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Où en est-l’Espagne en matière de biomasse-énergie ?

Récolteuse de Rajal Serrat en Extrémadure, photo Jeremy Hugues dit Ciles

L’ambassade de France en Espagne a publié en juillet 2011 un rapport très documenté sur les énergies renouvelables en Espagne. Nous avons examiné la part de la biomasse dans ce pays du sud de l’Europe qui s’est hissé dans le peloton de tête des producteurs de biomasse-énergie en Europe !

La chaleur et l’électricté

L’objectif fixé par le Plan Énergies Renouvelables espagnol (PER 2005-2010) était d’atteindre 1 370 MW de puissance installée en biomasse. Fin 2008, l’Espagne avait réalisé 32% de son objectif et se plaçait en 6ème position des producteurs d’énergie primaire à partir de biomasse (4,34 Mtep -tonnes équivalent pétrole- et en 10ème position pour la production d’électricité à partir de biomasse (1,8 TWh). Selon les chiffres avancés dans la présentation du PER 2011-2020, l’Espagne a consommé en 2010 3,65 Mtep d’énergie thermique issue des résidus agricoles et forestiers et disposait d’une puissance électrique de 533 MW, obtenue principalement à partir de résidus industriels de biomasse.

L’objectif à l’horizon 2020 est de consommer 548 ktep thermiques supplémentaires issus de la biomasse ainsi que de disposer de 817 MW électriques supplémentaires. Pour cela, le PER prévoit des aides à la collecte de la biomasse primaire et l’augmentation des plantations forestières énergétiques.

Les biocarburants

Pour le secteur des transports, le nouveau PER fixe a 9,2% la part de la consommation d’énergie finale qui devra être assurée par les biocarburants en 2020. Selon l’IDAE (L’agence nationale de l’énergie), le pays a consommé en 2009 1 046 ktep de biocarburants dans les transports (152 ktep de bioéthanol et 894 ktep de biodiesel), soit une augmentation de 70,7 % par rapport à 2008 (+ 63,3 % pour le bioéthanol et + 72 % pour le biodiesel). Cette consommation totale correspond à un taux d’incorporation en contenu énergétique dans l’ensemble des carburants routiers, de l’ordre de 3,4 % (1,9 % en 2008), conforme à l’objectif que le pays s’était fixé. Ce taux d’incorporation progressif est obligatoire depuis 2009. En 2010, selon un reportage publié dans le quotidien La Vanguardia, l’Espagne a consommé 1 716 700 tonnes de biocarburant (1 363 000 tonnes de biodiesel et 353 700 tonnes de bioéthanol), ce qui correspond à un taux d’incorporation de 4,83% de biocarburant au sein du carburant consommé pour les transports, soit un résultat inférieur aux 5,83% prévus par la réglementation.
Pour 2011, 2012 et 2013, l’Espagne vise des taux d’incorporation de 5,9%, 6,0% et 6,1% respectivement. Le système d’incitation espagnol est particulièrement favorable au développement des biocarburants avec, en plus d’un taux d’incorporation progressif obligatoire, une exemption totale de la taxe sur les hydrocarbures jusqu’au 31 décembre 2012.

Usine de biodiesel Abengoa Bioenergia à San Roque

Depuis avril 2011, le décret royal 459/2011 permet qu’un carburant contenant jusqu’à 7% de biodiesel puisse être vendu en Espagne sans spécification particulière. En prévision d’une évolution future, un autre décret royal a été pris pour étudier la possibilité d’incorporer sans spécification jusqu’à 10% de biodiesel. Les carburants B10, B20, B30, contenant jusqu’à 10, 20 et 30% de biodiesel, disponibles dans certaines stations essences avec une obligation d’étiquetage spéciale, n’entrent actuellement pas dans les garanties des constructeurs de véhicules mais sont testés sur des bus municipaux. Les premiers résultats indiquent une augmentation de la consommation du véhicule mais aussi une augmentation de la durée de vie du moteur. Il n’y aurait donc a priori pas d’obstacles mécaniques majeurs à une plus grande incorporation des biodiesels.

