Royaune Uni : étude sur le potentiel du gaz naturel synthétique issu de la biomasse
http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/65578.htm
Un rapport consacré à l’étude des opportunités offertes par l’utilisation de Bio-Synthetic Natural Gas (Bio-SNG, gaz naturel synthétique issu de la biomasse) dans les secteurs des transports et du chauffage a été publié le 10 novembre 2010. Il a été réalisé à la demande de NEPIC (North East Process Industry Cluster), The National Grid et Centrica par CNG services. Il considère à la fois le problème de l’approvisionnement en biomasse, les solutions technologiques de production de Bio-SNG, la possibilité d’utilisation du réseau de gaz britannique existant pour son transport et les aspects économiques de son exploitation.
Le méthane produit à partir de biomasse est une source d’énergie renouvelable attractive dont l’utilisation permet une réduction significative des émissions de dioxyde de carbone par rapport aux carburants fossiles. De surcroît, l’exploitation du bio-méthane ne requiert pas le développement de nouveaux équipements ou infrastructures. En effet, il peut, par exemple, être distribué par le réseau de transport de gaz déjà existant au Royaume-Uni ou servir à propulser, sans modification préalable, des véhicules équipés pour fonctionner au gaz naturel comprimé. Jusqu’à présent, le bio-méthane utilisé était principalement obtenu par digestion anaérobie [1], procédé qui n’est pas idéal pour les applications où l’obtention de méthane est recherchée (ce qui n’est pas le cas lorsque l’on souhaite seulement traiter les déchets). Pour que la capacité de production de bio-méthane progresse significativement, il faut passer à un procédé industriel de production par « voie thermique » qui permet, entre autres, d’utiliser des ressources en biomasse inadaptées au processus de digestion anaérobie. Ce procédé consiste en la gazéification de la biomasse à haute température pour obtenir du gaz de synthèse ou syngas (mélange gazeux carboné), traité par la suite pour obtenir le Bio-SNG. Bien que n’étant pas techniquement mature, ce mode de production ne devrait pas, selon l’étude publiée, nécessiter de nouveaux développements fondamentaux.
Le problème de l’approvisionnement
Miser sur la production de Bio-SNG à grande échelle pose le problème de l’approvisionnement en matières premières. En effet, les ressources en biomasse sont l’objet de nombreuses utilisations concurrentes parmi lesquelles l’élaboration de produits chimiques, le chauffage ou la génération d’électricité (directement et sans passer par l’étape d’un gaz du type Bio-SNG), et les biocarburants. Certes, les déchets que produit un pays comme le Royaume-Uni constituent une ressource potentielle de biomasse considérable. Ils ne sont pourtant pas directement disponibles pour l’utilisation dans des applications de production d’énergie, car une grande partie des déchets fait l’objet de contrats avec les autorités locales. On assiste d’ailleurs, de la part des utilisateurs majeurs de biomasse, à des opérations visant à sécuriser leur approvisionnement en s’impliquant et en investissant en amont de leur secteur dans la chaîne d’approvisionnement.
Malgré cette concurrence entre les différentes utilisations et la demande croissante entraînée par les mesures incitatives du gouvernement, une part non négligeable du chauffage par le réseau de gaz serait en mesure d’être assurée par le Bio-SNG en combinant les ressources en biomasse locales, importées et celles issues de matériaux provenant des déchets.
La dimension économique
Le rapport se penche, pour l’analyse des coûts inhérents à la production de Bio-SNG, sur deux cas d’étude d’échelles différentes : une centrale produisant assez de Bio-SNG pour environ 15.000 foyers ou 25.000 véhicules, et une autre plus grande capable d’approvisionner 100.000 foyers ou 150.000 véhicules. De manière prévisible, il s’avère que la taille est un facteur important dans l’évaluation des coûts, et que seule une centrale de production de grande échelle serait viable du point de vue économique.
La nature de la ressource utilisée est également un élément clé pour l’estimation des coûts. En prenant en compte les mesures incitatives, une centrale de grande capacité fonctionnant à partir de fuel issu de déchets (SRF, solid recovered fuel) ou à partir de SRF et de biomasse serait compétitive.
