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Fertiwatt, unité de méthanisation agricole optimisée pour ne rien gaspiller

Article paru dans le Bioénergie International n°44 de juin-juillet 2016

Exploitation agricole du GAEC Blanchelande à Fougerolles-du-Plessis en Mayenne, photo Frédéric Douard

Exploitation agricole du GAEC Blanchelande à Fougerolles-du-Plessis en Mayenne, photo F. Douard

Le GAEC Blanchelande, implanté à Fougerolles-du-Plessis en Mayenne, est une exploitation en polyculture-élevage de 150 ha, avec un troupeau de 100 vaches laitières, 60 vaches allaitantes, plus un atelier de dindes de 1500 m². À côté de cela, les associés du GAEC, dont Alain Bessiral, porteur du projet de méthanisation, et qui vient de céder ses parts à son neveu, ont mis en place la Sarl Fertiwatt. La nouvelle structure, pilotée par Alain et Bruno Landais, électricien du pays, vient de mettre en service avec succès une installation cogénération de 330 kWé à partir du biogaz produit sur le site de la ferme.

Depuis 2009, Alain traitait ses fumiers en compostage, ce qui lui permet de faire des échanges contre de la paille avec des collègues céréaliers. Mais dès l’année suivante, il a cherché à améliorer la pratique, notamment en étudiant la méthanisation en voie sèche. Pour cela, il rencontre Denis Brosset, en Vendée, qui s’est lancé avec son associé Jean-Louis Vrignaud du GAEC du Bois Joly, dans la méthanisation par voie sèche.

Troupeau de Blondes d'Aquitaine au GAEC Blanchelande à Fougerolles-du-Plessis en Mayenne, photo Frédéric Douard

Troupeau de Blondes d’Aquitaine au GAEC Blanchelande, photo Frédéric Douard

Pendant quatre ans il étudie la question en voie sèche mais en 2014 l’opérateur avec lequel il avait monté son projet fait faillite et il doit repartir de zéro. Entre temps, en 2013, il avait créé la Sarl Fertiwatt pour porter le projet. Ensuite, en contact avec une entreprise étrangère durant un moment pour étudier la voie liquide cette fois, il éprouve de grandes difficultés à se faire conseiller clairement et sans parti pris. Les associés se mettent alors en quête de trouver localement une entreprise qui pourrait jouer le rôle de conseiller, de concepteur et qui par la suite pourrait continuer à les suivre sans devoir traverser l’Europe en avion pour venir le voir !

Samuel Recoursé, GR Energies à gauche et Alain Bessiral, Fertiwatt à droite, photo Frédéric Douard

Samuel Recoursé, GR Energies à gauche et Alain Bessiral, Fertiwatt à droite, photo F. Douard

C’est alors qu’il rencontre Samuel Recoursé, qui disposait d’une expérience de plusieurs années chez un constructeur d’installations de méthanisation, et qui est aujourd’hui gérant de GR Energies, une PME de 20 personnes en installation et maintenance en énergies renouvelables basée en Bretagne voisine. Et sa longue quête s’est enfin arrêtée car il a trouvé en Samuel un interlocuteur disponible et non partie prenante dans la technologie. Ceci a permis d’envisager les options sereinement, en éliminant celles qui ne lui convenaient pas, sans la contrainte du fournisseur qui doit forcément placer son matériel.

Et Alain souligne, qu’après avoir pu résoudre les questions techniques, il n’en a pas pour autant eu fini avec les soucis dans le montage du projet. Il a en effet eu un différend avec l’ADEME qui voulait absolument lui imposer un petit projet. Appuyé par le Conseil général, la DDT, le Clasel et la Chambre d’agriculture de Mayenne une rencontre a lieu avec l’ADEME pour trouver une issue au projet. Finalement, c’est un conseiller dynamique de la Chambre, Hubert Guérault, qui a pu sortir le dossier avec succès.

