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La filière française du bioéthanol « en pétard » contre la Commission européenne

Champ de betteraves sucrières dans le nord de la France, photo Frédéric Douard

Alors que la Commission européenne vient de publier ce 17 octobre 2012 une proposition de directive relative à la question des changements d’affectation des sols, la filière française du bioéthanol s’oppose au plafonnement arbitraire à 5% de la part des biocarburants de première génération dans l’objectif européen de 10% d’énergie renouvelable dans les transports.

La filière considère en effet que « cette position est synonyme :

  • de menace forte sur l’emploi et l’investissement. La filière bioéthanol française concerne aujourd’hui 5 000 emplois directs et indirects et a investi près d’un Milliard € dans 5 nouvelles usines.
  • de régression de l’Europe sur la scène internationale. Sans les biocarburants de première génération, l’Europe est dans l’incapacité d’atteindre les objectifs du Paquet Energie Climat et augmente sa consommation de carburants fossiles, essentiellement importés. »

Pour la filière, un plafonnement à 5% arbitraire et inacceptable, car il met en péril investissements et emplois créés

« Le plafonnement à 5% de la part des biocarburants de première génération dans l’objectif de 10% d’énergie renouvelable dans les transports est arbitraire et inacceptable : une telle décision, si elle était validée par le Conseil et le Parlement Européen, impliquerait des fermetures d’usines et des pertes d’emplois. La filière du bioéthanol européen risque de disparaître alors qu’elle travaille aujourd’hui au développement du bioéthanol de 2ème génération grâce aux investissements et aux installations dédiées à la production de bioéthanol de première génération.

La filière souligne que cette proposition correspond à une remise en cause de la directive et à un retour en arrière incompréhensible pour certains pays. Ce stop and go en matière de politique des biocarburants fragilise les filières sur le plan économique et décourage investisseurs et acteurs industriels et agricoles.

Enfin, pour compenser la limitation des biocarburants de première génération, la Commission propose de recourir à un compte multiple (double ou quadruple) pour certaines productions issues de déchets et résidus. Il s’agit d’un artifice trompeur et inefficace conduisant à une moindre réduction de la consommation de carburants fossiles et à des économies de CO2 virtuelles. »

La filière dénonce un effet domino à l’échelle planétaire non démontré …

« Les changements d’affectation des sols dans le monde sont dus à des facteurs multiples : exploitation des forêts, urbanisation, infrastructures, habitudes alimentaires, artificialisation des sols etc. et ne font malheureusement l’objet d’aucune étude scientifique majeure. Tenir les biocarburants comme seuls responsables des changements indirects d’affectation des sols est une parfaite injustice. La Commission européenne a d’ailleurs elle-même reconnu que l’étude IFPRI sur laquelle elle base ses facteurs ILUC est très faible scientifiquement. Elle n’a fait l’objet d’aucune revue scientifique et il n’existe aucun consensus international pour évaluer d’éventuels changements d’affectation des sols indirects.

La filière française du bioéthanol demande donc qu’une étude complémentaire à celle de l’IFPRI soit réalisée dans les meilleurs délais pour définir des critères plus justes et robustes scientifiquement. La création d’un groupe d’experts internationaux sur l’utilisation des terres doit permettre d’appréhender toutes les dimensions de cette problématique et non uniquement les impacts des biocarburants pris isolément. »

… et une proposition fondée sur une fausse opposition : manger ou rouler

« Ne pouvant pas justifier sa proposition par les changements indirects d’affectation des sols, la Commission met en avant, sans étude solide, une fausse opposition entre les usages alimentaires et énergétiques de la biomasse agricole, alors que la réalité est qu’il existe une complémentarité forte entre ces usages.

En effet, avec le développement des biocarburants, bioéthanol et biodiesel, dont les coproduits sont destinés à l’alimentation animale, la France a fait progresser son autosuffisance en protéines végétales de 25% dans les années 1980 à plus de 55% aujourd’hui, limitant ainsi très fortement les importations de soja et contribuant à faire baisser les prix de l’alimentation animale. La demande de biocarburants conduit donc à augmenter la production agricole et ne peut pas être mise en cause dans la hausse des prix agricoles.

En France, seul 1% des surfaces cultivables est consacré à la production de biomasse destinée au bioéthanol, C’est sept fois moins que le retrait de 7% des terres de la production alimentaire demandé par la Commission, dans le projet de la réforme de la Politique Agricole Commune (PAC), au titre de l’intérêt écologique. »