Les problèmes posés par la construction d’usines à grande échelle proviennent, comme expliqué plus haut, de l’approvisionnement (qui doit suivre la capacité de production), mais aussi des investissements nécessaires pour construire les premières usines. C’est pourquoi le rapport recommande de passer par une étape intermédiaire avec des installations de démonstration à échelle réduite. De manière alternative, une voie possible pour tester et développer les installations de gazéification de la biomasse serait la construction de centrales de production d’électricité à partir de Bio-SNG. Les mesures incitatives existantes, comme les Renewable Obligations qui s’appliquent à la production d’électricité à partir de sources renouvelables, devraient permettre de rendre une telle centrale de petite taille économiquement viable (même si elle ne génèrera pas de profits intéressants).
Les économies en carbone
L’utilisation du Bio-SNG, que ce soit comme carburant destiné aux transports ou pour le chauffage via le réseau, permet une réduction de l’ordre de 90% en termes d’émissions de dioxyde de carbone par rapport à celle des carburants fossiles ! En particulier, pour le domaine du chauffage, cette réduction est comparable à celle obtenue par du chauffage direct par la biomasse avec des contraintes sur les infrastructures bien moindres, ce qui laisse augurer, a priori, une pénétration des marchés plus aisée.
D’après les estimations présentées dans le rapport, l’exploitation du Bio-SNG s’avère également être une solution très efficace quant au coût de la tonne de carbone non émise dans l’atmosphère. Pour les applications de chauffage, chaque tonne de carbone qui n’est pas émise (par rapport à l’utilisation de gaz naturel) coûte 175 £, soit bien moins que lorsque l’on considère les installations domestiques de chauffage direct par la biomasse (395 £). Cette solution est également plus intéressante que les pompes à chaleur.
En ce qui concerne le secteur des transports, la comparaison avec les véhicules électriques est très favorable : la tonne de carbone non émise (par rapport à l’utilisation de carburants conventionnels) revient à 400 £ contre 1000 £ en utilisant des véhicules électriques alimentés par le réseau. Les poids lourds sont une cible particulièrement intéressante, car l’option électrique n’est pas pour ce type de véhicules une alternative crédible pour le moment. Cependant, ces chiffres indiquent que la production de gaz à distribuer par le réseau est un débouché préférable pour l’exploitation du Bio-SNG, si l’objectif est de réduire au maximum les émissions de dioxyde du carbone à moindre coût.
Les aspects règlementaires
Le soutien du gouvernement, à travers un cadre réglementaire approprié et des mesures incitatives, reste un élément nécessaire à une potentielle exploitation de Bio-SNG obtenu par « voie thermique » : c’est uniquement grâce à cela que des centrales peuvent être économiquement viables. Dans le cas de l’utilisation de ce procédé pour alimenter les systèmes de chauffage, c’est le Renewable Heat Incentive qui est mis en jeu. Le gouvernement va consacrer 860 M£ à ce dispositif incitatif qui vise à accentuer fortement l’utilisation de sources d’énergie renouvelables pour les systèmes de chauffage. Quoi qu’il en soit, les réglementations et les mesures de soutien définies par le gouvernement se doivent d’être claires et stables afin de fournir un cadre susceptible de donner confiance aux investisseurs privés.
D’après le rapport, les principaux avantages apportés par l’utilisation du Bio-SNG se résument donc à travers les trois points suivants :
- la possibilité de produire des volumes plus importants que par digestion anaérobie ;
- la possibilité d’obtenir du Bio-SNG à partir de bois ou de déchets organiques ;
- le transfert depuis la centrale jusqu’au consommateur via le réseau de gaz existant.
Ces atouts potentiels ont conduit NEPIC, The National Grid et Centrica à partager les résultats de ces travaux avec le Department for Energy and Climate Change (DECC, ministère de l’énergie et du changement climatique) et le Committee on Climate Change (CCC, comité sur le changement climatique) de manière à ce que soient étudiées les perspectives de construction d’un projet pilote au Royaume-Uni. Pour les commanditaires du rapport, les différentes utilisations du Bio-SNG représentent une opportunité intéressante de réduire les émissions de carbone du pays, et font de cette solution l’une des diverses technologies bas carbone qui devront être développées pour atteindre les objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre fixés par le Royaume-Uni.
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[1] Transformation de matière organique par des bactéries en l’absence d’oxygène
Origine : BE Royaume-Uni numéro 107 (14/01/2011) – Ambassade de France au Royaume-Uni / ADIT – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/65578.htm