Lien de bannissement

Les énergies renouvelables thermiques, parent pauvre de la politique française

  • Catégorie(s) : Actu

Editorial du Bioénergie International n°55 de mai-jun 2018

A Brest, les deux chaufferies, l’une à déchets ménagers et l’autre à bois, couvrent 93% des besoins du chauffage urbain, photo Frédéric Douard

La Cour des comptes de la République française a publié le 18 avril 2018 un rapport sur les dispositifs de soutien public aux énergies renouvelables (EnR). La Cour constate « un décalage persistant au regard des objectifs affichés. Elle note également que, faute d’avoir établi une stratégie claire et des dispositifs de soutien stables et cohérents, le tissu industriel français a peu profité du développement des EnR. […].

La FEDENE1 et AMORCE2 partagent ce constat, tant sur le retard pris sur les objectifs, que sur le niveau des moyens à allouer pour y parvenir. En outre, cette transition ne pourra se faire sans une plus grande stabilité des dispositifs de soutien.

Mieux focaliser le soutien public sur les EnR thermiques

La Cour indique également que « les EnR électriques bénéficient de l’essentiel de ces dépenses publiques avec, en 2016, 4,4 Md€ contre 567 M€ pour les EnR thermiques » pour constater « que « les EnR thermiques reçoivent aujourd’hui l’équivalent d’un dixième du volume de soutien public consacré aux EnR alors qu’elles représentent 60 % de la production nationale […]. Le soutien à ces énergies est d’autant plus nécessaire que leur développement est obéré par des freins importants, en particulier la tendance baissière des prix des énergies fossiles, qui crée un écart de compétitivité que le niveau actuel de la taxe carbone ne parvient pas à compenser ».

La FEDENE et AMORCE partagent totalement ce constat, et soutiennent naturellement la recommandation de la Cour des comptes, sur l’accroissement des moyens du Fonds chaleur pour atteindre les objectifs de développement fixés aux EnR thermiques.

Le Fonds chaleur a démontré son efficacité jusqu’en 2014, date du décrochage du prix des énergies fossiles. Depuis, les moyens sont clairement insuffisants pour rétablir l’équilibre compétitif des solutions EnR thermiques et pour impulser une dynamique de développement des réseaux de chaleur et de froid permettant d’atteindre l’objectif fixé par la loi de transition énergétique, à savoir multiplier par cinq la chaleur renouvelable et de récupération livrée par les réseaux. Un constat qui fait consensus et qui a conduit plusieurs gouvernements à s’engager à doubler son enveloppe.

L’enjeu n’est pas uniquement le doublement du Fonds chaleur, mais la mobilisation à court terme de soutiens suffisants pour lancer de nouveaux projets dont le temps de maturation est de plusieurs années.

Afin de donner à tous les acteurs du secteur les moyens d’accélérer la transition énergétique et de remettre la France sur la trajectoire qu’elle s’est fixée, les collectivités territoriales et les opérateurs de la chaleur renouvelable (rassemblés au sein d’AMORCE et de la FEDENE) réaffirment donc :

  • le besoin de mettre en cohérence les moyens financiers avec les objectifs quantitatifs de la Transition Energétique pour assurer la viabilité économique des projets3 ;
  • le renforcement immédiat du Fonds chaleur et le lancement de nouveaux appels à projets d’énergie thermique renouvelable et de récupération ;
  • la nécessité de partager une vision commune sur les principaux enjeux et un pilotage plus lisible en matière de politiques publiques énergétiques.

Enfin, la FEDENE et AMORCE saluent également les recommandations de la Cour des comptes, de recentrer le Crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) sur les énergies renouvelables ainsi que de rendre obligatoire, dans la réglementation thermique, l’usage des EnR thermiques dans les bâtiments neufs.

Notes : 

  1. AMORCE constitue le premier réseau français d’acteurs locaux d’information, de partage d’expériences et d’accompagnement des décideurs en matière de politiques Energie-Climat des territoires.
  2. La FEDENE, Fédération des Services Energie Environnement, regroupe 500 entreprises de services centrés sur l’efficacité énergétique, la performance des bâtiments, la production et la valorisation de la chaleur et de froid renouvelables et de récupération.
  3. Porter la part des énergies renouvelables à 23 % de la consommation finale brute d’énergie en 2020 et à 32 % de la consommation finale brute d’énergie en 2030.