Lien de bannissement

Greenpeace lance un nouveau pavé dans la mare du biodiesel français

Champs de colza en Champagne, photo Frédéric Douard

Alors que la Commission européenne venait tout juste de donner son accord à 7 systèmes de certification durable des biocarburants, Greenpeace  dévoilait le lendemain une enquête réalisée dans 9 pays européens, tendant à montrer que les matières premières des biocarburants européens venaient des grandes zones de déforestation mondiales, Greenpeace France précisant que la France est l’un des plus mauvais élèves, puisque son biodiesel est composé à environ 30% de matières importées de pays tropicaux (huile de soja surtout et huile de palme).

« Cette révélation met à mal le sacro-saint mythe de l’autosuffisance française en matière d’agrocarburants. Le gouvernement français et la filière tentent, depuis plusieurs années déjà, de nous faire croire qu’ils sont uniquement produits par des agriculteurs français. C’est faux. Les résultats de notre enquête prouvent le contraire », a déclaré Jérôme Frignet, chargé de campagne Forêts pour Greenpeace, le 20 juillet 2011.

Les agrocarburants : une fausse bonne idée pour le climat et l’environnement selon Greenpeace
Dans son rapport « Le biodiesel testé, comment la politique européenne en matière d’agrocarburants menace le climat », Greenpeace dévoile les résultats d’une enquête menée par un laboratoire spécialisé. Ce dernier a analysé 92 échantillons de biodiesel, recueillis dans les stations essence de neuf pays européens. Les résultats montreraient que les agrocarburants, qui sont présents jusqu’à hauteur de 7% dans le carburant analysé, ont été fabriqués presque exclusivement à partir d’huile de palme, de colza et de soja. Or, la Commission européenne établit un lien entre la culture du soja, du colza et de l’huile de palme, et la destruction des forêts. En effet, il faut prendre en compte les déplacements de cultures ou « changements d’affectation des sols » : les agrocarburants monopolisent des espaces alloués auparavant à d’autres cultures, qui sont donc elles-mêmes déplacées, souvent sur des espaces naturels tels que les forêts.  Et Greenpeace va même jusqu’à déclarer que les filières biodiesel européennes sont donc plus néfastes pour le climat que les filières diesel fossile !

Selon le rapport de Greenpeace, le biodiesel français serait en tout et pour tout fabriqué à plus de 90% avec de l’huile de palme, de soja et de colza. Pour le colza, on le savait puisque c’est une ressource indigène à l’Europe. Il resterait à préciser les taux respectifs et par pays des intrants soja et palme pour préciser la critique, la communication de Greenpeace se contentant d’affirmer que la France serait en tête des pays utilisateurs d’huile de soja, un produit qui n’est pas  cultivé dans l’hexagone.

« Le gouvernement impose l’incorporation de 7% d’agrocarburant dans le diesel français et dans l’essence. Les automobilistes n’en savent rien et c’est le contribuable qui subventionne très largement une filière qui n’est pas économiquement viable. Plusieurs milliards d’euros ont d’ailleurs été engloutis en pure perte depuis 2005. Les agrocarburants sont donc une fausse solution pour le climat et l’environnement, mais aussi pour l’économie », explique Jérôme Frignet.

Greenpeace souhaite faire évoluer la législation en matière d’agrocarburants
Dans le cadre de la politique européenne, le gouvernement français a prévu d’augmenter de 30% l’utilisation de biodiesel d’ici 2020. Si cet objectif est maintenu, Greenpeace pense que la situation décrite dans son rapport va encore s’aggraver. Greenpeace demande donc à la Commission européenne de proposer une législation visant à éliminer tous les agrocarburants qui endommagent le climat au lieu de le protéger. Pour y parvenir, Greenpeace propose :

  • de prendre en compte la totalité des impacts des agrocarburants, y compris le déplacement des cultures alimentaires au détriment des espaces naturels ;
  • d’exiger des producteurs qu’ils rendent publiques la constitution et la provenance des matières premières utilisées pour leurs biodiesels ;
  • d’exclure des mesures incitatives et des autres avantages liés aux énergies renouvelables les fabricants des agrocarburants responsables d’émissions excessives de gaz à effet de serre.

Frédéric Douard, Bioénergie International