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Du biogaz à partir des effluents de la fromagerie de Maroilles

Ce projet a eu comme but à la fois l’épuration des effluents en deçà des limites permettant son rejet au milieu naturel (conformément à l’arrêté du 2 février 1998) et la valorisation de la matière organique en énergie permettant d’éviter les dépenses de gaz naturel pour la production de l’eau chaude pour la fromagerie.

L’utilisation de la méthanisation suivi d’un traitement aérobie permet à la fromagerie du Bocage de :

  • Épurer l’ensemble des effluents générés par l’usine (lactosérum et eaux blanches) en vue d’un rejet au milieu naturel.
  • Transformer la matière organique en énergie renouvelable (45kWth), d’où un bénéfice économique (réduction de la consommation d’énergie) et écologique (réduction des émissions de CO2).

La fromagerie génère environ 8 m3 de lactosérum brut par jour. Le lactosérum brut est un effluent gras, azoté et chargé en matière organique, avec des concentrations en DCO atteignant 70 g O2/l. En parallèle, les lavages fréquents et réguliers de l’atelier génèrent des eaux blanches plus faiblement chargées, représentant un volume journalier de 20m3. Le mélange de ces deux effluents représente une charge organique totale de 570 kg DCO/j et ne peut être rejeté au milieu naturel en raison de sa forte concentration en matière organique, azote et phosphore.

L’installation de méthanisation

La solution déployée se déroule en utilisant deux technologies différentes : la digestion anaérobie (méthanisation) et un réacteur aérobie (procédé Sequencing Batch Reactor). Cette combinaison permet au final de rejeter les eaux traitées dans le milieu naturel et de récupérer le biogaz pour produire de l’eau chaude renouvelable.

La méthanisation

Dans un premier temps, une flottaison par air dissous abat en grande partie les concentrations en matière grasse et en matière en suspension présentes dans l’effluent brut. L’abattement a pour but d’obtenir un effluent soluble à plus de 96%, sur lequel une méthanisation à forte charge peut être réalisée.

Dans un second temps, 90% de la matière organique est transformée en biogaz dans un réacteur à forte charge. Le méthaniseur, utilise la technologie Proveo© issue d’une collaboration Naskeo-INRA. L’effluent après aéroflottaison est pompé et réchauffé via deux échangeurs jusqu’à une température de 37 °C.

Le réacteur Proveo© fonctionne en flux ascendant sur un principe hybride entre lit fixe et lit fluidisé. Il présente un volume utile de 40m3 et un ciel gazeux de 10m3 permettant un stockage temporaire et un nivellement du biogaz produit. Une recirculation permanente à débit réglable permet l’homogénéisation du réacteur et l’ajustement de la vitesse ascensionnelle à travers le lit. L’énergie produite est directement valorisée sur une chaudière dédiée permettant l’exportation d’eau chaude à 80°C vers la fromagerie. Celle-ci utilise l’eau chaude sur un réseau interne en substitution de celle habituellement produite par sa chaudière au gaz naturel. La puissance thermique moyenne valorisée au niveau du procès est de 45kW, correspondant à plus de 175 m3 de biogaz valorisé par jour.

Du fait de la présence de lactosérum acide dans l’effluent et du fait de l’acidification naturelle en anaérobiose, le procédé nécessite un redressement régulier du pH, réalisé grâce à l’ajout de soude concentrée.

En sortie du méthaniseur, l’effluent présente une DCO dix fois plus faible qu’en entrée. Cependant, l’abattement portant principalement sur les matières carbonées (production de CH4), les concentrations en nutriments (azote et phosphore) restent très supérieures aux limites de rejet au milieu naturel et un traitement de finition est nécessaire.

Principe du procédé SBR – phase 1

Etape aérobie : elle permet l’élimination de la matière organique résiduelle, ainsi que des matières azotées et phosphorées. Cette étape se déroule à faible charge sur une technologie de type SBR (Sequencing Batch Reactor). Ce type de procédé se caractérise par le fait que les phases d’aération et de décantation se déroulent séquentiellement dans le même bassin et non dans deux bassins séparés. Ceci présente des avantages en terme de nombre de cuves ainsi que pour la réduction du développement de bactéries filamenteuses.

Principe du procédé SBR – phase 2

L’élimination des matières azotées est réalisée par nitrification/dénitrification. La concentration moyenne en azote passe ainsi de 265 mg/l en sortie de digesteur à moins de 30 mg/l dans le rejet au milieu naturel. La dénitrification et la nitrification sont rendues possibles par l’alternance des phases d’aération et d’anoxie au sein du SBR.

L’élimination des matières phosphorées n’est pas réalisée par voie biologique mais par précipitation simultanée à l’aide de chlorure ferrique. Ce réactif permet l’abattement complet du phosphore, celui-ci se retrouvant sous forme de strengite (FePO4) au sein des boues aérobies.
Par ailleurs, l’installation est entièrement automatisée et très compacte (traitement de près de 600 kg de DCO/j sur un réacteur de 40 m3).

Récapitulatif des caractéristiques techniques de l’installation de traitement d’effluents de la fromagerie :

  • Débit et caractéristiques d’alimentation : 28 m3/jour à 20 g DCO/l
  • Rendement épuratoire : 99 % (rendement sur méthaniseur : 90 % DCO, SBR : 95 % DCO)
  • Installation entièrement automatisée
  • Puissance de l’installation de méthanisation : 45 kWth

Cette unité de méthanisation d’effluents de fromagerie, permet à la fromagerie du Bocage de faire un pas en avant dans la mise en place des solutions respectueuses de l’environnement. Ainsi, la région Nord-Pas-de-Calais se positionne encore une fois, comme une région précurseur dans les énergies renouvelables et l’épuration des effluents.

Frédéric Douard