Intervention de GR Energie sur le site de Fertiwatt, photo Frédéric Douard

Intervention de GR Energie sur le site de Fertiwatt, photo Frédéric Douard

Alain garde néanmoins de ces longues années d’études et de démarches une certaine lourdeur et fatigue morale, « mais tous n’est pas négatif », dit-il, « car cela oblige à se remettre en cause et à améliorer son projet ».

Livraison de déchets verts au GAEC Blanchelande, photo Frédéric Douard

Livraison de déchets verts, photo F. Douard

Les intrants

Fertiwatt mobilise plus de 10 000 tonnes d’intrants par an :

  • 5000 tonnes de fumier bovin et 400 tonnes de fumier de dindes du GAEC de Blanche Lande
  • 2000 tonnes de lisier bovin et 500 tonnes de fumier de deux exploitations voisines
  • des déchets de cidrerie
  • des issues de silos
  • des tontes de pelouses de la Communauté de communes
  • des tontes de bords de routes du Conseil départemental récoltées avec un automoteur VSV Noremat
Le VSV permet de faucher et récolter la biomasse des bas-côtés routiers pour la méthanisation, photo Noremat

Le VSV fauche et récolte la biomasse des bas-côtés routiers pour la méthanisation, photo Noremat

Le plan d’épandage des digestats a été établi en liquide sur 400 ha répartis sur les 3 exploitations fournisseurs de fumier, et en solide (après passage au séparateur de phase) sur 400 ha répartis sur les deux exploitations de céréales qui lui fournissent la paille en échange, mais situées à 70 km (d’où la nécessité de sécher ce digestat).

Description technique des équipements

La pompe centrale, photo Frédéric Douard

Le Prémix Vogelsang avec broyeur Rotacut, photo F. Douard

  • fumière couverte existante qui sert également de stockage des autres intrants solides
  • bol incorporateur de 40 m³
  • préparateur Prémix pour le mélange solide / liquide, avec broyeur Rotacut et piège à cailloux
  • pompe à lobes
  • fosse à lisier de 450 m³
  • 2 cellules enterrées de 70 m³ en béton pour les autres intrants liquides
  • digesteur 1 400 m³ avec couverture béton pour accès facile aux agitateurs
  • post-digesteur 2 500 m³ avec couverture gazomètre souple
  • agitation lente du haut vers le bas par pâles dans digesteur et post-digesteur
  • cuve de stockage du digestat liquide de 8 000 m³ prévue avec une couverture pour récupérer le biogaz résiduel
  • armoire de commandes méthanisation AES Dana & GR Energies avec automate Schneider
  • cogénérateur de 330 kWé avec moteur Liebherr V8
  • ingénierie, intégration & construction GR Energies
  • une partie électrique a été réalisée par les deux associés de Fertiwatt.
L'intérieur du digesteur durant la phase de construction, photo Frédéric Douard

L’intérieur du digesteur durant la phase de construction, photo Frédéric Douard

Côté gestion des liquides, qui reposent en grande partie sur l’apport de lisier bovin, deux cuves de 70 m³ chacune, enterrées juste contre le local des pompes, ont été prévues pour parer au défaut momentané de lisier, ainsi que pour les autres apports liquides, et peuvent être pompées, au même titre que la cuve à lisier située juste à côté, afin de servir le mélange réalisé par le Prémix.

Ecran de supervision de l'automate Fertiwatt réalisé par AES Dana, photo GR Energies - Cliquer sur l'image pour l'agrandir.

Ecran de supervision de l’automate Fertiwatt réalisé par AES Dana, photo GR Energies – Cliquer sur l’image pour l’agrandir.

L'incorporateur Trioliet, photo Frédéric Douard

L’incorporateur Trioliet, photo F. Douard

Côté récupération du biogaz, elle sera opérée sur les trois cuves dès que la couverture Nénuphar sera en place sur la cuve de stockage, de manière à ne rien laisser perdre et à ne pas polluer l’atmosphère avec du méthane perdu.

Il est à noter que tous les ouvrages en béton ont été enterrés de manière à les isoler thermiquement, à faciliter leur entretien et leur insertion visuelle, mais aussi pour éviter la constitution de bassins de rétention en cas de fuites.

