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Etat des lieux 2010 du marché européen du biogaz

La dixième édition du bilan EurObserv’ER dresse un état des lieux des filières biogaz en Europe avec 27 pays passés à la loupe, avec des analyses précises pour quelques pays marquants :  l’Allemagne, l’Italie, la Grande-Bretagne et la France.

>> Les filières. La méthanisation est un processus naturel qui permet la production de biogaz, un gaz riche en méthane, à partir d’éléments organiques d’origine animale ou végétale. Il existe trois grands gisements de production : les décharges (35,9% de la production), les stations d’épuration des eaux usées urbaines ou industrielles (12,1 %), et les unités de méthanisation spécifiques conçues pour la valorisation énergétique (52 %). Ces dernières comprennent les unités de méthanisation agricole qui se sont fortement développées ces dernières années et qui valorisent le plus souvent des lisiers, des résidus de récoltes et de plus en plus de cultures énergétiques ; les unités de méthanisation des déchets de l’industrie agroalimentaire ; les unités de  méthanisation de déchets solides qui sont spécialisées dans le traitement des déchets ménagers et des déchets verts ; ainsi que les unités de méthanisation multi-produits.

>> Les valorisations. En 2009, la production européenne d’énergie primaire à partir de biogaz a atteint 8,3 Mtep, soit 346,8 ktep supplémentaires par rapport à 2008 (+4,3%). Le principal mode de valorisation de l’énergie biogaz est l’électricité, avec 25,2 TWh en 2009 dans l’Union européenne, en augmentation de 17,5% par rapport à 2008.
La production de chaleur issue du secteur de la transformation est estimée à 171,7 ktep, en augmentation de 13,1 % par rapport à 2008. Cet indicateur ne prend en compte que la chaleur vendue dans les réseaux de chaleur et non la chaleur directement utilisée sur le site (processus et chauffage).
Autre mode de valorisation, l’injection de biométhane (biogaz épuré) dans le réseau de gaz naturel est également en plein essor dans certains pays comme la Suède, l’Allemagne et les Pays-Bas. Le développement du “biogaz carburant” (qualité gaz naturel) est également possible.

>> L’Allemagne a fait le choix de développer les unités de méthanisation agricoles en favorisant l’utilisation des cultures énergétiques. Premier producteur européen de biogaz, le pays totalise 50,5 % de la production d’énergie primaire européenne et 49,9% de la production d’électricité en 2009. Selon l’Association allemande du biogaz (Fachverband Biogas e.V.), le pays possédait 4 984 unités de méthanisation, dont 1 093 installées en 2009, pour une puissance électrique totale de 1893 MW. Ce dynamisme s’explique par la mise en place d’un tarif d’achat qui cumule différentes primes. Depuis le 1er janvier 2009, la rémunération de base pour le biogaz de méthanisation (hors biogaz de station d’épuration) varie selon la puissance de 7,79 à 11,67 c€/kWh. La rémunération est majorée en cas d’utilisation de plantes énergétiques (7 c€/kWh), lisier (1 c€/kWh), cogénération (3 c€/kWh), déchets d’entretien du paysage et de l’environnement (2 c€/kWh) et en cas de réduction des émissions d’hydrocarbone non méthaniques (1 c€/kWh). L’électricité issue du biogaz de décharge bénéficie, quant à elle, d’un tarif de base compris entre 6,2 et 9 c€/kWh. Pour les stations d’épuration, le tarif varie de 6,2 à 7,1 c€/kWh, avec une prime liée à la technologie de 2 c€/kWh. Depuis une loi de février 2008, le pays s’est également lancé dans l’injection de biométhane dans le réseau de gaz naturel, 35 unités d’enrichissement ont injecté 190 millions de Nm3 (Normaux mètres cubes) de biométhane en 2009.

