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L’eau et les biocarburants

L’eau apparaît aujourd’hui comme un critère de durabilité incontournable pour les bioénergies. Si les biocarburants mobilisant les cultures alimentaires sont soumis aux mêmes risques que le secteur agricole vis-à-vis de la ressource en eau, les filières du futur ont un potentiel d’amélioration non négligeable qu’il convient de mieux appréhender pour permettre le bon développement de la ressource et des technologies.

S’il existe encore peu d’analyses à ce jour permettant une comptabilisation du puits à la roue des pressions sur l’eau par la production de biocarburants, on s’aperçoit néanmoins que les principaux enjeux se situent en amont des filières, au niveau de la production de la ressource biomasse. D’un point de vue quantitatif, les consommations d’eau pour la production de biomasse s’échelonnent entre 50 et 800 m3 par tep de carburant, et ne dépassent pas 30 m3 par tep pour les procédés de conversion. D’un point de vue qualitatif, les risques de flux de polluants sont plus aisés à contrôler en sortie d’unité industrielle qu’en milieu agricole plus diffus.

En première approche, les pressions sur l’eau exercées par les filières de première génération sont identiques aux filières alimentaires utilisant les mêmes cultures, dans le contexte actuel d’utilisation de terres agricoles cultivées. Les niveaux de pression sur la quantité comme sur la qualité deviennent plus importants en cas de changementd’usage de sol, impliquant le remplacement d’un couvert pérenne ou d’une culture particulièrement sobre.

Si les technologies de deuxième génération envisageront, en premier lieu, la valorisation de ressources de type sous-produits (pailles, rémanents forestiers, etc.) à enjeux environnementaux et coûts de revient limités, la mobilisation de cultures lignocellulosiques dédiées est à appréhender dans des schémas d’approvisionnement pouvant atteindre 1 Mt/an de biomasse. Il faudra alors s’assurer que leur sélection et intégration dans les systèmes de cultures agricoles actuels se fassent de manière à limiter les pressions, en particulier quantitatives, sur la ressource en eau. Il faut néanmoins rappeler que dans certaines conditions de conduite (cultures sobres associées à une baisse de rendement acceptable), l’implantation de cultures lignocellulosiques
pérennes peut apporter un potentiel d’amélioration de l’état des ressources en eau dans certaines zones à enjeux (bassin d’alimentation de captage, bords de cours d’eau, etc.). Si des travaux de recherches agronomiques restent encore à réaliser, ces premières analyses laissent présager un potentiel de développement de futures filières biocarburants plus vertueuses pour l’environnement.

Concernant la troisième génération de biocarburants, il s’agit aujourd’hui, pour atteindre les forts rendements attendus, de mettre au point des systèmes de culture de microalgues permettant un maximum de synergies et de recyclages entre les différents flux d’intrants (eau, CO2, nutriments, énergie) et de coproduits. Il apparaît néanmoins difficile d’envisager de telles productions dans des zones déjà soumises à tension sur la ressource en eau.

De la même manière que les biocarburants sont soumis à des enjeux de réduction significatifs d’émissions de gaz à effet de serre vis-à-vis de leurs références fossiles, leur empreinte sur la ressource en eau est à anticiper et pourrait être amenée à être incluse dans les processus de certification de la biomasse énergie. Parmi les différents types de carburants alternatifs, il convient par ailleurs de porter un regard critique sur les enjeux relatifs à l’eau qu’impliquerait un fort développement de la demande d’électricité pour la mise en œuvre de parcs de véhicules électriques (voir fiche « L’eau pour l’électricité »).

Daphné Lorne – IFPEN – Novembre 2010

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