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Produire du bioéthanol en Colombie avec des déchets de café

Une usine de traitement des déchets de café dans la vallée du Cauca en Colombie est sur le point de produire du bioéthanol, apportant non seulement des avantages sociaux, mais aussi des avantages environnementaux et économiques aux collectivités.

Le mucilage est le sirop retiré lors du lavage du grain de café. Il s’agit d’une substance visqueuse qui a traditionnellement contaminé les sources d’eau dans les zones productrices de café de la Vallée du Cauca, au sud-ouest colombien. Il peut maintenant être utilisé pour produire un carburant plus écologique.

« La pollution des rivières est un problème historique dans le secteur croissant du café », affirme Humberto Mazuera, Directeur de la Fondation Entorno en Colombie. Au cours des deux dernières années, il a développé un projet avec son fils, Oscar, un ingénieur expert en énergies renouvelables, orienté vers la restructuration de l’environnement par l’utilisation des déchets de café, et vers la création d’un prototype de micro-usine pour la production d’éthanol, dans la municipalité de Séville dans la vallée du Cauca.

Ce projet est l’un des 26 projets gagnants du concours IDEAS d’innovation énergétique, lancé en 2009 grâce à un financement de GVEP, de la Coopération allemande au développement (GIZ) et de la Banque interaméricaine de développement (BID).

Le projet vise à réduire la pollution des rivières en utilisant le mucilage présent dans le grain de café pour produire du bioéthanol dans une micro usine, qui sera bientôt entièrement opérationnelle.

Le recyclage des déchets de production offrira de nouvelles opportunités pour les producteurs de café pour générer des revenus supplémentaires, car ils seront en mesure de les vendre à l’usine. De plus, l’amende délivrée par le ministère de l’Environnement à chaque fois que les déchets sont déchargés dans la rivière, leur sera épargnée.

« Nous sommes en train de fabriquer une entreprise de traitement de déchets qui permettra de dégager des bénéfices non seulement sociaux mais environnementaux et économiques », assure Humberto Mazuera.
La Fondation Entorno a choisi la rivière Pijao, qui traverse la municipalité de Caicedonia dans la vallée du Cauca pour mettre en place une usine de traitement pour absorber les déchets. Avec du café planté sur 18 000 hectares de terre concentrée sur ses rives, c’est l’une des rivières les plus affectées dans la région.
Grâce aux 192 000 US Dollars accordés par le concours IDEAS,  la construction de l’usine a été récemment achevée et on vient de commencer l’étape des essais pour produire du bioéthanol à partir du  mucilage présent dans le grain de café. « C’est une petite usine peu coûteuse, mais son processus de production répond au même protocole qu’une grande usine  productrice d’éthanol», explique Oscar Mazuera.

Selon leurs calculs, l’usine sera capable de produire entre 800 et 1000 litres de bioéthanol par jour. Afin d’atteindre cet objectif, ils auront besoin de 8.000 à 12.000 litres de mucilage par jour, un chiffre que les Mazuera ne considèrent pas être difficile à atteindre étant donné que l’on parle de 450m2 de terres dédiées à la culture du café.

Le bioéthanol produit dans cette usine aura diverses utilisations: comme carburant pour véhicule, ou capable d’alimenter 20 à 25 générateurs de 5kW, afin de produire de l’énergie dans les zones rurales, ainsi que pour l’éclairage des fermes et des foyers, ou comme combustible pour les poêles spécialement conçus pour une utilisation avec le bioéthanol.
Humberto Mazuera tend la main aux producteurs de café dans la région à travers les diverses associations de producteurs de café, qui ont un intérêt direct à soutenir l’initiative. Ils sont conscients qu’ ‘« ils ne profitent pas  pleinement des sous-produits du café », comme l’explique Alexandra Mejía, de la Fédération nationale des producteurs de café.
La Fondation Entorno a tenu une série de réunions initiales avec les 1900 bénéficiaires possibles et bien que les tests ne soient pas encore terminés, il semble que l’initiative ait été  bien reçue. « Les gens sont conscients que le besoin existe », dit Mazuera, « et selon eux il s’agit d’un moyen possible d’améliorer le processus de production, ce qui leur permettra de certifier leur café. Une certification du café pourrait signifier une augmentation de sa valeur marchande ».
Un des producteurs de café-qui pourrait en bénéficier est Oscar Jaramillo, qui cultive du  café depuis 28 ans dans la municipalité de Séville, bien que la culture du café remonte au temps de ses grands-parents. Il est plein d’espoir, parce que « c’est un travail écologique et avec le revenu supplémentaire, nous pourrons construire des séchoirs à café ».

Jaramillo a une plantation de cinq hectares, avec trois hectares de café, deux de bananiers, et 200 arbres d’avocats. Il extrait normalement le mucilage sur les plantations de bananes, mais «en hiver l’eau provoque des inondations et d’autres problèmes, bien que cela soit pire dans les plantations plus grandes ».

Pour commencer, tandis que les tests sont effectués dans l’usine, les planteurs de café apporteront leur contribution en donnant leur mucilage, mais après, il sera acheté par la Fondation Entorno et les profits seront en conformité avec la taille des plantations.

Jaramillo, comme de nombreux producteurs de café dans la vallée, dit qu’il est intéressé, en dépit du fait « qu’ils n’ont pas eu encore la chance de voir l’usine en action ou de voir quel sera le produit final ».

La Fondation Entorno s’engagera dans un processus de restructuration de l’environnement, car ils ne produiront pas que du bioéthanol. « Nous allons prendre le mucilage, avant qu’il n’arrive aux sources d’eau, nous le ramènerons à l’usine et le convertirons en éthanol», explique Humberto Mazuera et il continue, « dès que nous aurons achevé le processus de fermentation et de distillation, il y aura un résidu, que nous convertirons en engrais et utiliserons aussi dans un complément alimentaire pour les animaux des agriculteurs locaux ».
« GVEP est tout à fait conscient des défis auquel ce projet fait face, mais la Fondation Entorno parie sur le fait qu’il s’agit d’un biocarburant de seconde génération où il n’y a pas de concurrence avec le secteur alimentaire»,  précise Diana de la Vega, responsable de GVEP en Colombie.

« Ce projet offre des réponses aux problèmes en cours de pollution de l’environnement, tout en aidant les petits producteurs de café en améliorant leur qualité de vie et augmentant leurs profits. Et nous l’espérons, il encouragera  le développement futur des autres sociétés ayant une vision similaire dans le domaine de l’énergie propre ».

Comme il produira de l’énergie et des produits dérivés, le projet surveillera la qualité des eaux de la rivière Pijao, quelque chose qui a également suscité l’intérêt d’Aguavalle, la société d’eau potable locale.  « Ils sont très intéressés par notre projet et la possibilité d’avoir  des sources d’eau potable, de sorte qu’ils pourront fournir de l’eau propre aux travailleurs agricoles et aux producteurs de café», souligne Humberto Mazuera ;  et il assure que  « grâce à ce projet, 3,6 millions de m3 d’eau ont déjà été récupérés » , simplement en évitant la pollution du bassin de la rivière Pijao.

Le plus grand défi est de parvenir à une conversion complète, où il n’y a plus du tout de déchets à tous les stades du processus. Réaliser cela  « permettra de résoudre un problème éternel pour les planteurs de café », déclare Humberto Mazuera.
GVEP (Global Village Energy Partnership) travaille avec les entreprises des pays en développement pour augmenter l’accès à l’énergie moderne et améliorer la qualité de vie de milliers de personnes. A ce jour, presque un million de personnes ont bénéficié de ses programmes.