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Une petite leçon pour le Canada, second exportateur mondial de granulés de bois

Editorial du Bioénergie International n°38 d’août-septembre 2015

Thunder Bay Generating StationLoading into ship 2Radio Canada relate le 18 aout 2015, la position d’un député conservateur de l’Ontario, Victor Fedeli, qui s’insurge à propos de l’importation dans son Etat de granulés de bois d’origine européenne pour l’alimentation d’une centrale électrique à charbon en cours de conversion à la biomasse à Thunder Bay. L’Etat de l’Ontario a en effet décidé en 2013 de cesser tout usage de cette énergie polluante pour la production d’électricité. Mais le député qualifie ce choix de granulés importés de « peu respectueux envers l’environnement ». Radio Canada ne précise pas si ledit député parle au nom des charbonniers de l’Ontario, forts mécontents de la décision prise par leur Etat de supprimer l’usage du charbon.

Qu’importe, sur le fond, cet honorable représentant des citoyens de l’Ontario a parfaitement raison : il apparait assez dommage d’aller chercher, en l’occurrence ici des granulés de bois en Norvège, alors que l’Ontario est couvert de bois. Alors pourquoi donc, le porteur du projet, l’électricien OPG, a-t-il fait un pareil choix ?

Arbaflame PelletsDe dires du directeur biomasse de OPG, Brent Boyko, « la centrale de Thunder Bay serait le premier exemple de substitution totale de charbon par des granulés torréfiés. Habituellement, les conversions de centrales se font avec des granulés de bois brut, mais à Thunder Bay, cela aurait exigé une révision complexe et trop coûteuse des installations. Et comme à l’heure actuelle, il n’y a que deux productions commerciales de granulés torréfiés dans le Monde, l’une en Norvège par Arbaflame et l’autre au Texas par Zilkha, l’importation était inévitable en l’état actuel des choses. »

Le granulé torréfié a en effet des caractéristiques très proches de celles du charbon fossile (hydrophobe et haut PCI) et ne nécessite ainsi que peu de modifications des systèmes de combustion.

Pour en revenir à la position de notre député, rappelons que le transport maritime qui a été choisi pour alimenter Thunder Bay est le moins polluant qui existe à ce jour et qu’il est un peu cavalier pour un canadien de se plaindre des importations de granulés alors que son pays est le second exportateur au Monde, et en particulier vers l’Europe, la région qu’il incrimine dans ses propos.

Stockage des granulés torréfiés en extérieur sur le site de Thunder Bay

Stockage des granulés torréfiés en extérieur sur le site de Thunder Bay, photo Arbaflame

Alors restons sérieux, il est certain qu’OPG cherchera rapidement une solution plus locale pour réduire ses coûts et cette situation n’est que temporaire, pendant la phase de lancement de la centrale. Mais la leçon est néanmoins fort intéressante pour les canadiens et ce petit coup de gueule devrait leur faire prendre conscience, de tout le désagrément que leurs exportations à bas coût procurent aux producteurs européens de granulés de bois et qu’il conviendrait peut-être que ce pays, qui figure parmi les plus riches en biomasse au Monde, se mettent comme les autres à consommer un peu plus de biomasse au lieu de l’exporter puisqu’ils n’en ont que faire ! Cela permettrait au Canada de réduire ainsi ses consommations colossales de combustibles fossiles et son impact mondial sur l’effet de serre. C’est ce que l’Etat de l’Ontario a décidé en 2013 pour sa production d’électricité thermique et nous ne pouvons que l’en féliciter.

Frédéric Douard

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