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Leçon d’une pandémie : l’usage durable du bois facteur de résilience de l’économie

Un article de Christoph Rutschmann d’Energie-bois Suisse

Paysage du Valais, photo Frédéric Douard

Qui aurait imaginé, il y a deux mois, que les frontières puissent se refermer au sein de l’Europe ? Le coronavirus dévoile les faiblesses de la globalisation et les interdépendances à l’échelle mondiale : lorsque la Chine tousse, la planète contracte une pneumonie. D’innombrables secteurs économiques en sont affectés, jusqu’aux vallées les plus reculées de Suisse.

Depuis un certain nombre d’années, tout est disponible partout, à tout moment et à bas prix : les écrevisses du Vietnam en hors-d’œuvre, la veste en fibre synthétique pour le ski sur neige artificielle, les fraises d’Afrique du Nord pour le dessert de Noël, le saumon canadien pour accompagner le vin mousseux du Chili et le carburant bon marché du Moyen-Orient pour les compagnies aériennes low-cost et les voitures toujours plus grosses. Grâce à une disponibilité apparemment infinie d’énergie pas chère, provenant du charbon, du pétrole, du gaz naturel et de l’uranium, notre économie bat son plein. Et il est rare qu’on y réfléchisse réellement.

Puis le COVID-19 entre en scène. En quelques semaines seulement, un virus invisible provoque un saut quantique en terme de politique écologique et climatique : un air pur en Chine, des poissons dans le lagon de Venise, le ciel bleu dépourvu de trainées de condensation, une réduction massive du bruit… des impacts totalement imprévus et survenus à une vitesse époustouflante. A côté de cela, les répercussions économiques sont pour l’heure impondérables…

Le COVID-19 soulève la question de l’importance des choses

Quelle est l’importance de pouvoir s’acheter tous les jours des denrées importées du monde entier ? L’approvisionnement permanent en biens essentiels est-il important ? Avons-nous besoin de voyager en Egypte par avion pour moins de cent francs ? Ou est-ce important pour nous de pouvoir rencontrer d’autres personnes ? Le chauffage des bâtiments en hiver est-il vital ? Une évaluation différenciée de l’importance des choses ouvre de nouveaux horizons. Renoncer n’implique pas systématiquement une perte de qualité de vie ; moins peut signifier plus. Nous pouvons tirer des enseignements intéressants en évaluant nos priorités.

Premier enseignement : prendre en compte les produits et cycles régionaux et locaux se justifie. Qui a recours aux ressources locales et aux produits fabriqués dans son pays bénéficiera d’une indépendance et d’une sécurité accrues tout en renforçant l’économie nationale.

Deuxième enseignement : la croissance et l’accélération ne peuvent pas se poursuivre à l’infini. L’humanité vit en grand seigneur et dévore dès aujourd’hui le capital des générations futures. Des facteurs qualitatifs devront venir s’ajouter, voire remplacer le cours économique actuel, propulsé par la quantité uniquement.

Troisième enseignement : la société va être obligée d’établir de nouvelles priorités en faveur de l’environnement et du climat. Le printemps 2020 se rapproche d’un nouveau record de température. Pour conserver les bases de notre existence à long terme, il nous faudra créer une économie plus durable et plus efficiente.

Quatrième enseignement : la mise en œuvre de trois premiers enseignements améliorera notre qualité de vie et nous garantira des moyens de subsistance sûrs à long terme. Il est dans notre intérêt – et surtout dans l’intérêt des générations à venir – de viser une économie sans surexploitation.

Le bois renforce la résistance de notre économie

Au vu des aspects cités, le bois compte parmi les ressources les plus précieuses. Son utilisation universelle lui permet d’apporter une contribution importante à une économie énergétique et à une industrie du bâtiment respectueuses des besoins de nos futurs petits-enfants. Autre bonne nouvelle : depuis des années, les forêts suisses produisent bien plus de bois que nous n’en exploitons. Cela s’applique d’ailleurs à toute l’Europe.

Aujourd’hui, à l’heure où la crise du COVID-19 commence à se dissiper, le moment est propice pour jouer l’atout des ressources locales et renouvelables. Des milieux politiques aux consommateurs finaux, en passant par les entreprises : nous sommes tous appelés à créer de bonnes conditions cadres pour les produits et services nationaux. Nous augmenterons ainsi la résilience de l’économie et de la société dans leur ensemble pour faire face à des facteurs disruptifs, tels que les flux d’approvisionnement qui fléchissent ou sont interrompus à nos frontières.

Croissance et exploitation du bois, en Europe et en Suisse
Europe : en 2010, la croissance des forêts productrices s’élevait à 770 millions de m3 en UE27, tandis que l’abattage du bois était de 480 millions de m3. Cela signifie que la croissance dépassait l’abattage de plus d’un tiers. Aujourd’hui, ce rapport est d’un ordre comparable. Source : Eurostat.
Suisse : chaque année, la croissance des forêts helvétiques correspond à près de 10 millions de m3. Entre 7 et 8 millions de m3 de bois peuvent y être récoltés sans qu’il y ait surexploitation des forêts. Or, depuis des années, l’utilisation effective du bois se situe entre 4,5 et 5 millions de m3. Sources : Annuaire La forêt et le bois 2019, Office fédéral de l’environnement OFEV; Faits et chiffres, ForêtSuisse.

Christoph Rutschmann, photo EBS

Christoph Rutschmann
Energie-bois Suisse
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