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Le Club biogaz réagit à la toute petite place faite au biogaz dans le rapport de la Cour des Comptes sur les EnR

Guehenno, photo IEL Energies

Suite à la publication du rapport de la Cour des Comptes, rendu public le 25 juillet 2013, sur la pertinence de chaque énergie renouvelable dans la cadre la politique française de transition énergétique, le Club Biogaz souhaite attirer l’attention de la Cour sur le potentiel que représente la filière biogaz en termes de capacité de production d’énergie, de capacité de développement d’une filière industrielle française et de réelle contribution à la baisse des émissions de gaz à effet de serre.

Le Club a analysé avec attention la contribution importante de ce rapport qui propose de redéfinir les enjeux du développement des énergies renouvelables face aux engagements de la France à l’horizon 2020 et à la nécessité de couvrir 23% de ses consommations d’énergies par les renouvelables. Le Club remarque que la filière biogaz est mentionnée plusieurs fois dans le rapport mais est considérée, à ce jour, comme une part mineure de la production d’énergie par la biomasse « la biomasse reste la source la plus utilisée pour la production de chaleur renouvelable (87,4%) très loin devant l’énergie solaire thermique, la géothermie et les pompes à chaleur, ou encore le biogaz dont la production reste symbolique ».

La Cour des comptes souligne cependant la contribution du biogaz à la production électrique sans pour autant prendre en compte la chaleur nécessairement produite en cogénération pour des parts importantes. L’État des lieux 2011 de la méthanisation réalisé par le Club Biogaz, donne pourtant 1,1TWh de chaleur produite. « La production de chaleur à partir de biogaz est symbolique alors que celle d’électricité (1,1 TWh) représente 21,2 % de la production d’électricité de sources biomasse (5,2 TWh) mais seulement 1,3 % de la production totale d’électricité renouvelable. »

La Cour fait par ailleurs apparaître les faibles sommes jusqu’alors consacrées au développement de la filière reconnaissant par ailleurs que le biogaz représente la filière la moins coûteuse par tep économisée « Sur la base des engagements constatés entre 2009 et 2011, le coût du soutien par le Fonds Chaleur, rapporté à la tonne équivalent pétrole (tep) produite, est très disparate entre les filières. Le coût du soutien au solaire thermique atteint ainsi 10 941 €/TEP, très largement au-delà des coûts du soutien à la géothermie (1 100 €/tep), la biomasse solide (485 €/tep) ou encore le biogaz (240 €/tep). »

Par ailleurs les chiffres CSPE (contribution au service public de l’électricité) font apparaître que le biogaz en 2013 représente 2,8% de la part EnR (85 M€ sur 3 014 M€). En 2011, le biogaz produisait 1,7% de l’électricité renouvelable, pour 2,5% de la part EnR de la CSPE, sachant que l’utilisation de la chaleur est aussi soutenue dans le tarif. La contribution attendue de la filière est rappelée en ne considérant pourtant que les potentiels de production en « chaleur renouvelable » sans considérer le développement des filières de production électrique en cogénération, ni la production de gaz épuré injecté dans les réseaux utilisables notamment en bioGNV (Gaz Naturel pour Véhicules) sur des flottes captives. Le Club rappelle que la filière GNV est extrêmement intéressée par la production de gaz d’origine biologique qui est actuellement très inférieure à ses capacités d’utilisation.

Le rapport donne des définitions de la filière qui semblent restrictives aux yeux du Club, car elles ignorent l’existence et le développement fort de la méthanisation agricole, traitant essentiellement des effluents d’élevage et résidus de cultures. Il est ensuite considéré qu’ « aucune évaluation globale de la ressource n’est disponible ». Or des données sont disponibles, les chiffres Ademe sur le gisement d’effluents de 300 Mt/an sont bien évoqués, et il existe plusieurs rapports publiés ces dernières années, permettant d’évaluer le potentiel de production d’énergie par méthanisation, autour de 150TWh (scénario Ademe 2030-2050, scénario négaWatt de 2011, études GrDF 2013). Cette absence de mention du biométhane est surprenante car les opérateurs des réseaux gaz ont publié en 2013 des études prospectives montrant la faisabilité d’un approvisionnement en gaz totalement décarboné. Une audition de représentants des entreprises gazières aurait permis à la Cour des Comptes de mesurer la pertinence des propositions travaillées conjointement par les opérateurs des réseaux gaz et les acteurs de la méthanisation (dont le Club Biogaz), avec le soutien des collectivités locales, du monde agricole et des pouvoirs publics.

Le Club rappelle également que le biogaz est une énergie à production non intermittente, valorisable sous formes multiples, alimentée par des ressources locales et pour la plupart non importables. L’exploitation des unités, outre leur conception et construction, nécessite une main d’œuvre locale sur du long terme, contribuant au dynamisme économique des territoires. 17 000 emplois directs seront créés si les objectifs 2020 sont atteints.

Compte tenu de ces éléments le Club se montre surpris de la demande du rapport : « Néanmoins, si, le Fonds Chaleur a permis le développement du secteur de la chaleur renouvelable grâce à la biomasse solide et aux réseaux de chaleur associés, il est également utilisé pour soutenir les filières géothermie, biogaz et solaire thermique. Or, ces dernières restent faibles en termes de production, d’emplois et de marchés par rapport aux autres filières et captent un potentiel de financement non négligeable ». Il  semble, au contraire pour le Club, que la filière biogaz peut fortement contribuer aux objectifs fixés par la France en respects des critères donnés par la Cour des Comptes. Largement développée dans d’autres pays européens (cette filière n’est malheureusement pas mentionnée dans les fiches des autres pays européens présentées en annexe du rapport) et pouvant s’appuyer sur un réseau d’entreprises françaises prêtes à porter ce marché, la filière biogaz présente une maturité technologique complète et doit bénéficier des aides publiques (tarifs d’achats, Fonds Chaleur, Fonds Déchets, pourquoi pas un fonds pour le bioGNV) pour assurer son développement, porteur de création d’emplois dans les territoires et d’indépendance énergétique.

Le dispositif tarifaire actuel a été mis en place en 2006, avec des modifications mineures en 2011 puis en 2013. Il a été complété par le dispositif de soutien au biométhane en 2011. Ces dispositifs ont permis de lancer la dynamique de la filière méthanisation, et de nombreux acteurs se sont mobilisés. Comme toute filière émergente, donc par définition fragile, ces acteurs ont besoin de disposer d’une visibilité dans la durée. Les Pouvoirs publics ont constamment réaffirmé leur intérêt à l’égard des dividendes multiples offerts par la méthanisation, en termes d’économie locale en milieu rural, d’environnement, d’agronomie, et il est important d’offrir des signaux cohérents.

Antoine Jacob, Président du Club Biogaz ATEE
Christian Couturier, Vice-Président du Club Biogaz ATEE

>> Télécharger le Rapport de la Cour des Comptes sur le développement des énergies renouvelables – Juillet 2013 (1,67 Mo)