus crucial de développer de nouvelles sources d’énergie propres. L’accord du gouvernement alloué à cette centrale, la deuxième de ce type financée par E.ON à recevoir le feu vert, montre une volonté de la part des instances officielles de favoriser ce type d’initiatives. Bien que souvent mise de côté au profit de l’éolien ou d’autres sources d’énergies renouvelables plus médiatisées, la production d’énergie à partir de déchets reste une piste intéressante pour aider la transition du pays vers une économie verte.
Origine : BE Royaume-Uni numéro 118 (23/11/2012) – Ambassade de France au Royaume-Uni / ADIT – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/71517.htm