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La filière française du biodiesel réagit suite à la publication d’une étude par la CE

La Commission européenne reporte sa communication,  attendue fin juillet, sur le changement indirect d’affectation des sols (CASI)

La réflexion se poursuit à Bruxelles sur le « changement indirect d’affectation des sols » appelé Casi en français ou Iluc en anglais. Ce sujet s’inscrit dans le cadre de la Directive européenne sur les énergies renouvelables qui définit les critères de durabilité auxquels doivent répondre les biocarburants. Ces critères concernent notamment la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) obtenue grâce aux biocarburants, par comparaison avec des carburants d’origine fossile. Le calcul de la réduction des GES pourrait intégrer l’impact éventuel d’un changement indirect d’affectation des sols (CASI), un impact impossible à quantifier de manière rigoureuse mais dont la prise en compte menacerait la filière biodiesel.

Dans un rapport publié en novembre 2010, la Commission européenne rappelait que, sur la bases des chiffres de consommation de 2007, la consommation de biocarburant a permis une réduction des GES estimés à 14 millions de tonnes équivalent CO2. Elle précisait aussi que ces chiffres ne tenaient pas compte des émissions de GES dues à un éventuel effet Casi, sujet sur lequel elle avait commandé quatre études. En décembre 2010, la Commission annonçait qu’elle ferait une publication sur ce sujet fin juillet . Cette communication n’a toujours pas eu lieu.

L’effet Casi appliqué aux biocarburants consiste à faire l’hypothèse que les cultures destinées à la production d’énergies renouvelables se substitueraient à des cultures alimentaires qui seraient déplacées ailleurs sur la planète. Une des études rendue à la Commission, émanant d’un institut de recherche basé à Washington se montre particulièrement critique vis-à-vis des biocarburants. Selon cette étude, du colza cultivé en Europe pour le biodiesel serait censé entrainer la plantation de palmiers à huile en Indonésie par exemple, plantation qui serait réalisée sur des tourbières, ce qui induirait une émission de GES.

Affichant une rationalité apparente, cette étude modélise les émissions de GES des biocarburants à partir d’hypothèses non vérifiées et très contestables sur l’utilisation des surfaces agricoles et la production agricole mondiales.

Cette étude fait en effet l’hypothèse que le développement des plantations de palmiers à huile, souvent néfaste pour les forêts et l’environnement, doit être imputé aux biocarburants parce que ces derniers privent le marché alimentaire de ressources en huile, de colza notamment. En réalité, le développement des plantations de palmiers à huile s’explique par de multiples facteurs : exploitation de bois tropicaux ; coût souvent avantageux de l’huile de palme par rapport aux autres huiles; caractéristiques particulières de l’huile de palme utilisée dans l’agro-alimentaire et dans l’industrie en général.

En d’autres termes, il est très contestable d’affirmer, comme le font les détracteurs des biocarburants, que l’huile de palme s’est développée pour remplacer une huile de colza qui ferait défaut au niveau mondial à cause des biocarburants. Si le biodiesel disparaissait, les cultures de colza européennes destinées aux biocarburants, disparaitraient aussi, faute de débouchés. La disparition des cultures de colza destinées au biodiesel n’empêcherait donc pas le développement de l’huile de palme. En revanche, la disparition de ces cultures renforcerait assurément en Europe la monoculture dont on connaît les effets sur la biodiversité. Ce serait un retour à la situation des années 90, avant le développement du biodiesel.

Par ailleurs, il faut rappeler l’importance de la filière des biocarburants pour l’alimentation animale. Les graines de colza ont une teneur en huile de 42% en moyenne, le reste constituant un « tourteau » riche en protéines indispensable à l’alimentation animale. Sur environ 1 million d’hectares de colza dédié au biodiesel en France, près de 60% sont en réalité destinés à l’alimentation animale, sous forme de tourteaux. Sans production de biodiesel, la France, qui a réussi faire passer son autosuffisance en protéines de 30% dans les années 80 à 60% aujourd’hui, devrait importer massivement, des tourteaux de soja, du Brésil notamment. Or l’extension du soja se fait souvent dans des zones tropicales riches en biodiversité.

En tout état de cause, la filière biodiesel a des effets induits positifs, économiques sociaux, agricoles et territoriaux, qui seraient remis en cause en cas de disparition des biocarburants. Les 10 millions de tonnes de biodiesel produites en Europe évitent autant d’importations de diesel. Par ailleurs, la filière de biodiesel a un poids économique réel : elle réalise un chiffre d’affaires annuel estimé à 10 milliards d’euros, obtenu grâce à de lourds investissements, estimés en Europe, à 4,5 milliards d’euros. En France, Sofiprotéol et sa filiale Diester Industrie ont investi 800 millions d’euros au cours des 4 dernières années. Sans conteste, la filière biodiesel représente de nombreux emplois créés,  non délocalisables car liés à des ressources agricoles locales.

La filière biodiesel européenne répond ainsi à des besoins environnementaux, sociaux et économiques majeurs, pour les territoires français et européens. Elle pourrait disparaître si la Commission européenne prenait des décisions politiques sur la base d’hypothèses fragiles non vérifiées.

Source : sofiproteol.com