Ethique de recherche sur les biocarburants liquides

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Selon la FAO, en 2009, plus d’un milliard de personnes souffraient de la faim dans le monde. Dans le même temps, les capacités productives de l’agriculture sont sollicitées pour des valorisations non alimentaires, émanant de marchés solvables et ambitionnant de relever les nouveaux défis énergétiques et environnementaux. Ce contexte fait émerger des interrogations éthiques, notamment sur le cas des biocarburants liquides. Selon le comité, loin d’un simple arbitrage entre valorisation alimentaire et non-alimentaire des productions agricoles, ces questionnements éthiques conduisent à réfléchir aux finalités de la recherche.

Plantation de palmiers à huile au Cameroun, photo Frédéric Douard

Le comité convie l’Inra et le Cirad à développer une vigilance éthique sur la finalité des recherches sur les biocarburants, les modes de travail, et les relations entre les politiques de recherche et les politiques agricoles. Il recommande également aux deux établissements de développer des méthodologies d’évaluation d’impact propres aux biocarburants.
L’avis, adopté en séance du 19 mars 2010, formule neuf recommandations sur le fonctionnement général, sur la conduite des travaux de recherche et en matière de partenariat.

Les 9 recommandations du comité d’éthique pour la recherche agronomique

1. Le nouveau contexte de l’innovation dans le champ agronomique se caractérise par l’émergence de problèmes graves relatifs aux ressources finies (sols, eau, énergies fossiles, …) et exige une construction nouvelle des questions à résoudre. Le comité recommande à l’Inra et au Cirad de se réapproprier le sens de la recherche finalisée ; il pense qu’une réflexion éthique sur la recherche finalisée participera à la formulation d’un nouvel éthos.
2. Dans le domaine des biocarburants, le comité recommande à l’Inra et au Cirad de bien distinguer ce qui relève de la politique de recherche et des organismes et ce qui relève des politiques agricoles. Il leur propose de réfléchir au sens de la responsabilité des institutions de recherche et des chercheurs, de développer les principes de transparence et d’obligation à tous les niveaux et pour toutes les actions, et de renforcer l’information réciproque avec les décideurs politiques et économiques.
3. Le comité suggère aux directions des organismes de susciter, à l’échelle des communautés de vie des chercheurs (centres, campus, unités), des débats pour une plus grande appropriation de cette vision qui conduit lechercheur, au-delà des fronts de science qu’il connaît, “vers un agir dans le monde et avec l’autre”.
4. Le comité recommande que, lors de la formulation de la question de recherche et des projets, leur pertinence soit démontrée, non seulement par rapport à l’état des sciences et technologies, mais aussi par rapport aux demandes et attentes sociales.
5. Afin de garder une vigilance éthique pendant les travaux de recherche, le comité recommande des travaux interdisciplinaires, associant des chercheurs en sciences humaines, ce qui permet de multiplier les regards, non seulement juridiques et sociologiques, mais aussi philosophiques, pouvant aider les chercheurs, engagés dans les sciences de la nature, à formuler et exprimer les problèmes éthiques qui se présentent à eux.
6. Le comité recommande à l’Inra et le Cirad de développer des méthodologies d’évaluation d’impact propres aux biocarburants.
7. Le comité recommande qu’une attention particulière soit donnée, non seulement à l’accès aux technologies consacrées à la production des biocarburants, mais aussi au partage équitable des droits de propriété intellectuelle associés à leur développement.
8. Lors du choix de leurs partenaires privés, le comité recommande aux deux établissements de prêter attention à l’utilisation par les entreprises des standards internationaux relatifs au développement durable, compte tenu de l’imbrication étroite des enjeux scientifiques et industriels.
9. Pour l’analyse de la conduite à suivre lorsque les chercheurs s’engagent dans des missions d’expertise,le comité recommande de se référer aux avis sur l’expertise émis par le précédent comité d’éthique de l’Inra (Comepra) et par le comité d’éthique du Cnrs (Comets). Le comité recommande par ailleurs de mettre enplace des procédures pour le repérage et l’arbitrage des conflits d’intérêt.

Lire l’avis dans son intégralité

L’avis, adopté en séance du 19 mars 2010, formule neuf recommandations. Elles s’appuient sur le cadre de principes que le comité d’éthique s’est donné et invitent la communauté des chercheurs à placer les questions de sécurité alimentaire et de modèles de consommation aux différentes échelles, notamment nationales et internationales, dans leurs contextes sociaux, institutionnels et environnementaux.

Lire les principes adoptés par le comité d’éthique

Le Comité consultatif commun d’éthique pour la recherche agronomique, créé en octobre 2007 par le Cirad et l’Inra, a une mission de réflexion, de conseil, de sensibilisation et d’alerte. Il examine les questions éthiques que soulèvent l’activité et le processus de recherche dans les domaines de l’agriculture, de l’alimentation, de l’environnement et du développement durable, notamment celles qui intéressent les relations entre sciences et société.

Contact : Marie Gasquet, Secrétaire du Comité d’éthique, Paris : marie.de_lattre-gasquet@cirad.fr

Source : CIRAD, 11 juin 2010