Concernant le bioéthanol, une incorporation supérieure à 5% de bioéthanol ou supérieure à 15% du mélange ETBE (éther éthyle tertiobutyle) doit être étiquetée en station service. Toutes les voitures produites depuis l’an 2000 peuvent techniquement utiliser le E10, essence incorporant 10% de bioéthanol. En France ce carburant est commercialisé depuis 2010 mais le ministère de l’industrie espagnol ne devrait pas donner son feu vert avant 2013. Pour utiliser un mélange contenant plus de 10% de bioéthanol par contre, il faut un véhicule flexible (flexible fuel vehicules), dont le moteur est préparé pour un combustible contenant jusqu’à 85% de bioéthanol (E85).

L’Espagne n’est pas seulement consommateur de biocarburant, c’est aussi un producteur. En 2009, l’Espagne se plaçait 3ème derrière l’Allemagne et la France au classement des producteurs européens de biodiesel. Avec un investissement de 1,4 milliards d’euros et quatre années consacrées à la construction d’usines, l’Espagne compte actuellement quatre usines de bioéthanol, capables de produire 296 ktep/an et 46 usines de biodiesel, capables de produire 3 874 ktep/an.
La décision programmée du gouvernement espagnol d’augmenter significativement les quotas d’incorporation a permis l’arrivée de nouveaux acteurs nationaux sur le marché du biodiesel, comme Infinita ou Entaban. Le marché européen du bioéthanol est pour l’instant beaucoup plus réduit que celui du biodiesel. Le Brésil et les États-Unis assurent à eux seuls plus de 90 % de la production mondiale de bioéthanol, qui est passée de 18 milliards de litres par an en 2000 à 74 milliards de litres en 2009. Concernant le bioéthanol, Dès 2008, l’Espagne disposait de quatre usines fonctionnelles. En 2009, elle était le 3ème producteur européen de bioéthanol, derrière la France et l’Allemagne grâce à l’entreprise Abengoa Bioenergia, principal producteur de bioéthanol sur le continent européen et un des plus importants au monde, présent sur les marchés brésilien et nord-américain. Cependant, ces résultats en apparences très positifs cachent une réalité moins reluisante. Confrontées à une demande inférieure aux capacités de production (voir figure 42) et une importation déloyale de biocarburants provenant d’Argentine et d’Indonésie, 7 usines de biodiesels ont fermé entre 2009 et 2010, et 75% des 46 usines encore en fonction sont pratiquement arrêtées et fonctionnent seulement à 10% de leurs capacités…

>> Voir aussi nos articles sur les biocarburants de troisième génération en Espagne :

Le biogaz

L’Italie, la France et l’Espagne sont des pays comparables en termes de niveau de production et de types de gisements de biogaz exploités. Les installations les plus importantes sont celles des décharges ou des stations d’épuration et les unités de biogaz agricoles y sont très peu développées. La principale application du biogaz est la production d’électricité bien qu’une petite partie soit utilisée pour un usage thermique. Le PER 2005-2010 visait une production électrique à partir de biogaz de 1 417 GWh. En 2008, l’Espagne produisait déjà 584,5 GWh à partir de cette source d’énergie. La consommation actuelle de biogaz est de 34 ktep d’énergie thermique avec une puissance électrique de 177 MW.
Selon le PER 2011-2020, le potentiel énergétique à partir de biogaz s’élèverait à 1 818 ktep en Espagne et pour 2020, l’objectif est de produire 100 ktep thermique et d’avoir une puissance électrique disponible de 400 MW.
De nouvelles applications qui permettraient de profiter de manière plus efficace du biogaz que la transformation en électricité ou en chaleur existent. Après avoir fait passer le biogaz par différents procédés d’épuration, il est possible par exemple, d’obtenir un gaz comparable au gaz naturel, le biométhane, qui peut être injecté dans le réseau de gaz naturel ou être utilisé comme combustible pour véhicule. L’administration publique et les entreprises espagnoles ont travaillé en ce sens et en février 2009, a été inaugurée à Madrid la première installation d’injection de biométhane dans le réseau.

>> Retrouver l’ensemble du rapport de l’ambassade de France en Espagne sur le site de l’ADIT

Frédéric Douard, Bioénergie International


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