>> L’Italie est en 2009 le 4e producteur européen de biogaz avec 444,3 ktep. La production d’énergie primaire a ainsi augmenté de 8,4% par rapport à 2008 et la production d’électricité de 8,8%. Aujourd’hui, il existe environ 200 installations pour une puissance de l’ordre de 200 MWe, et la construction d’au moins 2000 MWe est prévue dans les 5 prochaines années. Cette perspective favorable s’explique par la mise en place d’une législation très incitative axée sur le  développement du biogaz agricole. Une loi du 23 juillet 2009 fixe le tarif d’achat de l’électricité biogaz produit à partir de matières premières agricoles à 28 c€/kWh pour les installations de moins d’1 MW. C’est le tarif le plus élevé d’Europe. Pour les plus grandes puissances, le biogaz est
éligible au système de certificats verts.

>> Le Royaume-Uni préfère s’appuyer sur la valorisation électrique du biogaz de décharge. Selon le DECC (Department of Energy and Climate Change), le pays a produit 1723,9 ktep de biogaz en 2009 dont 1474,4 ktep de biogaz de décharge (85,5 %). Ce type de biogaz a pleinement bénéficié du système de certificats verts britannique des ROCs (Renewable Obligation Certificates). Cet intérêt pour ce gisement s’explique par les coûts de production plus faible que pour d’autres filières renouvelables, le système anglais favorisant les filières les plus rentables.

>> La France est très loin d’utiliser son potentiel. L’essentiel de l’énergie produite (526,2 ktep en 2009) provient du biogaz directement capté dans les centres de stockage de déchets non  dangereux (84% du total) et ce gisement reste encore largement sous-exploité. Sur les 300 décharges françaises, seules 65 valorisent le biogaz. En 2009, on comptait également 74 stations d’épuration urbaines, 90 stations d’épuration industrielles, une vingtaine d’installations agricoles et 6 unités de méthanisation des ordures ménagères valorisant le biogaz. Ainsi, la production d’électricité issue du biogaz ne s’est établie qu’à 846,4 GWh. Cette sous-exploitation s’explique par la faiblesse du tarif d’achat, qui varie de 7,8 à 9,3 c€/kWh. À ce tarif s’ajoutent une prime à la méthanisation de 2 c€/kWh et une prime à l’efficacité énergétique de 0 à 3,1 c€/kWh. Les installations de grandes puissances sont également éligibles aux appels d’offre de la Commission de régulation de l’électricité. Les freins au développement de la filière tendent à se desserrer pour le biogaz agricole. Dans le cadre de la loi Grenelle I, un premier appel d’offre lancé en mars 2009, doté de près de 19 millions d’euros, a permis de sélectionner 82 projets de méthanisation agricole pour une puissance électrique de 23 MW.

>> Europe : 8,7 mtep en 2010
La plupart des pays de l’Union européenne ont mis en place une feuille de route biogaz dans leur plan d’action national énergie renouvelable, établi dans le cadre de la Directive européenne énergie renouvelable (2009/20/EC). Pour le compte d’une étude financée par l’Agence européenne de l’environnement, ECN (Centre de recherche sur l’énergie des Pays-Bas) a compilé l’ensemble des données de 26 plans d’actions (sur 27) envoyés à la Commission européenne au 13 décembre 2010. Les résultats montrent que la production d’électricité issue de biogaz devrait passer de 12,5 TWh en 2005 à 63,3 TWh en 2020 dans l’Union (dont 23,4 TWh pour l’Allemagne). L’ensemble de la production de chaleur, vendue et non vendue, passerait, elle, de 0,6 Mtep à 5 Mtep (dont 1,7 Mtep en Allemagne).
À plus court terme, les objectifs du Livre blanc de la Commission européenne pour la filière biogaz, exprimés en énergie primaire (15 Mtep en 2010), seront loin d’être atteints. Selon nos estimations, la production d’énergie primaire biogaz devrait s’établir à 8,7 Mtep en 2010. Néanmoins, la filière biogaz est devenue une valeur sûre, sur laquelle la plupart des pays de l’Union comptent s’appuyer.

>> Retrouver ces informations dans l’État des énergies renouvelables en Europe, Ed. 2010