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Biocarburant et autosuffisance alimentaire au Sénégal ?

Un article d’Ousmane DIAGNE dans Le quotidien du 20 août 2010

Sénégal sur la côte sérère, photo Frédéric Douard

Le Sénégal est vraiment le pays des paradoxes parce qu’un esprit doué de raison, de rationalité, de bon sens et de mesure ne pourrait comprendre cette nouvelle politique de la culture du pourghère (jatropha) au moment où on recherche l’autosuffisance alimentaire à travers la Goana.

Le biocarburant est un substitut énergétique issu de l’agriculture visant à remplacer à long terme les ressources fossiles qui servent de carburant comme le pétrole, par des matériaux organiques non fossiles provenant de la biomasse. Il a connu une certaine évolution, car les filières de première génération sont la filière huile, la filière alcool, la filière gaz et la filière charbon de bois. Ensuite on a essayé les filières de la deuxième génération avec la transformation de l’éthanol cellulosique, le jatropha curcas. Enfin la filière de troisième génération est constituée par les biocarburants obtenus à partir d’algues.

La culture du jatropha (considérée actuellement comme l’or vert) est en voie d’expérimentation dans notre pays. Cela peut attirer les grandes firmes pétrolières si l’expérimentation s’avère concluante et prometteuse. Cette donne doit être prise en compte par les autorités pour ne pas aggraver les conflits fonciers qui sont déjà latents et récurrents dans notre cher pays.

On ne devrait même pas permettre cette nouvelle culture dans la mesure où si certains agriculteurs la jugeraient rentable et bénéfique, ils pourraient abandonner les cultures vivrières, industrielles, fruitières et maraîchères. L’autosuffisance alimentaire tant vantée, tant glorifiée, tant magnifiée avec le tintamarre et le folklore qui l’ont accompagnée, va être reléguée aux calendes… paysannes.

En lieu et place de cette autosuffisance, on va assister à une sous-alimentation, à une malnutrition, à la faim voire à la famine. Les autorités politiques doivent donc mesurer tous les risques qu’elles feront encourir à la population en introduisant et en promouvant cette culture du jatropha dans les mentalités paysannes.

Cette culture est maléfique à un double point de vue : elle va faire baisser la production agricole et elle pourra engendrer de graves conflits fonciers dans les zones où elle sera pratiquée intensivement avec l’accaparement des terres par les firmes pétrolières. C’est pourquoi, Jean Ziegler propose à l’Onu un moratoire de 5 ans sur la production des biocarburants car «consacrer des terres agricoles fertiles à la production de denrées alimentaires qui seront ensuite brûlées pour fabriquer du biocarburant constitue un crime contre l’Humanité».

Trop de libéralisme engendre le désordre, le chaos, l’anarchie. L’ordre recherché par le libéralisme à travers le libre jeu du marché, la concurrence malsaine, la productivité maximale ne peut prospérer si on méconnaît, ignore ou minimise les aspects sociétaux et environnementaux des phénomènes.

Pour conclure, on invite les autorités politiques à faire preuve de rationalité, d’intelligence et de grandeur d’esprit, car avant de penser à nourrir des moteurs et des machines, il faut au préalable, nourrir des corps et des esprits. C’est une question d’évidence et de bon sens dont Descartes dit qu’il est «la chose la mieux partagée au monde».

Ousmane DIAGNE, Sor – Saint-Louis, ousmanediagne55@hotmail.com

Source : Le quotidien du 20 août 2010

3 réponses
  1. Omar dit :

    comme vous l’avez dit si on s’appui a fond sur s culture de JATROPHA nous allons conscientisés les Pensées des Paysans sur ce produit et par conséquence ils vont abandonner les cultures vivrières , maraichére et autres s qui mènera a une sous alimentation TOTAL pour le Senegal … Merci pour les Infos !!!!

  2. binetou dit :

    très juste je pense pour le respect de l’environnement l’on devrait se tourner vers les énergies renouvelables telles que le solaire ou l’éolienne. vu quand Afrique plusieurs projets (exple desertec )vont être mis en place pour exploiter l’énergie solaire afin d’assurer dans l’avenir plus de 15% des besoins en énergie de l’Europe. Reste à savoir si ces projets de grande envergure sauront profiter aux africains

  3. alou dit :

    vision assez juste ce qu il faudrait à mon humble avis c est concenter toutes nos forces sur le solaire c est continu et les conséquenses néfastes semblent moindres