Moteur de l'agitateur vertical sur le toit du fdigesteur enterré, photo Frédéric Douard

Moteur de l’agitateur vertical sur le toit du digesteur enterré, photo Frédéric Douard

La chaleur : objectif 100% de valorisation

Même si la prime à l’efficacité énergétique a été supprimée en France dans le cadre des tarifs d’achats de l’électricité biogaz, la valorisation de la chaleur reste indispensable pour une bonne rentabilité des projets et c’est heureux !

Le moteur de cogénération Liebherr, photo Frédéric Douard

Le moteur de cogénération Liebherr, photo Frédéric Douard

Le cogénérateur de Fertiwatt délivre 350 kW de chaleur. Le processus de méthanisation devrait en consommer entre 30 kW l’été et 100 kW l’hiver. Le reste sera utilisé principalement en chauffage l’hiver pour le poulailler et l’habitation, mais aussi pour alimenter l’atelier lait en eau chaude sanitaire toute l’année, et enfin pour sécher du fourrage l’été. Et pour ne rien perdre de cette chaleur, notamment hors phases de demande, un ballon de stockage tampon de 30 m³ a été prévu dans la centrale, elle aussi enterrée, dans le sous-sol du bâtiment de séchage construit dans le cadre du projet.

Armoires de commandes Fertiwatt fournies par AES Dana, photo GR Energies

Armoires de commandes Fertiwatt fournies par AES Dana, photo GR Energies

Ce bâtiment de 1800 m³ héberge donc la centrale de production, un séchoir de fourrage, un séchoir de digestat et sert également de stockage pour les produits secs, dont le digestat.

La principale valorisation en termes de volume et de revenu concernera les fourrages. Un séchoir Agricompact, de deux chambres de 28 bouches de soufflage d’air chaud à 40°C sous les balles permettra notamment de réaliser un autre projet d’Alain : améliorer l’autonomie en protéines sur l’exploitation avec notamment la mise en culture de luzerne. Pour cela, autour de son projet de séchage de luzerne, il a fédéré 15 agriculteurs qui viennent de planter 120 ha pour assurer une partie de leur approvisionnement en protéines, avec 4 à 5 coupes prévues par an.

Le bâtiment de 1800 m2 pour le séchage et le stockage durant sa constrcution, photo Frédéric Douard

Le bâtiment de 1800 m2 pour le séchage et le stockage durant sa construction, photo F. Douard

Un second séchoir récupérera en priorité les 50 kW dissipés dans le local moteur. Et Alain a aussi prévu de récupérer de la chaleur sous la toiture photovoltaïque installée sur ses bâtiments d’élevage, pour en améliorer l’efficacité, et l’utiliser dans ce séchoir.

Un projet circulaire exemplaire

Nous venons de le voir, ce projet qui allie de nombreux processus de valorisation et d’optimisation, est un modèle d’économie circulaire, où rien ne se perd, et où tout se transforme en revenus.

Le bâtiment d'élevage des dindes avec sa toiture photovoltaïque, photo Frédéric Douard

Le bâtiment d’élevage des dindes avec sa toiture photovoltaïque, photo Frédéric Douard

Les investissements se monteront, lorsque tout sera terminé, à 2,8 millions €, y compris les VRD et la couverture Nénufar, et dont 600 k€ pour les installations de valorisation de la chaleur.

Une dernière remarque concerne la qualité de réalisation : il est à souligner dans cette belle installation que tout a été fait, génie civil et équipements, avec un niveau de dimensionnement et de finition digne de ce que l’on peut trouver dans l’industrie.

Pompe centrale Fertiwatt et ses réseau de distribution, photo GR Energies

Pompe centrale Fertiwatt et ses réseau de distribution, photo GR Energies

Agitateur du post-digesteur, photo Frédéric Douard

Agitateur du post-digesteur, photo F. Douard

Contacts :

Frédéric Douard, en reportage à Fougerolles du Plessis

Voir également quelques images des installations filmées par drone pour les portes ouvertes de juin 2017 :


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